Banques américaines : mauvaise année 2008, sombres perspectives 2009

par Estelle Honthaas, économiste au Crédit Agricole

• La FDIC a publié les résultats 2008 agrégés de l’ensemble des banques commerciales américaines et des caisses d’épargne dont elle assure les dépôts : leur résultat net global est tout juste positif sur 2008. 
• Les principaux acteurs financiers non bancaires (AIG, Fannie Mae) ont également connu une semaine noire, paniquant les marchés par leurs annonces de pertes record au titre de l’année 2008.

Les banques américaines affichent un résultat net positif sur l’année, bien qu’en forte chute : 16 milliards de dollars, contre 100 milliards de dollars en 2007. Le ROE agrégé s’établit à 1,2 % (2 % pour les seules banques commerciales), un niveau historiquement faible au regard d’une moyenne de long terme de 10%. De l’aveu même de la FDIC, si les traitements comptables favorables(1) appliqués lors des fusions avaient été exclus des comptes 2008, le résultat net annuel agrégé aurait été négatif.

Le PNB contribue directement à la baisse du résultat : il diminue de 4 %, essentiellement du fait de la baisse des revenus hors intérêts (-11 %). C’est surtout de l’augmentation du coût du risque que provient l’essentiel de la baisse du résultat : celui-ci triple pratiquement par rapport à 2007, et s’élève à 174 milliards de dollars sur l’année. Il absorbe désormais 84% du RBE.

Des efforts importants (mais insuffisants pour compenser la baisse du PNB) ont été faits pour maîtriser les frais de gestion, qui diminuent de 1 %, avec notamment une réduction des effectifs de 61 000 sur un an, soit près de 3 % du total. Mais désormais, le niveau de solvabilité des banques américaines est ouvertement mis en doute. C’est ce qui explique la volonté du Trésor de procéder à des stress tests sur les principaux établissements financiers pour, enfin, lever les incertitudes des marchés sur leur solvabilité. C’est également ce qui explique la défiance des marchés financiers vis-à-vis de Citigroup et de Bank of America, qui affichent toutes deux des ratios de Tangible Common Equity(2) parmi les plus faibles des principales banques américaines.

Citigroup, AIG, Fannie Mae : pas de répit

Dans ce contexte, le Trésor a converti en actions ordinaires 25 milliards de dollars des actions préférentielles injectées précédemment dans Citigroup (dont il détient désormais 36 % du capital), permettant de porter le TCE de Citigroup à 81 milliards de dollars, contre 29,7 précédemment.

AIG, dont l’Etat détient 80 % du capital depuis septembre 2008, a glacé les marchés en annonçant une perte de près de 100 milliards de dollars pour 2008, et un nouvel appel de 30 milliards de dollars au Trésor. Fannie Mae a également atteint une perte record en 2008, de 58,7 milliards de dollars, et devrait bénéficier d’une nouvelle injection de capital de 15 milliards de dollars. Ces résultats sont à mettre principalement sur le compte de la poursuite de la baisse du marché immobilier, et de la débâcle boursière de la fin d’année 2008.

Pas d’éclaircie en vue au premier semestre 2009

Malgré les efforts colossaux des pouvoirs publics pour stabiliser les marchés financiers (plan Geithner) et faire repartir la croissance (stimulus budgétaire), les perspectives 2009 restent sombres pour l’ensemble des banques américaines. L’année restera marquée par la poursuite des ajustements commencés en 2008 (suppressions d’effectifs, vente d’actifs non stratégiques) et une accélération de la recomposition du paysage bancaire, sur fond de très fort soutien des pouvoirs publics.

NOTES
(1) En cas de fusions, les revenus et dépenses des institutions achetées ne sont pas comptabilisés dès que le rachat est effectif. Les revenus et dépenses qui avaient été enregistrés avant la date d’acquisition sont comptabilisés dans les variations d’actifs, de capital et de réserves de l’établissement acquéreur. 
(2) Le Tangible Common Equity Ratio est un ratio de solvabilité plus restrictif que le Tier one, car excluant les éléments intangibles et les actions préférentielles de la mesure du capital.

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