2019, vers un accord commercial sino-américain : quels enjeux pour les marchés financiers ?

par Sébastien Galy, Macro-Stratégiste Senior chez Nordea Asset Management

En ce début d’année 2019, de nombreux investisseurs souhaitent tourner la page de l’année 2018. Néanmoins, l’incertitude demeure autour de l’accord commercial (ou la guerre commerciale, selon le point de vue) entre la Chine et les Etats-Unis. L’importance du déficit commercial et l’agressivité du président américain laisse penser que celui-ci réussira probablement à forcer la Chine à conclure un accord commercial. Les négociations ayant conduit au « shutdown » de l’administration américaine sont à l’image des négociations qui auront lieu avec la Chine. Dans les deux cas, le processus nuit à l'activité économique mais in fine Donald Trump obtiendra en partie ce qu'il souhaite.

La Chine et les États-Unis bénéficient actuellement d’un « cessez-le-feu » de 90 jours suite à la promesse de la Chine d'acheter une très grande quantité de produits américains, alors que les importations de soja s’étaient complètement effondrées. Au cours des négociations, les États-Unis ont donné une liste de leurs souhaits et la Chine commence lentement à faire de même. Pour les investisseurs, l’enjeu est de déterminer à quelle date l’accord sera signé. L’accord, qui doit soutenir la candidature du président américain en 2020, devrait donc être signé dans le courant du troisième trimestre, plus probablement en septembre, à l’approche de l’ouverture des débats des Primaires américaines. Cette issue positive pourrait être anticipée par les marchés dès le premier trimestre.

D’ici un probable accord, continuer de favoriser les actions à faible volatilité

Si la probabilité d’un accord avec la Chine se confirme au cours du premier trimestre, nous serons amenés à faire évoluer notre allocation d’actifs pour privilégier les actions et obligations des pays émergentes ainsi que les actions européennes et américaines. D’ici-là, nous restons dans un environnement de marché difficile caractérisé par une forte volatilité des actions et des performances décevantes.

L’an dernier, la volatilité a cru jusqu'à 36%, un niveau comparable à celui de 2011 ou 2015. Nous prévoyons un régime moyen de 12% à 25% pour 2019 en raison d'une croissance plus faible, d’un endettement élevé de la part des entreprises du segment high yield ou encore du resserrement de la politique monétaire de la Fed, qui pourrait toutefois s'arrêter en 2019. Cela signifie que les actions à faible risque et à faible bêta sont à privilégier en 2019 et qu’il faudra revenir vers les pays émergents dès lors que l’accord avec la Chine se précisera avec plus de certitude.

Nous restons donc positifs sur les actions à faible volatilité, ainsi que sur les investissements en primes de risque (risk premia) et les stratégies long-short. Celles-ci permettent en effet d’adopter une stratégie défensive dans un environnement caractérisé par une croissance des bénéfices qui a culminé en 2018, puis a commencé à ralentir, une tendance vouée à se poursuivre en 2019. Associé à une baisse du prix des actifs, ce mouvement s’est traduit par une forte baisse des ratios P/E. Par conséquent, cela se traduit par des valorisations attractives pour les actions les moins risquées.

Marché obligataire : privilégier le high yield émergent et européen

Sur le marché obligataire, nous privilégions la dette high yield des marchés émergents et européens. Les spreads high yield ont en effet connu une hausse en fin d'année dernière, redonnant davantage d’attractivité à cette classe d’actifs. Néanmoins, les pics de taux signalent également des craintes liées à des fondamentaux tendus, à un risque de fin de cycle et à une dégradation de la qualité des résultats. La chute du pétrole nuit également aux sociétés de ce secteur, qui représentent 15% du marché high yield américain. L’OPEP a réduit sa production de pétrole, mais la demande est étonnamment faible et pourrait le rester. La faiblesse persistante des prix du pétrole finirait par frapper durement le haut rendement américain.

Nous préférons donc le segment high yied des marchés émergents et européens. La dette des marchés émergents devrait être soutenue par un dollar plus faible et une inversion des flux, sur la base d'un éventuel accord avec la Chine. On notera enfin que le coût de la couverture de change en EUR / USD a atteint des sommets historiques en 2018, dépassant les 300 points de base. Cette situation offre aux investisseurs américains des opportunités intéressantes pour se positionner sur les dettes en Euro en étant couverts du risque de change.