L’heure est venue de s’orienter vers les actions eurolandaises

par Franz Wenzel , stratégiste chez Axa IM

Les actions partagent au moins un point commun avec le dernier Championnat du Monde d’Athlétisme : ce ne sont pas les pays développés qui attirent le plus l’attention des médias. En ce qui concerne les actions, les marchés émergents ont gagné la médaille d’or cette année. Au stade, la Jamaïque et les deux fabuleux records du monde d’Usain Bolt ont remporté la victoire médiatique.

Faut-il donc se concentrer uniquement sur les meneurs de jeux et se joindre à la fanfare ou bien… ?

Depuis le début de l’année, la performance des actions de la zone euro a été globalement égale à celle de ses homologues internationaux. Nous estimons que l’heure est à présent venue d’accroître notre exposition aux régions plus cycliques comme l’Eurolande. Dans ce commentaire, nous expliquons pourquoi nous pensons que le temps du changement est venu ?

Une liquidité abondante pour soutenir les actions

En réponse à la plus sévère récession de l’histoire depuis la seconde guerre mondiale, les banques centrales à travers le monde ont tout fait pour combattre la dépression. Les marchés ont donc été abreuvés de liquidité, condition sine qua none à la performance des actifs risqués.

Historiquement, l’abondance de liquidité a toujours entraîné des valorisations plus élevées, les investisseurs commençant à anticiper un retour à la croissance des bénéfices.

Il faut reconnaître que cela est valable pour toutes les classes d’actifs risqués (matières premières, crédit et actions). Un excédent de liquidité est donc davantage un argument en faveur des classes d’actifs risqués plutôt que d’un biais défensif. Cet argument ne peut toutefois pas être écarté. En effet, alors que ces liquidités cherchent à être investies, les segments de marché les plus cycliques devraient davantage en bénéficier. A l’aube d’une reprise mondiale, la zone euro pourrait mieux performer (toutes choses étant égales par ailleurs).

La reprise justifie un bêta plus élevé

Le bon sens veut qu’une reprise conjoncturelle bénéficie généralement aux marchés les plus fortement exposés aux secteurs cycliques, leurs profits ayant tendance à évoluer plus vivement au rythme de l’économie.

Comparé aux autres régions en général, et aux Etats-Unis en particulier, l’Eurolande a un biais nettement cyclique. Il n’est donc pas surprenant que la zone ait commencé à montrer des signes relatifs de redressement par rapport au reste du monde.

Pourquoi la zone euro n’a-t-elle donc pas surperformé davantage depuis que la croissance du PIB au 2T a dépassé les estimations les plus optimistes ? Tout d’abord, n’oublions pas que la région est supposée avoir remportée la triste médaille d’argent de la contraction économique. Par conséquent, un rebond relativement fort de sa part est plus que probable. Ensuite, il nous semble évident que les investisseurs auront besoin de gagner en confiance sur la direction du marché avant de se confronter aux marchés à beta plus élevé. A l’évidence, les marchés émergents sont l’exception à la règle.

A l’avenir, nous pensons que la reprise va se poursuivre et qu’elle pourrait bien nous emmener jusqu’au début 2010 avant que les problèmes encore latents – poids de la dette, fin du programme de relance, reliquat des actifs toxiques dans les bilans bancaire, pour n’en nommer que quelques uns – ne viennent contrecarrer l’amélioration actuelle. Les indicateurs avancés devraient continuer à progresser, en ligne avec notre scénario pro cyclique au niveau régional.

Forte remontée des bénéfices attendue

Malgré un environnement économique encore fragile, les bénéfices du 2T ont largement dépassés les attentes, d’où l’espoir croissant de voir un rebond substantiel des bénéfices, l’année prochaine. Pour l’heure, les prévisions de croissance des bénéfices 2010 en Europe se situent aux alentours de 23%, ce qui nous semble globalement cohérent.

Une contribution substantielle viendra sans doute d’une expansion des marges. En effet, pour autant que l’on sache, la réaction des capitaines d’industrie à la sévère crise économique a été de réduire drastiquement les coûts. En fait, notre outil de mesure favori des variations de marge des entreprises (prévisions de production et d’emploi) implique clairement un rebond substantiel (illustré par le rapport EBITDA/ventes) de l’ordre de 5 points. Même si cette prévision nous paraît quelque peu exagérée, la hausse des marges (EBITDA/ventes) ne fait pas de doute. Historiquement une variation des marges d’1 point se traduit par une évolution des bénéfices pouvant aller jusqu’à près de 5%. D’où notre conviction, qu’à moins d’une rechute économique, les bénéfices européens pourraient facilement grimper de 20 à 25% l’année prochaine.

Valorisations : l’Eurolande est la plus attrayante

En dépit du rebond impressionnant depuis la mi-mars, les actions restent en général correctement valorisées, voire attrayante. Et ce quelque soit l’outil de mesure retenu, qu’il s’agisse du rapport cours/actif net (actuellement de 1,8 fois l’actif net, contre 1,3 fois en mars) ou du rapport cours/bénéfices à 12 mois (à 13,5 fois aujourd’hui après avoir été inférieur à 10 en mars), ou bien encore de la prime de risque.

Comparé au MSCI Monde, l’Europe se négocie clairement avec une décote, qui s’est pour le moins accrue ces derniers mois. C’est d’autant plus vrai compte tenu du rattrapage substantiel dû aux perspectives de bénéfices. L’exemple est encore plus flagrant pour le C/B qui a atteint ses plus bas de 2002,2003.

Conclusions

Les conditions actuelles sont favorables à l’ajout de beta dans les portefeuilles d’actions : La liquidité est toujours abondante et les banques centrales devraient rester accommodantes dans un futur proche. A l’évidence, cet élément est favorable aux actifs risqués en général, mais ceux des zones à sensibilité fortement cycliques, comme les actions eurolandaises, devraient davantage en bénéficier.

En réponse à la sévère récession, les entreprises ont fortement réduits leurs coûts pour restaurer leur rentabilité. Cela devrait contribuer au redressement des bénéfices en 2010 (autour de +20%).

Les valorisations sont en général restées d’un grand soutien. L’attrait relatif des actions eurolandaises s’est accru néanmoins, en raison de la révision substantielle des prévisions de bénéfices pour 2010.