G20 : quatre mois de réflexion…

par Isabelle Job, économiste au Crédit Agricole

– Sur le front des priorités économiques immédiates, le G20 s’est contenté de déclarations d’intention, se bornant à mettre en avant des initiatives, qui existent  déjà ou qui auraient vu le jour, même en l’absence de toute concertation. 
– Sur le front de la réforme de l’architecture financière globale, la déclaration finale se limite à de grands principaux généraux, reprenant tout ou partie des axes de réflexion avancés par le camp européen.

Le G20 s’est réuni le week-end dernier à l’occasion d’un sommet exceptionnel que certains aiment à qualifier de nouveau Bretton Woods. L’impératif était double : il s’agissait de s’entendre pour essayer de combattre l’une des plus graves crises économiques et financières de l’histoire contemporaine tout en s’engageant à réformer le système monétaire mondial pour lui conférer à terme plus de stabilité.

Des déclarations d’intention…

L’arrêt de la prodigalité du consommateur américain, contraint de restaurer ses équilibres bilantiels (plus d’épargne et moins de consommation), pose en effet un sérieux défi pour une croissance mondiale qui s’est nourrit de ses largesses. Une des priorités est de prévenir une crise majeure sur fond de désintégration du système financier et de risque de dépression, en stimulant la machine économique mondiale pendant que se réduisent les déséquilibres globaux. 

Dans un contexte d’interdépendances croissantes, les politiques macroéconomiques doivent être pensées à l’échelle mondiale. La récession est là, son ampleur et sa durée vont en partie dépendre de la capacité des pays à coopérer pour amortir le creux cyclique. Les annonces de plans de relance budgétaire se succèdent, mais selon une approche discrétionnaire dictée par les priorités nationales.

Finalement, sur ce volet, le G20 s’est contenté de déclarations d’intention en s’accordant sur la nécessité de :

  • redoubler d’effort pour stabiliser les marchés,
  • actionner les leviers monétaires et budgétaires afin de soutenir la demande globale,
  • donner les moyens financiers aux institutions de Bretton Woods (banque mondiale et FMI) pour venir en aide aux pays émergents en difficulté.

La Chine, le Japon et l’Allemagne, les trois grands réservoirs d’épargne mondiale, se sont probablement retrouvés sur la sellette en tant que relais de croissance possible à l’échelle globale. Mais ces derniers ont sans doute argué en avoir fait assez, ayant pris soin d’annoncer au préalable des plans de relance budgétaire au niveau domestique (15,7 Mds USD en Allemagne, 168 M USD au Japon et plus de 586 Mds USD pour la Chine seule). La balle s’est ainsi retrouvée dans le camp américain, les Etats-Unis étant accusés de vivre depuis trop longtemps au-dessus de leurs moyens.

La réunion du G20 n’a donc pas été décisive de ce point de vue, les déclarations d’intention se bornant à mettre en avant des initiatives qui existent déjà ou qui auraient vu le jour, même en l’absence de toute concertation.

… Et un programme de réflexion

Si les priorités économiques immédiates ont été au menu des discussions, le principal sujet de la réunion a été consacré à la réforme du capitalisme mondial.

Là encore, les avancées sont loin d’être concluantes. L’absence de Barack Obama a sans doute pesé dans les débats et la déclaration finale se limite à de grands principaux généraux, reprenant tout ou partie des axes de réflexion avancés par le camp européen avec au menu : harmonisation des normes comptables, amélioration de la transparence des marchés et des produits dérivés, renforcement des pratiques réglementaires, de la surveillance (notamment pour les agences de notation) et refonte des instances de gouvernance supranationales.

Néanmoins, on peut adresser un satisfecit au G20 sur trois points. Il était d’abord important de relancer le processus de Doha à l’heure où les tentations protectionnistes risquent de renaître.

Ensuite, la présence des grandes puissances émergentes est une première et traduit bien la recomposition du village global selon un axe multilatéral. Enfin, si on ne pouvait escompter réformer le Système Monétaire International en un jour, il était essentiel que le sommet du G20 s’accorde sur un agenda précis pour mener à bien ce travail de réflexion.

C’est chose faite avec un nouveau rendez-vous en avril. Les intentions sont bonnes, il s’agit maintenant de mettre à profit ces quatre mois de réflexion, avant de passer à l’action !