Mondialisation : être pragmatique

La campagne présidentielle française a donné lieu à un festival de slogans contre la mondialisation mais pour rétablir un certain équilibre dans le commerce international il faut éviter les simplifications et se focaliser sur des mesures concrètes.

Le dirigeant socialiste Arnaud Montebourg a popularisé la terme « démondialisation » l’année dernière. Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche (gauche extrême et Parti communiste), mène de tribune en tribune son combat contre la mondialisation.

Une fois l’élection passée, il serait bon que le président de la République, quel qu’il soit, et ses ministres prennent le temps de lire le rapport « En finir avec la mondialisation déloyale » remis au gouvernement par Yvon Jacob, ambassadeur de l'industrie, et Serge Guillon, contrôleur général économique et financier.

Il faut tout d’abord relever que le gouvernement actuel a pris ses distances avec le document. En ouverture, il est en effet indiqué que le rapport a été « commandé » par trois ministres (Industrie, Commerce extérieur et Affaires européennes). « Mais son contenu n’engage que ses deux auteurs », est-il indiqué en caractères gras.

En présentant le document à la presse, les auteurs ont déclaré que les entreprises européennes n’osaient pas parler de la Chine, atelier et marché de premier ordre. Il semblerait que les pouvoirs publics soient aussi timorés face à l’Empire du Milieu.

Si la mondialisation ne se résume pas à l’émergence de la Chine, il faut reconnaître que ce pays est extrêmement important pour la compréhension du phénomène de « mondialisation déloyale » : depuis son entrée dans l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les autorités Pékin a profité outrageusement de l’ouverture des marchés – sa balance commerciale le montre – mais a tout fait pour bloquer les produits et services venant de l’étranger, sauf quand elles ne pouvaient pas faire autrement.

Si la Chine avait respecté les règles, le débat sur la mondialisation n’aurait sans doute pas pris les proportions actuelles. Mais il est trop tard pour revenir en arrière. Il convient de aujourd’hui de régler de manière énergique certains problèmes flagrants.

Yvon Jacob et Serge Guillon ont fait un travail d’inventaire remarquable d’où il ressort qu’il faut agir de façon concrète et ciblant certains sujets.

Ils formulent 20 propositions qui doivent être mise en œuvre au niveau national, européen et international afin de lutter contre la concurrence déloyale.

Ils souhaitent notamment que l’Europe mène ce combat en mettant en place une « véritable surveillance du marché intérieur » et une amélioration de la politique de la concurrence. Ils soulèvent des questions simples : pourquoi les normes sont-elles imposées aux entreprises européennes et pas aux autres ? Pourquoi le marquage « CE » ne veut-il plus rien dire ? Des solutions simples existent.

En abandonnant les grands discours et en se montrant pragmatique, on peut commencer à faire évoluer les choses même s’il faudra sans doute secouer une bureaucratie de la Commission européenne. Mais ce combat est plus nécessaire que jamais si on veut que l’Europe garde son industrie et ses emplois.

Il serait donc bon qu’au lendemain du 6 mai, le président de la République, quel qu’il soit, s’empare de ce rapport. Car, il y a là des mesures concrètes relativement simples à mettre en place. Si aucun ne le fait, cela signifiera tout simplement que les discours de campagne sur la désindustrialisation et le nécessaire redressement de la France sont vides de sens.