La Banque d’Angleterre à l’honneur

par Caroline Newhouse-Cohen, économiste chez BNP Paribas

A l’issue de la réunion du Comité de Politique Monétaire, la Banque d’Angleterre a adopté de nouvelles mesures non conventionnelles, jugeant que « la récession au Royaume-Uni apparaît avoir été plus profonde qu’anticipé ». La Banque centrale reconnaît toutefois que l’économie a donné récemment des signes de reprise.

La production manufacturière a augmenté de 0,4% m/m en juin, les conditions se sont même encore améliorées depuis. L’indice CIPS du secteur manufacturier est repassé au-dessus de 50 en juillet, pour la première fois depuis avril 2008. Dans les services, l’indice CIPS d’activité s’est établi à 53,2, son plus haut niveau depuis février 2008, en hausse de 1,6 point par rapport à juin. La composante relative à l’activité nouvelle, un des indices les plus avancés de l’enquête, est passée de 49,7 à 52,7.

Toutefois, la Banque d’Angleterre estime que « la faiblesse de l’économie devrait persister encore quelque temps, pesant à la baisse sur l’inflation à moyen terme ». Les prêts aux entreprises ont reculé, et les spreads sur les emprunts bancaires se sont élargis. La croissance de M4 est demeurée atone en juin, en dépit des mesures non conventionnelles prises jusque-là.

Le Comité a donc estimé que de nouvelles mesures non conventionnelles s’imposaient pour respecter son objectif de 2% d’inflation à moyen terme. Il a décidé, par conséquent, d’augmenter le programme d’achat d’actifs, de GBP 50 milliards. Celui-ci s’élève désormais à GBP 175 milliards. Par ailleurs, la maturité minimum des actifs éligibles est abaissée à 3 ans au lieu de 5 ans précédemment. Enfin, le Comité a voté le maintien du taux directeur à 0,5%.

La Banque centrale européenne se montre, elle aussi, prudente. Le Conseil a décidé de laisser le refi inchangé, dans l’attente de pouvoir mesurer pleinement l’impact des décisions monétaires passées sur l’économie réelle. Pour l’heure, les dernières enquêtes publiées signalent un ralentissement de moins en moins intense de l’activité dans la zone euro. En particulier, l’indice PMI du secteur manufacturier a progressé de près de 4 points et la composante des nouvelles commandes d’environ 5 points, à 49,8, très proche donc de la barre des 50 qui sépare les zones de contraction et d’expansion. Par ailleurs, le ratio des commandes rapportées aux stocks, un bon indicateur de la tendance à court terme de la production industrielle, a encore progressé en juillet, atteignant son point le plus élevé depuis début 2007. La production industrielle pourrait ainsi rebondir au troisième trimestre, en hausse pour la première fois en six trimestres.

En revanche, l’inflation continue de se détériorer dans la zone euro. En juillet, elle s’est inscrite en forte baisse (-0,6%, après -0,1% en juin), à son plus bas niveau depuis la création de l’indice en 1990. Bien que le détail ne soit pas encore publié, il est probable que l’évolution des prix des matières premières en général et du pétrole en particulier (qui avaient atteint un pic l’année dernière) explique en grande partie ce mouvement. L’indice n’étant pas corrigé des variations saisonnières, le repli de juillet reflète aussi certainement l’effet des soldes d’été. A court terme, grâce à la remontée des cours de l’or noir, l’inflation totale devrait retourner progressivement en territoire positif avant la fin de l’année. A moyen terme, cependant, les perspectives sont plus nuancées. L’atonie actuelle de la demande et le niveau excédentaire des capacités de production expliquent à la fois la faiblesse du pouvoir de fixation des prix des entreprises et la dégradation continue du marché de l’emploi. Ainsi, la Commission européenne rapporte-t-elle, quel que soit le secteur concerné, une poursuite de la baisse anticipée des prix de vente en juillet. Si celle-ci se poursuivait, elle pourrait mettre en péril l’amélioration de la confiance des entreprises et donc menacer à terme la reprise. Une nouvelle action de la BCE s’avérerait alors nécessaire.

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