Les contraintes sur les conditions de crédit ne se relâchent que lentement

par Philippe Waechter, directeur de la recherche économique de Natixis Asset Management

L'enquête trimestrielle de la BCE fait ressortir que les banques continuent de durcir les conditions de crédit à la fin du deuxième trimestre mais sur un rythme plus modéré qu'au tournant de l'année 2008/2009.

Même si le mouvement a été moins accentué du côté des ménages, on relèvera que les profils de durcissement des conditions de crédit sont proches pour les deux types d'acteurs économiques – entreprises et ménages.

La distinction entre petites et moyennes entreprises d'un côté et grandes entreprises de l'autre n'est pas réellement discriminante. La distinction court terme / long terme ne l'est pas non plus. Dans la phase de durcissement rapide des contraintes, jusqu'à la fin 2008, ce distinguo était discriminant. Il ne l'est pas réellement dans la phase actuelle.

Du côté des ménages, le durcissement rapide des conditions s'est traduit par une différenciation entre immobilier (+dure) et crédits à la consommation. Dans la phase actuelle, le profil est du même type.

Les contraintes sont ainsi moins brutales qu'il y a un an mais elles ne sont cependant pas relâchées.

Analyse

Les facteurs générateurs du durcissement des conditions de crédit indiquent quasiment tous une situation toujours contraignante. On notera cependant que les contraintes plus directement liées aux conditions de marché sont moins prégnantes que dans les enquêtes précédentes. Ceci concerne davantage les entreprises que les ménages.

Concernant le comportement des banques, on constatera que la détente sur les conditions d'obtention des crédits est relativement lente. Elles sont moins restrictives mais restent contraignantes.

Cette enquête permet aussi de jauger le comportement des entreprises au travers de leur attitude sur le financement de leurs projets.

Le 3ème graphique montre que, de façon continue depuis le début de l'année 2008, les entreprises ne souhaitent de financement ni pour investir, ni pour faire des opérations d'acquisition. Le financement des stocks et du fonds de roulement indique une activité très médiocre et peu dynamique. Les entreprises privilégient à nouveau la restructuration de leur dette. Elles souhaitent disposer de marges de manœuvres financières plus importantes dans la phase de reprise quand celle-ci se manifestera.

On observe aussi sur le dernier graphique que les entreprises font jouer la concurrence entre banques dans leur financement, sollicitant très nettement les "autres banques".

Conclusion

Les banques s'attendent à une meilleure orientation de la demande de crédit que ce soit de la part des entreprises ou des ménages. Cependant, dans le même temps, elles continuent de resserrer les conditions d'attribution de crédit même si c'est à un rythme plus limité qu'il y a un an.

Les banques sont prises entre l'enclume et le marteau car au-delà des conditions liées à l'enquête, on constate une hausse sensible du cout du risque dans les comptes d'exploitation des banques, ce qui limite l'assouplissement rapide des conditions de crédit. La demande de crédits nouveaux est mieux orientée mais le stock de crédit passé est affecté par la situation économique médiocre. Ce décalage risque de peser sur la conjoncture au cours des prochains mois.