Royaume-Uni : les comptes économiques du deuxième trimestre 2009

par Caroline Newhouse-Cohen, économiste chez BNP Paribas

Le PIB a reculé de 0,6% t/t au T2 2009, une nette décélération du rythme de contraction de l’économie, après -2,5% au T1 2009.

Les ménages ont stabilisé leurs dépenses nominales et ont continué d’allouer la hausse de leur revenu disponible à la reconstitution de leur épargne.

Les entreprises du secteur privé non financier ont continué de réduire leurs engagements, en dépit de la baisse de leur excédent brut d’exploitation.

Le déficit public s’est stabilisé au T2, à un niveau insoutenable à moyen terme.

Au deuxième trimestre, le PIB s’est replié de « seulement » 0,6% t/t, après – 2,5% t/t au trimestre précédent, le plus fort recul depuis septembre 1979. Au total et compte tenu des révisions annuelles opérées par l’Office national des Statistiques (ONS), la récession aura été plus profonde qu’anticipé. En glissement annuel, le PIB s’est effondré de 5,5%, une chute historique (les données sont disponibles depuis 1955). L’ensemble des composantes de la demande interne hors stocks ont contribué à ce repli, si ce n’est les dépenses du secteur public (+0,6% t/t). La consommation des ménages a diminué de 0,6%. Par ailleurs, les incertitudes économiques et les difficultés de financement ont continué à peser sur l’investissement des entreprises, qui a chuté de 5,2% après déjà 7,3% au T1 09. Le moindre recul des stocks au deuxième trimestre a contribué positivement à la croissance du PIB à hauteur de 0,3 point de pourcentage, après -0,4 pp le trimestre précédent. Enfin, le commerce extérieur a soutenu l’activité, en dépit de la baisse des exportations (-0,9%), le repli des importations lui étant supérieur (-2,2%), en ligne avec la faiblesse de la demande interne.

La production est restée quasiment inchangée dans le secteur manufacturier (-0,1% après -5,4% t/t au T1 09). Dans la construction, elle a reculé de 0,8% après -6,9% au trimestre précédent. Dans les services, la récession se fait encore particulièrement sentir dans les transports, l’entreposage et la communication (-1,7%).

Les ménages

Face à la détérioration des perspectives sur le marché du travail et aux difficultés économiques que traverse le Royaume-Uni, les ménages ont adopté une attitude prudente de désendettement et de reconstitution de leur épargne. Leur taux d’épargne s’est redressé de manière spectaculaire au deuxième trimestre, passant de 3,9% au T1 2009 à 5,6% au T2 2009. L’emploi a continué à se contracter à un rythme rapide au T2, bien que plus modéré que le trimestre précédent, avec un recul de 0,9% t/t après -1,0% au T1 2009, selon les résultats de l’enquête sur la population active. Toutefois, les salaires ont progressé au deuxième trimestre, grâce à la hausse des bonus distribués (+1,8% t/). Les rémunérations ont, par conséquent, enregistré une légère augmentation (+0,8%), compensée en partie par une baisse des prestations sociales (-995 millions de livres, soit -1,4% t/t).

Les revenus du capital ont également été orientés à la baisse au T2, bien que dans une moindre mesure qu’au trimestre précédent, (-3% après -17,2% au T1 2009), les entreprises réduisant le versement de dividendes. La chute de plus de moitié des intérêts perçus a, quant à elle, été entièrement compensée par celle des intérêts payés, particulièrement au titre des emprunts hypothécaires.

En revanche, les versements au titre des contrats d’assurance-vie ont nettement progressé (+12% t/t). Au total, le revenu disponible des ménages a crû de 1,6% (soit 0,9% en termes réels).

La situation financière des ménages s’est améliorée à la faveur du rebond des marchés actions (l’indice FT100 a progressé de 13% par rapport au trimestre précédent). Ainsi la valeur des actions et autres participations détenues en portefeuille a crû de 11%, alors que celle de l’ensemble des actifs détenus progressait de 3% t/t. Du côté du passif, les ménages ont réduit leur endettement à court terme de GBP 4,6 mds, alors que leur endettement à long terme augmentait de GBP 1,6 md. Le niveau particulièrement bas des taux d’intérêt hypothécaires explique probablement cette progression. Au total, l’endettement financier global a reculé pour atteindre 131% du revenu disponible brut. 

Au total, les ménages disposent d’actifs financiers significatifs, qui représentaient, en termes nets, 175% de leur revenu disponible au T2 2009.

Les entreprises

Le deuxième trimestre a préfiguré une sortie de crise prochaine pour les entreprises. Pour réduire leurs besoins en fonds propres, celles-ci ont continué à ajuster le niveau des stocks à la demande qui restait orientée à la baisse, tout en montrant certains signes de redressement, en particulier en Asie du Sud-Est. Au T2, la fin attendue du processus de déstockage s’est traduite par une moindre baisse des stocks qui a contribué positivement à la croissance du PIB à hauteur de 0,3 point de pourcentage, une contribution positive pour la première fois depuis le T1 2008. 

Toutefois, les incertitudes quant aux perspectives de la demande mondiale et le niveau toujours élevé des capacités excédentaires ont imposé la prudence aux entreprises. D’une part, elles ont conservé d’importants montants de cash. Leur ratio de liquidité (ensemble des disponibilités à vue rapporté à la dette à court terme), bien qu’en repli par rapport au trimestre précédent, était encore à plus de 87% au T2. D’autre part, leurs dépenses d’investissements ont diminué de 5,2% t/t au T2, après -7,3% au trimestre précédent.

La contraction de l’excédent brut d’exploitation des entreprises du secteur privé non financier s’est poursuivie au T2, tout en marquant le pas par rapport au trimestre précédent. Il a reculé de -1% t/t, après -8% au T1 2009. Leur capacité d’autofinancement a diminué de plus de 7%, après avoir fortement augmenté le trimestre précédent. Au total, la position créditrice nette des entreprises1 a légèrement baissé à GBP 14,4 mds, après 15,7 mds, un plus haut depuis plus de quatre ans.

Les ressources des entreprises ont été essentiellement utilisées pour réduire l’endettement. L’encours des emprunts a continué de baisser au deuxième trimestre, se contractant de près de GBP 45 mds, après déjà 43 mds le trimestre précédent. Le ratio de dette (dette à court et long terme rapportée à l’excédent brut d’exploitation) n’en demeure pas moins à un niveau particulièrement élevé, 475% au T2, en repli, toutefois, par rapport au T4 2008. Pour rappel, il était encore inférieur à 400% en 2006.

Par ailleurs, les actifs consolidés du secteur se sont également contractés d’environ GBP 30 mds. En particulier, les entreprises ont procédé à des rapatriements de fonds en provenance de leurs filiales à l’étranger. Les prêts liés à des investissements directs à l’étranger ont reculé de GBP 15,5 mds, après avoir déjà chuté de GBP 23 mds au cours du trimestre précédent.

Le secteur public

L’impact de la récession sur les dépenses et recettes publiques, conjugué au coût des mesures de relance budgétaire, a provoqué une grave détérioration des comptes de l’État dès le milieu de l’année dernière. Le déficit budgétaire dépassera 13% du PIB en 2009. Au T2, les besoins de financement net de l’administration centrale ont atteint GBP 34 mds (soit 10% du PIB), en léger recul par rapport au trimestre précédent. Il se situait à moins de GBP 15 mds au T2 2008. Les recettes de TVA se sont maintenues sur leurs niveaux du T1, après la baisse de 2,5 points, entrée en vigueur en décembre 2008, qui avait entraîné un repli de recettes d’environ GBP 2 mds. Par ailleurs, après avoir bondi de près de GBP 2 mds au T1, les prestations sociales versées par l’Etat ont à nouveau reculé au T2 (-1,5 md).

Reste du monde

Au T2, le déficit de la balance courante s’est nettement détérioré à GBP 11,44 mds ou 3,3% du PIB, principalement en raison de la forte baisse des revenus d’investissement. Ces derniers se montaient à seulement GBP 1,6 md au T2, contre une moyenne trimestrielle de 7 mds en 2008. Par ailleurs, la balance des biens et services s’est aussi détériorée mais dans une moindre mesure (-1,3 md), le déficit atteignant GBP 8,6 mds.

NOTES

  1. Les entreprises privées non financières sont créditrices nettes depuis 2002.

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