Croissance mondiale : jusqu’ici tout va bien !

Une croissance mondiale révisée en hausse, le commerce qui repart, la confiance qui tient, des marchés financiers qui alignent les records : le paradigme a-t-il changé et sommes nous entrés dans une phase économique d’un genre nouveau où les cycles n’auraient plus d’importance ? 
 
Et on ne parle pas des risques géopolitiques. La Corée du Nord ? Les déclarations va-t-en guerre du président américain Donald Trump ? La volonté de sécession de la Catalogne ? Le Brexit ? Les investisseurs semblent s’en désintéresser totalement. 
 
Globalement, les agents économiques ont renoué avec l’optimisme. C’est ce qui explique que le Fonds monétaire international (FMI) vient de relever ses prévisions pour le Produit intérieur brut (PIB) mondial, qu’il voit progresser de 3,6% cette année et de 3,7% en 2018 (contre 3,2% en 2016), soit 0,1 point de plus que lors de son précédent rapport. 
 
Philippe Ithurbide, Directeur de la recherche chez Amundi, fait état de « bonnes surprises en série » avec une synchronisation des principales économies. Il note que si la reprise cyclique sera toujours aussi dynamique en 2018, la croissance potentielle est durablement ralentie. L’érosion est liée notamment à la démographie et à la productivité, souligne-t-il.
 
Il estime le resserrement monétaire prévu par la Fed et par la BCE sera limité mais juge que les marchés sont tout de même trop complaisants. « La Fed va resserrer plus que ce qui est anticipé », dit-il. 
 
Il est clair que les Etats-Unis constituent aujourd’hui la principale source d’interrogation en raison de la durée du cycle d’expansion, qui a débuté en 2009, et en raison des doutes sur la politique économique actuelle.
 
Sans doute est-ce la raison pour laquelle les investisseurs sont plus prudents en matière de prévisions que le FMI. Le consensus « buy side » de ZoneFinance/Globalix de juillet dernier tablait sur 3,2% pour cette année et sur 3,3% pour l’an prochain. Il est possible que le consensus s’ajuste à la hausse mais les professionnels des marchés, naturellement prudents car ils sont chargés de protéger l’argent de leurs clients, se posent des questions.
 
Le FMI reconnaît une difficulté avec les Etats-Unis puisqu’il évoque une « incertitude politique significative » alors qu’en avril il prévoyait un stimulus généré par « les baisses d’impôt » promises par Donald Trump. Or, ce dernier ne semble pas avoir de stratégie définie et ne contrôle pas sa majorité au Sénat. Peut-il faire adopter son plan fiscal ? Rien n’est moins sûr. S’il y parvient, cela soutiendra l’économie et les entreprises. S’il rate son pari, il devra continuer à compter la politique monétaire.
 
Car, les marchés financiers sont plus que jamais dépendants des banques centrales, distributrices de liquidités en abondance depuis la mise en œuvre des programmes d’assouplissement quantitatif (Quantitative Easing). Ce qui a provoqué une inflation des actifs, faisant craindre une bulle spéculative. 
 
Entre la fin de l’année 2007 et début octobre, les indices boursiers américains ont enchaîné les records : le Dow Jones Industrials est passé de 13264 points fin 2007 à 22774 points début octobre, le S&P 500 de 1468 à 2549 et le Nasdaq de 2652 à 6590 ! 
 
Pour Morgane Delledonne, Fixed Income Strategist chez ETF Securities, « Aujourd’hui, il y a un ballon sur les marchés plutôt qu’une bulle. Le ballon a été artificiellement gonflé par les banques centrales et la déflation du ballon sera organisée par les banques centrales via la gestion du Quantitative Easing. »
 
Contrairement à la bulle spéculative de l’ère Internet (2000/2001) et à celle de l’immobilier en 2007/2008, la situation semble assainie. Pour autant, les valorisations atteignent des niveaux extrêmement élevés qui ne peuvent être justifiés que par la poursuite de la progression des bénéfices. Est-ce possible ? Peut-être mais cela suppose des mesures politiques (des réformes fiscales ici ou structurelles là) et on ne peut pas être certain que ce sera le cas.
 
L’incapacité de Donald Trump à faire adopter son package fiscal pourrait entraîner une correction boursière que les plus optimistes estiment aujourd’hui à 10% environ. Et si les marchés américains dévissent, les autres économies de la planète seront impactées. Mais 10%, ce n’est rien ! Sommes nous donc face à un nouveau paradigme ?