Paradis fiscaux et réglementaires : la fin des « trous noirs » de la mondialisation ?

par Olivier Ferrand, président de Terra Nova

Les paradis fiscaux ont fait une entrée fracassante dans le débat médiatique : ces ‘trous noirs’ de la finance sont au cœur de fraudes qui ont éclaté récemment et leur rôle dans la crise financière est régulièrement souligné. A l’occasion du G20 à Londres, il convient de s’interroger sur les paradis fiscaux, leur impact sur la finance mondiale, l’état des négociations actuelles et les marges de manœuvre, notamment nationales, qui existent.

Le rôle historique des paradis fiscaux est la défiscalisation : pour les entreprises (filiales dont les recettes sont exonérées) ou les personnes physiques (patrimoines de personnes aisées qui fructifient « à l’abri »). Cette évasion fiscale massive représente un manque à gagner considérable pour les finances publiques des Etats.

Cependant les paradis fiscaux sont aussi des « paradis réglementaires », qui hébergent la majorité des activités à risque des acteurs financiers de la planète. Ceci constitue un problème majeur de stabilité du système financier international : la non-réglementation des activités des acteurs spéculatifs dans les paradis fiscaux est une des causes de la gravité de la crise actuelle.

Les « listes noires » établies par l’OCDE n’ont pas eu l’effet escompté, et même si certains paradis fiscaux consentent à plus d’efforts, ce processus ne semble pas devoir arriver à son terme, notamment en raison d’intérêts nationaux toujours prédominants.

Des mesures de rétorsion sont donc nécessaires pour lutter efficacement contre les paradis fiscaux. A cet égard, la France se signale par l’absence de projet d’envergure en dépit d’une posture en apparence volontariste. Quelques mesures, comme l’alourdissement de la taxation des flux ou l’interdiction faite aux établissements financiers de détenir une filiale dans les paradis fiscaux pourraient cependant être envisagées. Si ces mesures doivent être coordonnées au niveau européen ou même international pour être pleinement efficaces, la difficulté des négociations à mener ne doit pas justifier l’inaction.

De l’affaire du Liechtenstein1 au déclenchement de la crise financière internationale, en passant par l’affaire UBS, les paradis fiscaux ont refait depuis le début de l’année 2008 une entrée fracassante dans le débat médiatique.

Les paradis fiscaux ne font pas l’objet d’une définition universellement agréée2. Ils recouvrent en réalité trois enjeux distincts qui en font les « trous noirs » de la mondialisation :

  • Couverts par le secret bancaire, certains paradis fiscaux servent de base financière à des opérations criminelles, comme le blanchiment d’argent ou le financement du terrorisme. Cet enjeu est déjà traité, avec plus ou moins d’efficacité, par le Groupe d’action financière internationale sur le blanchiment de capitaux (GAFI), qui assure la coordination intergouvernementale pour lutter contre les « pays ou territoires non coopératifs » en matière de blanchiment.
  • Comme leur nom l’indique, ils sont utilisés par les entreprises et les particuliers pour des opérations d’évasion et de fraude fiscales.
  • Ils constituent également, pour la plupart, des « paradis réglementaires » : la régulation des activités économiques, notamment financières, y est faible ou inexistante. Les paradis fiscaux constituent ainsi pour la plupart des centres offshore3, permettant aux acteurs de la finance de mener des activités dérégulées. Ils hébergent ainsi les deux tiers des hedge funds existants, 4.000 banques, et 2.5 millions de sociétés financières (trusts, fiducies…), soit au total 11 000 milliards de dollars d’actifs (soit cinq fois le PNB de la France)4.

C’est à ce dernier titre que les paradis fiscaux sont au cœur de la crise financière, et qu’ils constituent aujourd’hui un des piliers de la mondialisation, que seule une refondation systémique du capitalisme financier sera de nature à ébranler.

1 – LES PARADIS FISCAUX AU CŒUR DE LA MONDIALISATION FINANCIERE

1.1 – UNE VASTE INDUSTRIE FINANCIERE DE GESTION PATRIMONIALE DEFISCALISEE

Le sujet des paradis fiscaux va bien au-delà des questions de blanchiment et corruption auxquelles ils sont traditionnellement reliés – qui, si elles représentent à l’évidence un des enjeux essentiels de la lutte contre ces juridictions non coopératives, ne montrent pas à quel point le rôle des paradis fiscaux dans la vie financière internationale s’est banalisé.

Le rôle historique des paradis fiscaux, c’est la défiscalisation.

Pour payer moins d’impôts sur les profits, les entreprises pratiquent différentes techniques de fraude et d’évasion fiscales qui faussent toute concurrence sur le marché mondial. Elles se servent d’abord des paradis fiscaux pour y établir des filiales auxquelles elles transfèrent des recettes pour les soustraire à la fiscalité nationale. Une récente étude d’Alternatives Economiques (Chavagneux, Rinuy, 2009) a ainsi montré que toutes les entreprises du CAC 40 étaient d’une manière ou d’une autre présentes dans les paradis fiscaux.

Pour de grands producteurs pharmaceutiques ou de nouvelles technologies, la technique de « l’octroi de licence » permet ainsi de transférer des droits de propriété intellectuelle (brevet, droit d’auteur) d’une société holding vers une filiale enregistrée dans un paradis fiscal : les revenus correspondants versés au concédant sont ainsi exempts d’impôts, tandis que la base imposable de la société concessionnaire se retrouve fortement réduite.

Enfin, la sous-capitalisation constitue un autre schéma de fraude ou d’évasion fiscale classique via les paradis fiscaux. Elle consiste pour une entreprise à fournir volontairement peu de capitaux à ses filiales installées dans des pays lourdement taxés pour les financer par des prêts, afin de pouvoir déduire les intérêts payés des bénéfices imposables et les localiser dans des filiales situées dans des paradis fiscaux

Au-delà de la fraude fiscale, la législation relative au secret bancaire (qui empêche le fisc d’avoir accès aux registres des banques) ou la présence d’entités intermédiaires telles que les trusts ou les fondations (qui interdisent l’accès de l’administration fiscale au bénéficiaire effectif des revenus taxables) font des paradis fiscaux des places particulièrement attractives pour les industries financières de gestion patrimoniale.

Les banques peuvent ainsi faire fructifier discrètement et à moindre coût fiscal le patrimoine des personnes aisées, gérer les salaires des cadres à haut revenu en-dehors du regard du fisc et accompagner les stratégies internationales des multinationales présentes sur place. 467 entreprises françaises, appartenant aux groupes BNP Paribas, Crédit agricole, Société générale, Banques populaires, Dexia et à la Banque postale seraient ainsi présentes dans des paradis fiscaux (cf. article précité). Pour les grandes fortunes, il est fréquent de se domicilier dans ces territoires attractifs, ou d’enregistrer une société dans un paradis fiscal qui recevra les super-salaires ou les royalties à protéger et fera échapper aux droits de succession ou autre pension alimentaire. Que l’on considère l’actif (prêts et détention d’actions ou d’obligations) ou le passif (dépôts et émission d’actions et obligations), les paradis représentent ainsi environ la moitié des activités internationales des banques en matière de finance patrimoniale (Chavagneux, Palan, 2006).

Les manques à gagner pour les finances publiques des Etats sont massifs. On estime par exemple qu’il s’élève à 100 milliards de dollars pour les Etats-Unis.

1.2 – LE CŒUR DES ACTIVITES FINANCIERES SPECULATIVES MONDIALES

Au-delà de leur rôle de défiscalisation, les paradis fiscaux sont également des « paradis réglementaires ».

Ils hébergent à ce titre les plus grands centres off shore de la planète, qui peuvent y mener des opérations déréglementées. A cet égard, ils sont devenus le cœur du capitalisme financier.

Tous les acteurs financiers de la planète y logent leurs activités à risque. On y retrouve la plupart des hedge funds ainsi que les filiales spéculatives des banques et des assurances.

C’est ce qui explique que, selon des données récentes, la moitié du stock des investissements directs à l’étranger américains et 37 % de celui des firmes françaises et européennes transitent par les paradis fiscaux. Les investissements américains sont ainsi plus importants vers les Bermudes que vers la Chine !

Certes, la crise financière internationale n’a pas été transmise principalement par les activités spéculatives : les « actifs toxiques » issus des subprimes étaient en effet des produits côtés AAA, donc sans risques, montés par des banques d’affaires traditionnelles et vendus à des banques de dépôts, type banques de réseaux des Länder allemands.

Certes, également, les acteurs spéculatifs jouent un rôle utile dans l’économie. Pour qu’un acteur économique puisse se protéger d’un risque, il faut bien qu’un autre acteur accepte de le prendre.

Il n’empêche, l’absence de toute supervision de ces « trous noirs » de la finance internationale constitue un problème majeur de stabilité du système financier international, comme l’avait démontré la faillite de LTCM il y a quelques années. Le rôle d’amplification de la crise actuelle par les acteurs spéculatifs est également avéré : le dénouement de leurs positions en pleine chute des marchés financiers a entraîné pour eux des pertes massives, et donc la nécessité de vendre leurs actifs pour survivre, entraînant l’effondrement durable des marchés financiers.

2 – LES NEGOCIATIONS INTERNATIONALES CONTRE LES PARADIS FISCAUX : ETAT DES LIEUX

L’annonce d’une nouvelle liste noire de l’OCDE dans le cadre du G20 a d’ores et déjà permis d’engranger un certain nombre d’avancées en matière d’échanges de renseignements.

L’établissement d’une liste internationalement agréée de paradis fiscaux constitue un instrument incitatif efficace dans un monde financier essentiellement basé sur la confiance.

Dès 2000, en amont de toute mesure répressive coordonnée, l’OCDE a ainsi établi une liste sur la base des deux critères de l’opacité et de l’absence de renseignements. Sans compter les six Etats qui ont immédiatement pris l’engagement d’améliorer leurs pratiques fiscales, elle comprenait dans sa première mouture 35 juridictions auxquelles il était demandé de prendre un engagement formel de mettre en œuvre les standards de l’OCDE5.

Cette méthode a partiellement rempli ses objectifs, puisqu’un certain nombre de juridictions, à l’instar de Chypre ou de Malte, ont consenti des avancées.

Mais la liste a rapidement perdu toute représentativité, pour ne plus compter aujourd’hui qu’Andorre, le Liechtenstein et Monaco.

Surtout, de nombreux Etats qui en avaient été retirés sur le seul fondement de leurs engagements, ne les ont tout simplement jamais honorés (cf. Panama), et des centres financiers significatifs comme Singapour n’ont jamais été évalués.

Aujourd’hui, lorsqu’à la faveur des récents scandales bancaires et de la crise financière internationale et à la suite de la déclaration du G20 de Washington6, les ministres des finances du G 20 s’accordent sur la nécessité de disposer d’une liste identifiée de juridictions non coopératives et d’une boîte de sanctions, c’est à la nouvelle méthodologie récemment proposée par l’OCDE qu’ils font référence.

Beaucoup plus représentative, la nouvelle liste se fonderait sur l’identification de 84 pays qui ne respectent pas de façon substantielle les standards de l’OCDE. Ils pourraient être sortis de la liste noire en signant au moins 12 accords bilatéraux permettant un échange de renseignement effectif (ce qui constitue de facto une levée du secret bancaire).

Dans la perspective du G 20 du 2 avril, une dizaine de pays potentiellement concernés, soit au sein de l’Union européenne (Autriche, Belgique, Luxembourg, San Marin), soit au sein de l’OCDE (Suisse), soit parmi les centres financiers significatifs asiatiques (Hong-Kong, Singapour, Macao), soit encore faisant partie de la dernière liste noire de l’OCDE (Andorre, Liechtenstein, Monaco), ont ainsi annoncé publiquement leur engagement à respecter les standards de l’OCDE. Pour franchir le seuil des douze accords et éviter d’être stigmatisés, quelques centres comme l’Ile de Man, Jersey, Guernesey, se pressent par ailleurs de conclure avec les principaux Etats membres de l’Union européenne des accords d’échanges de renseignements.

Le consensus sur la liste des juridictions concernées se heurte toutefois aux intérêts nationaux des acteurs en présence

Porté par une conjoncture exceptionnelle, le processus entamé à la faveur du G 20 pourrait pourtant ne pas arriver à son terme si un certain nombre d’hypothèques ne sont pas levées.

Tout d’abord, la position des grands acteurs en présence n’est pas clarifiée. C’est le cas de l’administration américaine, qui n’a pas donné de signaux univoques sur la question des paradis fiscaux – en dépit du volontarisme affiché dont faisait preuve Barack Obama en tant que Sénateur7. L’Union européenne, surtout, lestée du poids de ses trois Etats membres pratiquant le secret bancaire (Luxembourg, Autriche et Belgique), voit la force de son message politique considérablement affaiblie. 

Le récent recul de Nicolas Sarkozy, lors de sa conférence de presse au Conseil européen, qui a admis qu’aucun Etat européen, donc pas même ceux qui maintiennent encore aujourd’hui le secret bancaire, ne ferait partie de la liste, en est une première preuve.

La timidité des discussions relatives à la révision, d’une part de la directive épargne, dont le texte ne prévoit ni l’inopposabilité du secret bancaire, ni le contournement des trusts et des fondations, d’autre part de la directive assistance mutuelle, qui reste en-deçà des standards de l’OCDE, en est une autre.

Il est ainsi probable qu’un pays comme le Luxembourg échappe à la liste noire en se contentant de lever son secret bancaire pour les seules décisions de justice, ce qui limiterait la levée à des cas rares et extrêmes, alors qu’il continuerait de refuser toute coopération administrative avec les fiscs nationaux.

Plus fondamentalement, du fait de leur importance dans les activités internationales des grandes banques ou dans leur lien politique étroit avec certains membres du G 20, les paradis fiscaux font l’objet d’un traitement parfois ambigu et hypocrite. L’attitude du Royaume-Uni est significative à cet égard, qui pour détourner l’attention de la question des trusts, au cœur de sa stratégie financière, se place à la pointe du combat contre le secret bancaire. Les positionnements politiques ne peuvent ainsi s’apprécier sans considérer le lien qu’entretiennent les grandes places financières avec certains paradis, telles que la City avec les Iles anglo-normandes, New-York avec les Iles Caïman, ou encore l’ensemble des places européennes avec le Luxembourg. De la même façon, au motif officiel que la convention bilatérale qui nous lie avec Monaco est satisfaisante, le gouvernement français privilégie le statu quo avec la Principauté pourtant universellement reconnue comme un paradis fiscal.

3 – LES MESURES NATIONALES A PRENDRE : UNE QUESTION DE VOLONTARISME POLITIQUE

La liste noire de l’OCDE ne permettra en tout état de cause que d’identifier les paradis fiscaux. Elle crée une pression politique internationale pour qu’ils se réforment mais elle n’a pas de portée juridique. Les mesures de rétorsion doivent être prises au niveau national, ou européen.

3.1 – PORTER UN COUP A L’ATTRACTIVITE FISCALE DES PARADIS FISCAUX

Les difficultés de l’action multilatérale, pas plus que les aléas de la négociation de traités bilatéraux, ne doivent conduire à renoncer à la mise en œuvre de mesures de rétorsion au niveau interne. Or à cet égard, alors que, à l’instar de l’Allemagne ou de l’Espagne, la plupart des gouvernements européens s’apprêtent à renforcer leur arsenal juridique de mesures de lutte contre la fraude et l’évasion fiscale8, la France se signale par l’absence de projet d’envergure.

Sur le fondement d’une liste interne de paradis fiscaux, élaborée à partir de critères propres (tels que ceux, proches de ceux qui existent déjà dans notre législation, de la faiblesse du niveau d’imposition et de l’absence d’échange effectif de renseignements), un certain nombre de mesures pourraient pourtant être prises pour priver les paradis fiscaux d’une partie de leur attrait.

  • Alourdir la taxation des flux en provenance et à destination des paradis fiscaux. Il s’agirait, d’une part d’augmenter l’imposition des flux à destination des paradis fiscaux, d’autre part d’exclure le bénéfice de certaines dispositions fiscales favorables en cas de transaction avec un paradis fiscal (par exemple, en refusant systématiquement l’exonération des dividendes distribués à des sociétés françaises par leurs filiales sises dans des paradis fiscaux, ou celle des intérêts versés par des débiteurs français à des bénéficiaires situés dans des paradis fiscaux).
  • Renforcer la législation anti-abus concernant les sociétés étrangères situées dans les paradis fiscaux.

On pourrait par exemple poser un principe de non-déductibilité systématique des sommes versées aux personnes morales ou physiques établies dans un paradis fiscal, instaurer une présomption anormale de bénéfices en cas de transfert de fonctions d’une entreprise vers un pays à fiscalité privilégiée ou encore une présomption de résidence fiscale en France des ressortissants ayant transféré leur domicile dans les paradis fiscaux (dans ces derniers cas, ce serait aux contribuables d’apporter la preuve de la réalité de ces transferts). – Elaborer des dispositions pénales ad hoc pour les cas de fraude mettant en jeu des paradis fiscaux.

D’une manière générale, les condamnations pénales pourraient être aggravées en présence de fraude fiscale due à l’utilisation de paradis fiscaux. Une amende pourrait aussi être prévue en cas d’absence de coopération renforcée du contribuable présumé avoir un lien avec un paradis fiscal.

  • Ouvrir nos procédures fiscales à une plus grande variété de contrôles. Le contrôle des personnes physiques à hauts revenus pourrait par exemple être renforcé par une obligation de documentation, sur un délai donné, des revenus et dépenses.
  • Engager la responsabilité des conseils et des comptables. Cette responsabilité pourrait être par exemple être engagée par la mise en place d’un régime d’autorisation des régimes d’optimisation fiscale, l’interdiction de breveter les montages d’évasion fiscale ou encore le renforcement des pénalités applicables aux promoteurs de montages fiscaux mettant en cause des paradis fiscaux.

3.2 – PESER SUR LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS PRESENTS DANS LES PARADIS FISCAUX

On l’a vu, les paradis fiscaux sont au cœur de la crise financière parce qu’ils sont devenus des centres off shore, hébergeant les activités à risque de la planète finance. C’est l’enjeu principal. Les éléments fiscaux des paradis fiscaux sont certes importants, notamment pour reconstituer les recettes budgétaires des Etats de l’OCDE, soumis à très fortes tensions du fait des plans de relance. Mais ils ne se rapportent pas directement à la crise, qui est davantage liée aux aspects de « paradis réglementaires » de ces territoires.

Une action radicale est nécessaire pour contrecarrer les territoires qui refusent de se soumettre à la régulation financière internationale.

Cette action radicale est simple : interdire aux banques de posséder des filiales ou des succursales dans les paradis fiscaux. Une telle mesure phare, qui a fait l’objet d’un amendement parlementaire, est proposée par le texte espagnol en cours de discussion. Une autre formule possible est l’interdiction de toute relation financière, directe ou indirecte, avec un établissement financier dans un paradis fiscal.

Ces mesures auront d’autant plus de sens qu’elles seront coordonnées au niveau européen, voire international. A cet égard, la négociation des directives épargne et assistance mutuelle au niveau européen, tout comme la mise en œuvre de sanctions coordonnées au niveau multilatéral, doit être instamment promue. Pour autant, les difficultés à aboutir à un résultat dans ce domaine ne doivent pas justifier l’absence d’une action

NOTES
(1) Cette affaire de fraude, qui a éclaté en février 2008, a impliqué des milliers de contribuables, notamment allemands et français, possédant des comptes au Liechtenstein. Une nouvelle affaire a éclaté fin mars 2009 mettant en cause plusieurs grandes sociétés françaises, dont les noms viennent d’être révélés dans la presse : Total, Adidas, Michelin.
(2) L’OCDE les définissait traditionnellement à partir de quatre critères non cumulatifs : (i) une fiscalité faible ou nulle, (ii) une absence de transparence des législations fiscales, (iii) une absence d’activités économiques substantielles, (iv) l’absence de possibilité d’échange de renseignements. De manière plus générique, ce sont des pays engageant des politiques délibérées visant à attirer des activités internationales par la minimisation des impôts, la garantie de la confidentialité et la réduction de toute autre forme de restriction sur les opérations des entreprises.
(3) Selon le FMI, les centres offshore recoupent les caractéristiques suivantes : (i) ce sont des juridictions dans lesquelles opèrent un grand nombre d’établissements financiers dont l’activité principale est menée avec des non résidents, (ii) des systèmes financiers présentant des encours de créances et engagements extérieurs sans proportion avec les besoins d’intermédiation financière de l’économie intérieure, (iii) des centres permettant de bénéficier de tout ou partie des avantages fiscaux propres aux « paradis ». Pour le Forum de Stabilité financière (FSF), créé par le G7 en 1999 pour renforcer la surveillance et la coordination des organismes du secteur financier, les centres financiers offshore sont des « juridictions attirant un niveau élevé d’activité de la part de non-résidents ».
(4)Selon les chiffres de Transparency France.
(5) Les standards de l’OCDE en matière d’échange d’informations sont inscrits à l’article 26 du modèle de convention tel que révisé en 2005, qui stipule que les Etats signataires ne peuvent plus refuser d’échanger des informations de nature fiscale en subordonnant la délivrance de l’information à l’existence d’un intérêt pour l’application de leur propre législation fiscale ou en opposant le secret bancaire.
(6)En novembre 2008, les Etats membres du G20 ont appelé au respect des standards internationaux en matière d’échanges d’information.
(7)Sous la précédente administration, le Sénateur Obama avait été l’un des initiateurs d’une proposition de loi sur la lutte contre les paradis fiscaux, aujourd’hui reprise sous une forme similaire par le Sénateur Carl Levin.
(8) Aux Etats-Unis, les propositions du Trésor sont encore attendues mais deux textes ont été rendus publics : le projet du Sénateur Levin, Stop Tax Haven Abuse Act, qui dresse notamment une liste officielle des pays dont la législation « restreint déraisonnablement l’échange d’informations », et l’avant-projet du Sénateur Baucus, Président de la Commission des Finances du Sénat.

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