Ne jamais ignorer le taux d’équipement

par Gérard Moulin, Responsable de la Gestion Actions Europe chez Amplégest

L’analyse du taux d’équipement d’un pays pour un secteur ou un produit déterminé, fait partie intégrante du process de gestion PRICING POWER. Ce critère, lorsqu’il est favorable, permet d’investir sereinement, même si la macro économie est mauvaise. Pour illustrer ce propos, prenons l’exemple de la Chine, au travers de différents secteurs qui ne vont pas ou peu dépendre de l’économie globale.

Les maisons de retraite : tout reste à faire en Chine dont le taux d’équipement en « lits » est notoirement insuffisant pour un pays qui comptera 300 millions de séniors en 2025. Aujourd’hui les lits publics sont réservés aux plus pauvres. La croissance potentielle pour le segment moyen haut de gamme est très élevée et assurée pour les vingt prochaines années. Ce métier, où les deux co-leaders européens sont français (ORPEA et KORIAN), offre d’énormes perspectives de développement en Chine. ORPEA va seulement ouvrir son premier établissement dans les prochaines semaines. Les alertes sur le ralentissement économique chinois ne sont pas pertinentes pour ce secteur ou le manque de lits se chiffre en millions.

Les ingrédients alimentaires : le secteur bénéficie progressivement de l’image « santé », qui lui permettra d’acquérir un PRICING POWER efficace. GLANBIA ET KERRY GROUP en Irlande, GIVAUDAN en Suisse ou SYMRISE en Allemagne ont bien compris cette évolution, et leurs investissements sur le «naturel» représentent aujourd’hui près de 50% du total. Ces sociétés européennes, ainsi que leurs concurrentes américaines, vont progressivement faire progresser le taux d’équipement du « naturel » en Chine, gommant là aussi pour ce secteur les craintes de chute de la croissance économique.

L’optique ophtalmique : ce secteur bénéficie en Chine d’une croissance potentielle importante car le taux d’équipement de la population est très faible (un dixième du taux d’équipent moyen en occident). De plus « l’éducation » des clients est insuffisante. Un dixième seulement des ventes mondiales de lunettes de soleil se font en Chine chaque année. Le secteur, encore très peu concentré, ne souffre pas du ralentissement conjoncturel.

Les équipementiers automobiles : La Chine est aujourd’hui le premier marché automobile, avec 37% des ventes dans le monde depuis le début de l’année. Pour autant le taux de détention de voitures de tourisme reste très faible, avec 90 véhicules pour 1000 habitants, contre 600 pour 1000 en Europe, et 800 pour 1000 aux USA. Nous sommes donc très loin d’un simple marché de remplacement en Chine. Les équipementiers, dont le PRICING POWER a été expliqué dans une lettre précédente, en profiteront en premier lieu.

Le secteur éolien : De la même façon que pour l’automobile, la Chine devient le premier marché mondial en termes d’installations annuelles d’éoliennes. Mais le taux d’équipement reste faible car la base de départ était quasi inexistante il y a 10 ans. La part de l’éolien dans l’électricité chinoise est aujourd’hui de 3%, contre 25% en Espagne, 30% au Danemark, ou encore 11% en Allemagne. Tout reste à faire et le marché ne risque pas la saturation.

La croissance chinoise est aujourd’hui l’une des grandes questions que se posent les investisseurs pour leur stratégie future. Mais beaucoup de secteurs dont le taux d’équipement est faible, ne dépendent pas de la macroéconomie générale. Une baisse de leur valeur sur l’argument économique sera une occasion d’achat.