Quels sont maintenant les problèmes des banques ?

par Patrick Artus, directeur de la recherche et des études économiques de Natixis

De l'été 2008 au 1er trimestre 2009, les problèmes essentiels des banques ont été d'une part l'accès à la fois à la liquidité et aux ressources longues et d'autre part la recapitalisation des pertes subies sur les portefeuilles d'actifs.

Mais cette situation évolue rapidement à partir du 2ème trimestre 2009. Le fonctionnement des marchés interbancaires redevient normal, les ratios de fonds propres sont redevenus élevés.

Les banques sont aujourd'hui confrontées à des difficultés différentes :

  • même s'il y a amélioration, le coût des ressources à long terme est toujours élevé, ce qui impose une transformation accrue ;
  • retour progressif des marchés du crédit bancaire à une situation d'excès d'offre, d'où l'écrasement des marges de taux d'intérêt sur les crédits qui rend à nouveau non rentable l'activité d'intermédiation traditionnelle ;
  • situation macroéconomique qui fait prévoir la poursuite de la hausse des taux de défaut des entreprises comme des ménages. 

1. La crise bancaire de la période été 2008 – début 2009

Après la faillite de Lehman, les banques (nous regardons les situations des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la zone euro) sont confrontées : 

  • à l'arrêt des marchés interbancaires ;
  • aux pertes sur les portefeuilles d'actifs dues à l'effondrement des prix des actifs, d'où la nécessité de recapitalisation ;
  • à l'impossibilité d'émettre d'autres dettes à moyen-long termes que les dettes garanties par les Etats.

Cette phase de la crise est aujourd'hui terminée :

  • les marchés interbancaires fonctionnent à nouveau normalement grâce à l'intervention des Banques Centrales ;
  • les banques disposent de réserves de liquidités importantes ;
  • les pertes ont été recapitalisées et les ratios de fonds propres des banques sont élevés ;
  • le coût des financements à long terme s'est réduit fortement et les banques peuvent émettre à nouveau à long terme.

2. Les problèmes nouveaux et à venir des banques

La situation des banques s'est donc beaucoup modifiée et leurs problèmes sont devenus différents.

D'une part, l'équilibre des marchés du crédit bancaire revient vers sa situation d'avant la crise qui est une situation d'excès d'offre, surtout en ce qui concerne les crédits aux entreprises :

  • les banques deviennent beaucoup moins restrictives dans la distribution de crédit ;
  • la demande de crédit immobilier des ménages se redresse, mais la demande de crédit à la consommation et de crédit aux entreprises reste faible ;
  • les marges de taux d'intérêt sur les crédits se resserrent, aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et dans la zone euro.

Le retour des marchés du crédit bancaire vers la situation d'excès d'offre est donc déjà en train de faire disparaître la rentabilité de l'activité de prêt bancaire (d'intermédiation) aux Etats-Unis et dans la zone euro.

Le second problème des banques, qui aggrave le premier qui vient d'être décrit, est l'évolution de l'équilibre macroéconomique. Même s'il y a amélioration, la croissance reste très faible et insuffisante pour empêcher :

  • la poursuite de la dégradation de la situation financière des entreprises, surtout dans la zone euro donc de la hausse des défauts d'entreprises ;
  • la poursuite des pertes d'emplois et de la montée du chômage, d'autant plus qu'il reste en Europe un fort déficit de productivité à corriger. 

Au total, les banques ne vont plus être affectées par leurs portefeuilles d'actifs ou par leur capacité à se financer à court terme ou à long terme, mais par l'écrasement des marges de la banque de détail avec :

  • le retour à une situation d'excès d'offre (donc de marges de taux d'intérêt faibles) sur le marché du crédit bancaire ;
  • la poursuite de la hausse des défauts des ménages et des entreprises.

L'écrasement des marges sur les crédits va aussi pousser les banques à une transformation accrue, afin d'utiliser des ressources courtes peu chères et non seulement des ressources longues encore chères pour financer les emplois longs.

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