L’invité surprise ?

par Delphine GEORGES et Ibra WANE, stratégistes chez Crédit Agricole AM

L’été s’achève, la récession s’estompe. Mais l’attention des marchés pourrait désormais se tourner vers une toute autre menace : celle du virus H1N1 qui, si il mute, pourrait bien faire vaciller la reprise…

A ce jour, il s’est montré peu dangereux mais ceci pourrait changer à l’automne. En effet, à l’occasion d’une mutation, le nouveau virus déjouerait les vaccins dérivés des souches précédentes. C’est ce type de mutation qui transforme une banale épidémie en pandémie, comme cela s’est déjà produit avec la grippe espagnole de 1918, la grippe asiatique de 1957 et celle de Hong Kong en 1968.

Selon la Banque mondiale, le coût éventuel d’une pandémie varierait de 0,7 % à 4,8 % du PIB. La fourchette basse correspondant à une “catastrophe modeste” à l’instar de la grippe de Hong Kong et la haute, à une “catastrophe sévère” du type grippe espagnole. L’économie serait alors désorganisée avec des transports en commun et des services publics très perturbés et un absentéisme massif.

Quelles répercussions pour les actions ? Au plan des mécanismes, il est intéressant de faire un parallèle avec l’épidémie de SRAS en 2003. Lors de sa phase la plus virulente, de février à avril, elle avait lourdement pesé sur le MSCI Emerging Asia, – 11 % par rapport au MSCI World. Selon les styles, on note une ligne de partage logique entre les valeurs Cycliques (- 7 % absolu) et Défensives (+ 2 %) ; l’épidémie étant assimilable à un recul momentané de la production, et donc à une moindre couverture des frais fixes. A style équivalent, les secteurs les plus “dématérialisés” se sont mieux comportés que ceux à forte intensité humaine (exemple : semi-conducteurs versus SSII). Puis, à partir du fléchissement de l’épidémie, la situation est rapidement revenue à la normale, de telle sorte qu’à fin juillet, Cycliques et Défensives affichaient la même performance. 

La comparaison entre SRAS et H1N1 comporte toutefois des limites. Tout d’abord, leur empreinte géographique : alors que 96 % des victimes du SRAS étaient en Asie, aujourd’hui près de 55 % des décès recensés l’ont été au Canada, aux USA et en Grande-Bretagne. Par ailleurs, si le SRAS s’était avéré très dangereux, il avait néanmoins été “relativement” bien contenu avec moins de 10 000 cas recensés.

En conclusion, selon qu’il évolue ou qu’il mute, le H1N1 pourra soit s’avérer bénin, soit bien plus nocif que le SRAS. Dans le second cas, il faudra adapter ses stratégies en se remémorant les leçons du SRAS.