Place à la BCE !

Chaque jour qui passe renforce les inquiétudes sur l’avenir de la zone euro, en raison de l’inconséquence des dirigeants politiques.

Chaque jour qui passe renforce les inquiétudes sur l’avenir de la zone euro, en raison de l’inconséquence des dirigeants politiques. Le seul moyen d’essayer de résoudre la crise est de donner les pleins pouvoirs à la Banque centrale européenne (BCE).

Les sommets des dirigeants européens comme les réunions du G7 ne parviennent pas à calmer les investisseurs, qui s’inquiètent du niveau élevé de la dette de plusieurs pays et aussi (surtout ?) de l’incapacité de l’Europe à se doter d’une gouvernance efficace.

Les marchés financiers font du yo-yo tous les jours en fonction des rumeurs plus ou moins malveillantes colportées par des media anglo-saxons.

Il est urgent de rétablir la confiance des investisseurs la zone euro a besoin d’eux dans cette période agitée : pratiquement tous les Etats sont sur-endettés et l’assainissement des finances publiques prendra de longues années, peut-être dix ans.

Aujourd’hui, les dirigeants politiques nationaux qui pouvaient prendre des initiatives – en particulier le président français Nicolas Sarkozy et la chancelière allemande Angela Merkel – n’ont plus aucun crédit. Les bureaucrates bruxellois – le président du Conseil européen Herman Van Rompuy et le président de la Commission Jose Manuel Barroso – n’ont ni les compétences ni l’envergure ni même la volonté de proposer des solutions.

Dans le champ de ruines qu’est la zone euro, la seule institution qui inspire encore le respect est la BCE. Si sa politique monétaire, dictée par son obsession de l’inflation est incomprise par de nombreux Européens, elle a cependant réussi à gagner la confiance des investisseurs internationaux, qui ont conféré à l’euro le statut de monnaie forte.

La BCE a commencé à intervenir ces derniers mois en achetant des obligations de certains pays dans le cadre du Securities Market Programme (SMP). Les montants sont importants (57 milliards d’euros en quatre semaines, soit un total de 143 milliards). Cette intervention massive explique sans doute le départ de l’économiste en chef de l’institution, l’Allemand Jurgen Stark, qui était hostile à ces opérations.

La BCE doit aller plus loin et mettre en œuvre un véritable plan d’assouplissement monétaire comparable à ce qu’a fait la Réserve fédérale américaine avec son Quantitative Easing. La BCE est en mesure de mobiliser plusieurs centaines de milliards d’euros, seul moyen de ramener le calme sur les marchés financiers.

Certains objecteront que c’est en principe la mission du Fonds européen de stabilité financière (FESF) mais celui-ci n’est pas encore opérationnel et son fonctionnement est plutôt lourd (il doit lui-même emprunter sur les marchés avant de prêter).

La BCE – qui, ne l’oublions pas, contrôle la planche à billets – est seule capable d’agir vite et fort. Elle dispose des moyens de son action et la crédibilité.

En intervenant massivement, elle augmentera massivement son bilan (comme ce fut le cas pour la Fed) mais elle dispose de tout le temps nécessaire pour gérer cette situation. Autre conséquence prévisible : une baisse de l’euro. Mais dans le contexte actuel, marqué par une croissance atone dans la zone euro, les entreprises apprécieraient cette dévaluation de fait qui redonnerait de la compétitivité à leurs produits sur le marché mondial. Après tout, c’est ce que les Américains ont fait depuis 2008.

Les gouvernements de la zone euro doivent donc donner à la BCE leur feu vert afin qu’elle puisse mettre en œuvre rapidement un plan crédible pour soulager les pays en difficulté tout en rassurant les investisseurs (voire en contrant la spéculation).

Mais cela n’exonère pas les dirigeants politiques de leurs responsabilités. Ils doivent réfléchir sérieusement à l’avenir de la zone euro. Celle-ci est avant tout une construction politique mais elle ne peut durer que si elle est renforcée. En clair, un fédéralisme économique est indispensable avec une autorité supranationale qui décide et impose car les promesses dont les hommes politiques sont friands (Pacte de stabilité hier, Règle d’or aujourd’hui) ne sont jamais tenues.

Cela suppose des abandons de souveraineté pour tout ce qui concerne la politique budgétaire et fiscale. C’est une vraie décision politique. Nos dirigeants y sont-ils prêts ?