Pas de hausse des taux directeurs de la Fed et de la BCE avant 2011

par Eric Vergnaud, économiste chez BNP Paribas

La semaine sera européenne avec de très nombreuses publications relatives à novembre, comme les estimations flash des indices PMI et l’enquête mensuelle de la Commission européenne auprès des ménages et des entreprises, auxquelles se joindront, aux niveaux nationaux, l’enquête de l’Institut IFO en Allemagne et la confiance des ménages et des entreprises tirée des enquêtes de l’INSEE en France. L’ensemble des indices devraient confirmer tant la réalité de la reprise que son caractère très progressif.

En particulier, la consommation des ménages subit l’effet de la détérioration du marché de l’emploi, auquel va s’ajouter la remontée de l’inflation au cours des prochains mois. Ainsi, alors que la consommation privée a stagné en France au troisième trimestre, elle devrait avoir reculé en Allemagne (détail du PIB publié mardi 24 novembre), après une progression de plus de 0,6% t/t en moyenne au premier semestre. Plus généralement, dans l’ensemble de la zone euro, la confiance des ménages n’est pas suffisamment élevée pour nourrir une reprise marquée et durable de la consommation. Cela devrait limiter le redressement de l’activité. Ainsi, après un recul de près de 4% en 2009, le PIB devrait progresser de 1% à 1,5% en 2010.

Il en va de même aux Etats-Unis, où la confiance des ménages a reculé de manière sensible au cours de la période récente. Ainsi, l’indice du Conference Board est revenu en octobre (47,7) à un niveau inférieur à celui affiché en mai dernier, et devrait avoir encore reculé en novembre. La tendance des destructions d’emplois s’est modérée de façon notable depuis le début de l’année, les prix immobiliers ont commencé de se stabiliser et les marchés d’actions (certes toujours très volatils) ont nettement rebondi depuis leurs points bas. Toutefois, la perception de cette amélioration est brouillée par la hausse du taux de chômage, qui a atteint 10,2% en octobre. Une estimation moins favorable en matière de consommation privée devrait d’ailleurs contribuer à la révision en baisse du PIB du troisième trimestre. Sa progression pourrait être ramenée à 2,7% t/t annualisé, contre 3,5% en première estimation. La consommation des ménages devrait d’ailleurs s’inscrire sur un rythme de croissance plus faible que celui du PIB au cours des prochains trimestres. L’activité pourrait ainsi progresser de plus de 2% en 2010 (après -2,5% en 2009), la hausse de la consommation des ménages n’étant supérieur que de peu à 1,5%. Par ailleurs, le marché immobilier, tout en ayant dépassé son point bas, demeure fragile, encore très dépendant des différentes mesures de soutien au secteur. Ainsi, les mises en chantier et les permis de construire ont baissé de respectivement 10,6% m/m et 4% en octobre, alors que l’incertitude prévalait quant à la prolongation ou non du crédit d’impôt en faveur des primo accédants. Ce dispositif sera finalement maintenu jusqu’en avril 2010, ce qui devrait permettre une meilleure orientation de l’activité de construction au cours des prochains mois.

Les Banques centrales vont conserver encore quelques trimestres une politique monétaire très accommodante, sauf redressement marqué de l’inflation, évènement très peu probable. A cet égard, les Minutes du FOMC des 22 et 23 septembre derniers, publiée le 25 novembre, permettront certainement de mieux cerner les intentions de la Réserve Fédérale. Certes, le taux d’inflation est remonté de -1,3% à -0,2% en octobre.

Toutefois, l’inflation sous-jacente devrait se modérer au cours des prochains trimestres, compte tenu de la décélération des salaires et d’un moindre pricing power des entreprises. Elle s’afficherait à 1,2% en 2010, contre 1,7% en 2009. Dans la zone euro, l’évolution devrait être similaire, l’IPC sous-jacent augmentant d’un peu plus d’un demi point l’année prochaine, après une hausse de près de 1,5% cette année. De part et d’autre de l’Atlantique, un repli supplémentaire de l’inflation sous-jacente est même probable en 2011. Tant aux Etats-Unis que dans la zone euro, les risques de déflation sont loin d’avoir disparu, ce qui constitue une grande différence avec la plupart des pays émergents.

Dans ces conditions, si la Fed et la BCE vont progressivement sortir des politiques quantitatives et non conventionnelles au cours de l’année prochaine, les deux Banques centrales pourraient ne pas relever leurs taux d’intérêt directeurs avant la deuxième moitié de 2011.

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