L’esprit d’entreprise

Au moment où la classe politique se déchire sur un projet de loi visant à réformer le code du travail, il semble que les Français, en particulier les jeunes, se projettent déjà dans un monde post-salariat où l’esprit d’entreprise est plébiscité pour essayer de redonner du sens à sa vie professionnelle.
 
Quand on voit les blocages fréquents dans ce pays, on peut se poser une question simple : existe-t-il un esprit d’entreprendre en France ? Selon un sondage Opinion Way pour la plateforme de création de sites Internet Weebly, 64% des Français le pensent même s’ils ne sont que 32% à estimer que c’est le bon moment pour créer une entreprise. Pour l’Allemagne les chiffres sont respectivement de 73% et 47%.
 
Cette étude montre que globalement 36% des Français sont attirés par le statut de salarié dans une PME et 30% par celui de salarié dans une grande entreprise, il faut noter que 18% souhaitent travailler en indépendant et 11% veulent créer son entreprise ou en diriger une.
 
Les jeunes de 18-24 ans sont moins attirés par le salariat quelle que soit la taille de l’entreprise (58% contre 66% pour l’ensemble de la population) et ne rêvent pas non plus travailler en indépendant (15%). Mais 25% d’entre eux veulent leur propre entreprise, comme créateur ou dirigeant.
 
Ces jeunes sont prêts à gagner moins d’argent pour réaliser cet objectif : 64% chez les 18-24 ans et 58% chez le 25-34 ans. A noter que si 14% des 18-24 ans en Allemagne souhaitent travailler en indépendant, seulement 11% sont intéressés par la création ou la direction d’entreprise.
 
Cette différence est sans doute liée à la façon dont les Français et les Allemands ressentent leur vie en entreprise. Globalement, on constate que les Français (56%) sont prêts à gagner moins d’argent en échange d’une activité professionnelle plus épanouissante contre 49% des Allemands. A l’inverse, 70% des Allemands ont déjà eu envie de réaliser un projet professionnel personnel contre 60% des Français.
 
Ce sondage confirme de précédentes enquêtes indiquant que les jeunes ont une vision plutôt négative du salariat en entreprise et qu’ils sont tentés par l’entreprenariat et qu’ils ont intégré les difficultés et même la possibilité d’un échec qu’ils relativisent contraire aux générations précédentes.
 
Si le monde politique est encore focalisé sur les vieux schémas – à gauche, on a une méfiance viscérale vis à vis de l’entreprise qu’on associe à l’argent, à droite on la défend tout en disant qu’elle ne peut pas se développer en France – les Français sont passés dans une nouvelle ère en mettant l’accent sur leur satisfaction personnelle, l’équilibre familial, leurs convictions. 
 
De ce point de vue, la création de leur entreprise est vue comme la solution naturelle. Serait-ce un retour aux sources ? Il faut rappeler que le mot « entrepreneur », si utilisé dans le monde anglo-saxon est Français, et que la France a vécu un foisonnement industriel à la fin du XIXème et au début du XXème siècle. Depuis, l’esprit d’entreprise semblait avoir déserté le pays.
 
La révolution Internet, à partir du milieu des années 1990, a favorisé l’éclosion de « start-uppeurs » mais c’est resté cantonné au secteur technologique. La France est une économie diversifiée et aider les jeunes à créer leur entreprise serait un pari gagnant pour la croissance économique et pour les créations d’emplois.