Que peuvent faire encore les banques centrales ?

Les trois plus grandes banques centrales de la planète ont mis en œuvre des politiques monétaires particulièrement accommodantes au cours des dernières années mais la croissance mondiale ne repart toujours pas franchement. Que faut-il donc faire ? Les Etats doivent prendre le relais !
 
Le Fonds monétaire international (FMI) a abaissé de 0,1 point ses prévisions de croissance pour 2016 (3,1%) et pour 2017 (3,4%). Le consensus « buy side » de ZoneFinance, actualisé en juillet, table sur 3% cette année comme pour l’année prochaine. Les investisseurs redoutent les effets du Brexit à moyen terme et des révisions à la baisse ne sont pas exclues.
 
Que peuvent faire les banques centrales dans cet environnement ? Au cours des derniers mois, elles ont multiplié les initiatives. Après le vote en faveur d’une sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne, la Banque d’Angleterre a ramené son principal taux d’intérêt à 0,25%, un plus bas historique.
 
Dans la zone euro, le montant des emprunts d'Etats détenus par la Banque centrale européenne (BCE) a dépassé début septembre le seuil symbolique des 1.000 milliards d'euros. Mais cet assouplissement quantitatif, supposé relancer la croissance et l’inflation, ne donne pas les résultats escomptés. Le crédit bancaire repart timidement et le taux d’inflation n’était que 0,2% en août, loin de l’objectif de l’institut monétaire – inférieur mais proche de 2%.
 
Aux Etats-Unis, la stratégie de la présidente de la Réserve fédérale, Janet Yellen, suscite des interrogations. Cela fait plusieurs mois que les investisseurs attendent un relèvement des taux d’intérêt alors que depuis 2009, l’économie est en croissance, bien qu’à un rythme plus faible.
 
La Fed agira-t-elle lors de sa réunion du 21 septembre ? Beaucoup en doutent en raison de la proximité de l’élection présidentielle américaine et parient sur un resserrement monétaire en décembre.
 
Janet Yellen subit de nombreuses critiques pour avoir déclaré que la politique monétaire actuelle pouvait être efficace. Lawrence Summers, ancien conseiller du président Barack Obama, a jugé que cette assertion était comparable à celle de l’ancien président de la Fed Ben Bernanke affirmant que la crise des « subprime » pouvait être contenue facilement.
 
Les banques centrales ont inondé les marchés financiers de liquidités en espérant sauver l’économie. Cette stratégie a dopé certains actifs comme l’immobilier et les actions. Les indices boursiers américains sont par exemple en forte progression – le Nasdaq a atteint le 7 septembre un pic historique à 5.283,9 points alors qu’il avait fini l’année 2008 à 1.577,03 points.
 
La politique monétaire ne suffit donc plus. De quels outils disposent les responsables politiques ? Pour Frédéric Rollin, conseiller pour les investissements chez Pictet, « il y a une possibilité que les Etats prennent le relais des banques centrales en jouant sur les déficits budgétaires. »
 
Signe parmi d’autres que la question agite les investisseurs, l’expression « Fiscal Stimulus » apparaît de plus en souvent dans les nouvelles de Bloomberg, l’occurrence étant au même niveau qu’au printemps 2009. 
 
La question de la relance n’est plus taboue. Aux Etats-Unis, les deux principaux candidats à l’élection présidentielle – la démocrate Hillary Clinton et le républicain Donald Trump – se montrent favorables à des investissements massifs pour moderniser des infrastructures en piteux état. 
 
De leur côté, la Chine et le Japon, puissances exportatrices, disposent de marges de manœuvre pour soutenir l’activité chez eux.
 
Qu’en est-il de la zone euro ? En Allemagne, où les statistiques de la production industrielle restent décevantes, le sujet commence à être évoqué. Le pays, en situation d’excédent commercial et d’excédent budgétaire, a largement les moyens d’investir. Mais le pays demeure prisonnier d’une idéologie accordant la primauté aux équilibres financiers. Le récent échec électoral d’Angela Merkel provoquera-t-il une prise de conscience ?
 
Rien n’est moins sûr. Les dirigeants allemands redoutent d’envoyer un message de laxisme à des pays européens, au premier rang desquels la France, qui n’ont fait aucun effort pour assainir leurs finances publiques.
 
Pour autant, les responsables politiques doivent comprendre que les banques centrales ont atteint leurs limites et que les Etats doivent prendre le relais pour soutenir la croissance économique…