La France n’est pas en faillite mais…

La France est-elle en faillite ? Techniquement, ce n’est pas le cas. Mais l’incapacité du pays à se réformer et à réduire ses dépenses depuis trois décennies ainsi que l’hostilité affichée de l’actuel président de la République face aux « riches » conduisent tout droit le pays vers des difficultés financières gigantesques.

Il peut paraître étonnant que ce soit un ministre socialiste, Michel Sapin, chargé du Travail, qui lance la polémique sur la faillite. En défendant la programme de réduction des déficits, il a voulu expliquer qu’il n’y avait pas d’autre choix car « l’Etat est totalement en faillite ».
 
Mais « faillite » est un mot qui fait peur, surtout quand la France accuse une dette de 1.800 milliards d’euros représentant 90% du Produit intérieur brut (PIB). Les investisseurs internationaux, qui détiennent 70% de cette dette, peuvent-ils continuer à prêter à un pays en faillite. Il est donc naturel que, sous la pression de l’Elysée et de Matignon, Michel Sapin soit revenu sur ses propos en prétendant avoir voulu ironiser sur les déclarations de l’ancien Premier ministre UMP François Fillon en …2007.
 
Reste que sur le fond, il a bien fait de tirer la sonnette d’alarme. François Hollande a hérité d’une situation financière délicate car son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, s’est beaucoup agité mais n’a pas engagé les réformes courageuses indispensables pour redresser le pays. Pire, il a multiplié les dépenses et les cadeaux, ce qui a fait exploser la dette de 600 milliards.
 
Le nouveau gouvernement socialiste doit donc s’atteler à des réformes dures et impopulaires afin de rassurer les investisseurs, qui prêtent à la France aujourd’hui à un taux d’environ 2% sur 10 ans. Rassurer suppose supprimer tout déficit public et montrer que l’on sait gérer les finances publiques. Mais les dirigeants français en sont incapables depuis 30 ans. 
 
L’objectif est donc plus modeste : le déficit ne doit pas dépasser 3% du PIB fin 2013. Toutefois, cela ne sera tenu que si la croissance économique atteint 0,8%. Or, personne à l’exception du gouvernement, n’y croit : le Fonds monétaire international (FMI) table sur 0,3% et les économistes évoquent une fourchette de -0,5% à 0. 
 
Si tout le monde a raison contre le gouvernement, cela veut dire qu’il faut trouver quelques milliards supplémentaires. Comment faire alors que la pression fiscale est au maximum ? Réduire les dépenses ? Le chef de l’Etat a annoncé sa volonté de les réduire de 60 milliards en cinq ans mais il n’a fourni aucune piste pour le moment et personne ne le croit.
 
Il est probable que le gouvernement augmentera de nouveau les impôts. L’imagination des experts du ministère des Finances est sans limite dans ce domaine.
 
Mais les conséquences seront lourdes : l’exode fiscal est d’ores et déjà significatif et prendra de l’ampleur. Surtout, plus personne ne peut envisager investir dans un pays qui pense avant tout à taxer au lieu de favoriser la création d’entreprises, donc de richesses et d’emplois. Les jeunes qui veulent créer leur entreprise pour s’enrichir n’ont aucune incitation à le faire en France car ils n’ont aucune visibilité sur ce que projette le gouvernement. Pis, ils prennent conscience que s’enrichir est particulièrement mal vu.
 
De ce point de vue, le débat sur la taxe de 75% imposée à ceux qui touchent plus d’un million d’euros de revenus par an est hallucinant. Les dirigeants de la majorité ont une approche uniquement moralisante de la question en jugeant quasi-immoral de gagner une telle somme. Au nom de quoi, le pouvoir politique peut-il juger du niveau de salaire dans une économie de marché ? Le fait que le président de la République persiste dans cette voie malgré une censure du Conseil constitutionnel n’est pas fait pour rassurer les investisseurs et les entrepreneurs.
 
Au lieu de perdre son énergie dans un tel débat, le gouvernement doit se fixer pour objectif prioritaire d’empêcher toute hausse du taux de chômage.  Car dans une dépendant à ce point de la consommation, toute dégradation ampute la croissance mécaniquement.
 
Lutter contre le chômage ne se résume pas à essayer d’empêcher des plans sociaux, à créer des emplois subventionnés ni même à assouplir le code du Travail même si c’est nécessaire. Lutter contre le chômage passe par un soutien résolu à la création et au développement d’entreprises. Et les incertitudes fiscales actuelles n’aident absolument pas.
 
Si le président de la République ne prend pas conscience que la France vit dans une économie ouverte et qu’il faut améliorer l’environnement pour les entrepreneurs, alors le chômage continuera d’augmenter, les « riches » tant honnis continueront de partir, les autres seront de plus en plus démotivés et la France pourrait bien être en faillite dans quelques années…