La crise du COVID-19, l’occasion de se souvenir des différentes baisses enregistrées par la dette émergente

par Barney Goodchild, Spécialiste en investissement chez Aviva Investors

Le COVID-19 a impacté les marchés financiers mondiaux avec une rapidité et une ampleur telles que les performances de la dette émergente ont chuté à une vitesse inédite depuis la crise financière mondiale. Néanmoins, l’histoire nous a montré que cette classe d’actifs était susceptible de se redresser tout aussi rapidement.

Les marchés financiers ont récemment subi des fluctuations spectaculaires en raison de la pandémie de coronavirus (COVID-19) et il n’est que trop facile de se laisser entraîner par ces mouvements quotidiens. La tentation de vendre en période de stress peut également être irrésistible. Toutefois, si l’on en croit l’histoire, les éventuels bénéfices à court terme sont souvent largement éclipsés par les gains que l’on pourrait obtenir à long terme en conservant ses positions. Bien que les répercussions du COVID-19 sur la dette émergente soient probablement d’une nature différente de celles des baisses passées, replacer ces mouvements récents dans un contexte à plus long terme met en évidence l’attrait historique de cette classe d’actifs.

Depuis le lancement de l’indice JP Morgan EMBI Global en 1994, six baisses de plus de 10 % ont été enregistrées (voir graphique 1). Sur la même période, l’indice a enregistré une performance cumulée de 631 %, en comptant les 18 % de correction en raison de la crise du COVID-19.

Graphique 1 : Baisses et performances de l’indice de référence de la dette émergente libellée en devises fortes

Source: Aviva Investors, as at 23 March 2020. Index returns based on JP Morgan EMBI Global Index USD. Past performance is not a guide to future returns

Le graphique et le tableau ci-dessus soulignent non seulement l’ampleur des baisses subies par les investisseurs sur la dette émergente en devises fortes, mais aussi le caractère relativement rapide de la reprise dans la plupart des cas. Si l’on considère les reculs les plus importants de l’indice (plus de 10%), la durée moyenne pour recouvrir les pertes subies était de neuf mois à partir du creux de la baisse.

Les baisses importantes ont également tendance à être suivies par des périodes de performances élevées ; par exemple, la performance moyenne sur 12 mois après une baisse importante est d’environ 30 %. Si l’on se base sur une baisse moyenne de 18,5 % et sur un rebond moyen de 30,2 % sur 12 mois, le fait de rester investi tout au long de la période de baisse et les 12 mois suivants se traduirait par une performance nette positive de 6,5 % en moyenne.

Bien que ces chiffres soient basés sur des valeurs moyennes des baisses et des rebonds (et les investisseurs doivent toujours se rappeler que les performances passées ne préjugent pas des performances futures), cette analyse met en évidence les bénéfices qu’il y a à rester investi sur cette classe d’actifs.

Le comportement des investisseurs

Même si nous pouvons comprendre intellectuellement l’importance de rester investi, le comportement des investisseurs montre bien que dans la pratique, cela ne va pas de soi. Comme le montre le graphique 2, il existe une forte corrélation entre les performances de l’indice et les mouvements des investisseurs privés. Concrètement, en vendant au plus bas et en achetant au plus haut, les investisseurs sont passés à côté de certaines des plus belles phases haussières.

Graphique 2 : Mouvements de capitaux et performances de l’indice sur la dette émergente

Source: Aviva Investors, JP Morgan, as at 20 March 2020. Index returns based on JP Morgan EMBI Global Diversified Index USD. Past performance is not a guide to future returns

Se positionner pour profiter de la reprise économique

Lorsqu’on subit un recul de 18 %, chercher des signaux positifs équivaut à chercher une aiguille dans une botte de foin. Fin février 2020, les flux de capitaux investis dans la dette émergente atteignaient au total 11,2 milliards de dollars pour l’année. Au 26 mars, soit un peu plus de 4 semaines plus tard, les retraits sur cette classe d’actifs s’élevaient à plus de 40 milliards de dollars. Lorsque les flux sortants sont aussi importants et la liquidité aussi réduite, les ventes se font sans discernement, et sanctionnent aussi bien les pays et les entreprises en difficulté que ceux en bonne santé.

Ces grands mouvements de vente, décidés dans la panique, pourraient créer des opportunités pour ceux qui veulent et peuvent rester investis. Jusqu’à aujourd’hui, la majeure partie des ventes est le résultat d’une ruée vers la liquidité. Néanmoins, lorsque la panique initiale se dissipera et que les investisseurs commenceront à s’intéresser davantage aux fondamentaux, il est probable que nous voyons émerger des opportunités dans les pays les mieux placés pour résister à la baisse des prix des matières premières, des revenus du tourisme et aux chocs de croissance.

Pour les investisseurs qui sont restés investis, la période à venir risque d’être encore chaotique. Toutefois, pour ceux qui se sont retirés en espérant un nouveau point d’entrée, la tâche pourrait s’avérer difficile. À ce stade, la stratégie la plus prudente pourrait être de ne rien faire du tout. Comme le dit la maxime, « sur les marchés, tout est une question de durée, pas de timing ».

Annexe : Baisses enregistrées par la dette émergente libellée en devises fortes

La crise de la tequila : Une soudaine dévaluation du dévaluation, qui a provoqué la chute d’autres devises en Amérique latine.

La crise asiatique : Série de dévaluations monétaires et de chutes des marchés actions qui a commencé en Thaïlande et s’est étendue à de nombreux marchés asiatiques.

Défaut de la Russie : Effondrement des marchés action, obligataire et monétaire russes déclenché par la dévaluation du rouble russe.

Crise en Amérique latine : Défaut de paiement de la dette souveraine argentine libellée en USD et dépréciation des devises argentine, brésilienne et uruguayenne.

Crise financière mondiale : Crise économique mondiale déclenchée par des pertes sur le marché des prêts hypothécaires à risque (dits les subprimes) aux États-Unis, et qui s’est transformée en crise bancaire internationale.

Taper Tantrum : Pic des rendements obligataires américains et vente massive d’actifs risqués provoqués par l’annonce de la décision de la Réserve fédérale de mettre un terme à son programme d’assouplissement quantitatif.

COVID-19 : Ventes massives, au niveau mondial, d’actifs risqués provoquées par les craintes liées aux répercussions économiques de la pandémie de COVID-19.

Références

  1. Les chiffres des performances liées au COVID-19 sont basés sur la baisse maximale à ce jour. Note : La période de redressement à partir du point bas est le temps nécessaire à l’indice pour remonter du point le plus bas de la baisse au niveau précédant celle-ci. Voir l’annexe pour plus d’informations sur chaque période de baisse