Le haut rendement gagne en respectabilité en Europe

par Klaus Blaabjerg, Responsable de la Gestion High Yield « Value » chez Sparinvest

En 2009, une classe d’actifs a particulièrement retenu l’attention. En effet, non seulement les obligations à haut rendement internationales ont surperformé par rapport aux actions, mais l’ensemble du marché de cette classe d’actifs a gagné en importance et en influence, particulièrement en Europe.

A bien des égards, 2009 a été une année charnière pour le haut rendement. Selon Bloomberg, en 2009 les émissions d’obligations d’entreprises dans le monde entier ont progressé de 31 %, à 3 040 milliards de dollars US, tandis que les émissions de titres à haut rendement se sont envolées de 181 % pour atteindre 207 milliards de dollars US. Evidemment, la majeure partie (75 % environ) de cette activité s’est déroulée aux Etats-Unis où le haut rendement est à la fois un marché mature et une classe d’actifs très appréciée.

Mais en 2009, le marché du haut rendement a également gagné du terrain en Europe. Au cours d’une année où les banques – après la crise financière – se sont totalement polarisées sur le redressement de leur bilan, leur activité de prêts aux entreprises a été réduite à sa plus simple expression. Les sociétés européennes à la recherche d’une alternative de financement fiable l’ont trouvée sur les marchés primaires du crédit où elles ont été en mesure de lever des fonds par la voie d’émissions obligataires. Ainsi, le marché européen de la dette des entreprises a assis sa réputation de moteur de la croissance économique, en contribuant au redressement des marchés financiers au sens large par la mise à disposition des sociétés des fonds nécessaires pour sortir de la récession et passer en phase d’expansion.

Aux Etats-Unis, le haut rendement se voit accorder sa propre allocation en tant que composante essentielle d’un portefeuille de placements judicieusement équilibré. En Europe, la majorité des investisseurs considéraient, jusqu’à une date récente, ce segment comme un créneau des marchés de la dette, qu’ils assimilaient avec dédain (et souvent par erreur) aux « junk bonds » ou obligations « pourries ». Dorénavant, avec l’émission probable de 50 milliards d’euros de nouveaux titres à haut rendement en Europe en 2010 et compte tenu que les émetteurs sont conscients de la nécessité de créer des obligations offrant des bonnes conditions à leurs créanciers, le haut rendement est en évolution rapide et en voie d’amélioration. Il est donc grand temps de le considérer comme une classe d’actifs à part entière.

Pas de rendement sans risque

Dans la catégorie spéculative de l’éventail des obligations d’entreprises, les rendements sont plus élevés en raison d’un risque de défaillance supérieur. Début 2009, au moment où le marché du crédit et le marché actions étaient tous deux en chute libre, la prime de crédit du haut rendement était énorme. Le marché intégrait effectivement dans les cours un niveau de risque de défaillance potentiellement désastreux. Mais cette prudence était excessive. En effet, même les obligations émises par des sociétés dotées d’un bilan solide et ayant toujours respecté leur échéanciers de remboursement étaient valorisées comme si elles étaient presque assurées de faire défaut. Mais l’envers de ce scénario de risque était que les investisseurs qui étaient prêts à acheter des obligations à haut rendement moyennant une prime de risque extrêmement élevée risquaient éventuellement d’en tirer des gains sans précédent, à condition que le monde ne s’arrête pas de tourner et que les entreprises soient en mesure de poursuivre leurs activités et de les rembourser.

A mesure que l’année a avancé, le risque de défaillance s’est atténué et les investisseurs ayant misé sur le haut rendement ont été, en effet, très bien récompensés. L’indice Merrill Lynch Global High Yield a affiché une progression colossale de 60,4 %, sans commune mesure avec celle des actions internationales. L’indice MSCI World a, pour sa part, progressé de 25,9 % en 2009. Mais, bien évidemment, pour les gérants de fonds de pension, « une hirondelle ne fait pas le printemps ». Il est donc intéressant d’analyser la performance du haut rendement sur les dix dernières années. crédit et le marché actions étaient tous deux en chute libre, la prime de crédit du haut rendement était énorme. Le marché intégrait effectivement dans les cours un niveau de risque de défaillance potentiellement désastreux. Mais cette prudence était excessive. En effet, même les obligations émises par des sociétés dotées d’un bilan solide et ayant toujours respecté leur échéanciers de remboursement étaient valorisées comme si elles étaient presque assurées de faire défaut.

Mais l’envers de ce scénario de risque était que les investisseurs qui étaient prêts à acheter des obligations à haut rendement moyennant une prime de risque extrêmement élevée risquaient éventuellement d’en tirer des gains sans précédent, à condition que le monde ne s’arrête pas de tourner et que les entreprises soient en mesure de poursuivre leurs activités et de les rembourser. A mesure que l’année a avancé, le risque de défaillance s’est atténué et les investisseurs ayant misé sur le haut rendement ont été, en effet, très bien récompensés. L’indice Merrill Lynch Global High Yield a affiché une progression colossale de 60,4 %, sans commune mesure avec celle des actions internationales. L’indice MSCI World a, pour sa part, progressé de 25,9 % en 2009. Mais, bien évidemment, pour les gérants de fonds de pension, « une hirondelle ne fait pas le printemps ». Il est donc intéressant d’analyser la performance du haut rendement sur les dix dernières années.

Le graphique montre que les rendements des obligations High Yield ont été largement supérieurs à ceux des actions. Toutefois, il est essentiel de noter que ces rendements ont été obtenus au prix d’un risque inférieur à celui accompagnant les investissements en actions. Ce constat n’est guère surprenant lorsque l’on considère que les porteurs d’obligations sont des investisseurs prioritaires.

Les sociétés émettrices d’obligations s’engagent normalement à placer le remboursement de leurs créanciers en tête de leurs priorités, devant les intérêts des actionnaires. 

Mais ce profil de risque / rendement attractif n’est qu’un des arguments en faveur des titres à haut rendement. En effet, il existe un autre argument qui réside dans la faible corrélation entre cette classe d’actifs et d’autres composantes de base des fonds de pension.

Afin de bien comprendre comment les obligations High Yield produisent leurs rendements, il est indispensable de bien comprendre le risque qui accompagne cette classe d’actifs. De tout temps, les rendements plus élevés versés par les obligations d’entreprises par rapport aux emprunts d’Etat ont été considérés comme une rémunération nécessaire pour les investisseurs et ce, à double titre.

Premièrement, les revenus des obligations d’entreprises sont imposables alors que les emprunts d’Etat ne sont pas assujettis à l’impôt. Deuxièmement, une obligation d’entreprise ne peut bénéficier d’une notation supérieure à celle du pays dans lequel elle est émise car la société est plus susceptible d’une défaillance sur ses dettes que le pays lui-même. La fiscalité et le risque de défaillance étaient donc acceptés et reconnus comme étant l’explication logique de la « prime de crédit » offerte par les obligations d’entreprises.

En 2001, les professeurs Elton et Gruber ont entrepris une étude, dont l’objet était de vérifier si d’autres facteurs de risque pouvaient expliquer l’écart entre les rendements des obligations d’entreprises et ceux des emprunts d’Etat. Ils ont découvert que la fiscalité et le risque de défaillance ne représentaient qu’un peu plus de la moitié de la prime de crédit. Le reste de cet écart de taux était imputable à d’autres facteurs, jusqu’alors non-identifiés. Les recherches menées par Elton et Gruber ont permis d’établir qu’une part importante de la composante jusqu’alors inconnue de cet écart de taux était imputable aux mêmes facteurs que ceux identifiés par Fama et French comme étant à l’origine des rendements excédentaires (« excess return ») sur les marchés actions, en l’occurrence la taille et le caractère value.

Vu que les porteurs d’obligations et d’actions prêtent en fait leur argent à une société, on s’attendrait à ce que les mêmes effets (effet taille et effet value) se manifestent sur les deux marchés. A l’instar des investisseurs en actions, les porteurs d’obligations devraient également être rémunérés pour les risques, perçus comme supérieurs, liés au fait qu’ils accordent des prêts à de petites sociétés sous-évaluées. Mais les obligations émises par de telles sociétés sont-elles vraiment plus risquées ? Les petites sociétés sont souvent pénalisées sur le marché du crédit du simple fait de leur taille, sans égard pour leurs résultats financiers. Ces sociétés offrent des rendements très attractifs, souvent parce que leur risque de défaillance a été surestimé (ou n’a pas fait l’objet de recherches suffisantes) par le marché par rapport aux atouts fondamentaux que recèlent leurs bilans. Il est vrai que l’achat d’obligations de sociétés de moindre taille s’accompagne parfois d’un risque de liquidité, mais celui-ci ne devrait pas décourager l’investisseur à long terme. Quant aux sociétés sous-évaluées, une part du risque supplémentaire qu’elles comportent pour les porteurs de leurs obligations tient à l’activité soutenue de fusions-acquisitions dans le secteur « value ».

Le crédit a été décrit comme un « produit binaire », qui ne compte que deux issues possibles : la défaillance ou le remboursement. Mais la possibilité d’une reprise par acquisition (ou rachat) devrait faire l’objet de recherches au moment de l’achat. Il est en effet extrêmement important de s’assurer que l’obligation offre des garanties de remboursement en cas de changement de propriétaire. Si les obligations sont assorties d’engagements contractuels appropriés offrant une protection à leurs porteurs, un rachat ou une fusion peuvent avoir un effet très positif dans le cas où elles offrent un remboursement à la valeur nominale ou la possibilité que les obligations se voient accorder une notation supérieure si l’acquéreur peut offrir à la société cible une solidité financière supérieure.

Les analystes conviennent que dans un contexte de demande soutenue de la part d’investisseurs à l’affût de rendements, il est probable que le secteur du haut rendement continue d’être vigoureux en 2010 et offre des rendements à deux chiffres. Contrairement aux actions et aux obligations « investment grade », les obligations à haut rendement ont tendance à afficher de bonnes performances au moment des premiers relèvements de taux après une récession, à mesure que l’économie s’améliore et que l’inflation atténue la dette.