Boris Johnson doit relever des défis au Royaume-Uni comme à l’étranger

par David Zahn, Head of European Fixed Income chez Franklin Templeton

Boris Johnson a remporté sans surprise la course à la présidence du Parti conservateur britannique et, avec elle, le poste de Premier ministre.

Alors qu’il se prépare à former un gouvernement et à définir son programme politique au cours des prochaines semaines, Boris Johnson doit relever de nombreux défis et voit tous les regards braqués sur lui au Royaume-Uni comme à l’étranger.

Il entre au 10 Downing Street dans un contexte de tensions internationales accrues entre le Royaume-Uni et l’Europe concernant le Brexit, mais aussi au Moyen-Orient, où la relation du pays avec l’Iran s’est considérablement détériorée ces derniers jours. Toutes ces considérations auront sans doute des conséquences importantes pour les marchés.

Les marchés réagissent à la victoire de Boris Johnson

Les marchés ont déjà réagi à la victoire de Boris Johnson, et nous pensons que la volatilité actuelle va persister pendant plusieurs semaines alors qu’il forme son gouvernement.

Le taux du Gilt à 10 ans s’établit aux alentours de 70 points de base (pb), soit 0,70 %, ce qui reflète la baisse généralisée des taux dans le monde mais aussi le ralentissement de la croissance britannique. Un taux de 0,70 % sur le Gilt à 10 ans peut sembler médiocre aux investisseurs, mais nous pensons que ce chiffre pourrait tomber bien plus bas encore en cas de Brexit sans accord.

La livre a perdu du terrain face au dollar US et à l’euro, traduisant ici aussi les craintes d’un Brexit sans accord.

La faiblesse de la livre a suscité l’intérêt de certains investisseurs étrangers, qui trouvent la devise bon marché. Nous pensons donc que la chute éventuelle de la livre en cas de Brexit sans accord ne sera pas aussi forte que certains le pensent, ou qu’il pourrait s’agir d’une courte baisse suivie d’un rebond tout aussi rapide.

L’incertitude entourant le Brexit continue de peser sur la valorisation des créances d’entreprises britanniques. Cette situation va sans doute persister dans un avenir proche, jusqu’à ce que l’issue du Brexit soit connue.

Nous voyons dans ces valorisations peu élevées l’occasion de détenir des titres axés sur l’international (dont l’exposition au Royaume-Uni est minimale) ou des entreprises concentrées sur le marché intérieur britannique. Nous avons conscience que l’économie britannique ne va pas disparaître entièrement après le Brexit.

Le compte à rebours du Brexit continue

Pendant ce temps, l’heure tourne. Boris Johnson a moins de 100 jours pour trouver une solution au Brexit, un problème qui persiste malgré trois années de négociations entre le Royaume-Uni et l’Union Européenne.

Le Brexit sans accord sera l’une des positions de négociation de Boris Johnson, ce qui rend ce scénario nettement plus probable selon nous. Mais, de même que le Royaume-Uni se prépare à camper sur ses positions, l’Union Européenne pourrait elle aussi adopter une attitude plus ferme sous la nouvelle présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen.

L’Europe a la réputation de « prolonger et faire semblant de rien » pour reporter le problème à plus tard, mais elle pourrait forcer un Brexit sans accord en refusant tout simplement de prolonger à nouveau le délai.

Assurer l’unité du parti

Boris Johnson hérite d’un gouvernement très faiblement majoritaire, et il devra maintenir l’unité du Parti conservateur pour avoir une chance de survivre à son poste. Si une poignée de députés conservateurs venaient à lui refuser leur soutien, voire à changer de parti, il perdrait cette majorité et devrait probablement organiser de nouvelles élections législatives.

Nous nous attendons à une refonte en profondeur de son gouvernement. De nombreux responsables politiques conservateurs radicalement opposés au programme de Boris Johnson vont quitter l’équipe en place pour redevenir simples députés et pouvoir ainsi s’exprimer plus librement. En conséquence, on peut s’attendre à ce que le nouveau gouvernement soit dominé par les partisans du Brexit. Johnson ne peut pas former un gouvernement aussi diversifié que celui de Theresa May, car il ne peut pas se permettre de subir des vagues de démissions à chaque désaccord sur l’Europe. Les principes avancés par Boris Johnson lors de sa campagne pour la présidence du parti sont précisément les idées favorables aux entreprises et aux baisses d’impôts que l’on peut attendre d’un parti de centre droite.

Toutefois, au vu des autres problèmes à régler à court terme, nous nous attendons à une période d’incertitude extrême concernant la politique du gouvernement britannique.

Le gouvernement de Boris Johnson va travailler dur au mois d’août pour pouvoir soumettre un plan au parlement en septembre, après les vacances parlementaires. D’ici là, nous pensons que la volatilité restera la caractéristique majeure des marchés européens.