par Lukas Daalder, stratégiste chez Robeco
Si le mois dernier nous nous étonnions que les marchés financiers ne portent que relativement peu d'attention aux incertitudes grandissantes (troubles au Moyen-Orient, tensions dans la zone euro et tsunami au Japon), nous avons constaté depuis qu'une certaine agitation les a gagnés. Cela se constate notamment dans la forte baisse des prix des matières premières et de l'euro.
En ce qui concerne les prix des matières premières, leur baisse semblerait liée aux données économiques plus faibles combinées à une atténuation des troubles, entre autres, en Arabie saoudite. Étant donné que les matières premières ont en moyenne augmenté de 30 % au cours des douze derniers mois, il n'est pas surprenant qu'une correction assez forte ait lieu et les investisseurs qui prennent leurs bénéfices y jouent un rôle important. Pour ce qui est de l'euro, la baisse de la devise est principalement attribuée à la Grèce qui, ayant à nouveau besoin d'aide, engendre d'inévitables tensions (politiques) dans la zone. Les marchés d'actions ont eux aussi perdu de leur vigueur lors des dernières semaines, même si les pertes sont toujours bien moins importantes que prévues. Pour les mois qui viennent, nos attentes relatives aux actions ne sont de ce fait pas très élevées. Nos prévisions à plus long terme restent toutefois positives.
USA : reprise du marché de l'emploi
Si cela s'est fait attendre, nous assistons néanmoins à une forte reprise du marché du travail aux États-Unis. En avril, l'emploi a enregistré pour le troisième mois consécutif une progression d'environ un quart de million, ce qui représente deux millions de nouveaux emplois créés depuis la fin de la récession. Si cela semble positif, il ne faut cependant pas oublier que pendant la période 2008-2009, plus de huit millions d'emplois ont été supprimés. Il reste donc du chemin à faire. En outre, nous constatons que les indicateurs les plus récents (indemnités de chômage, confiance des producteurs) pointent vers un affaiblissement de la croissance dans les prochains mois, en partie sous l'influence des prix du pétrole.
La BCE fait du sur-place
Après avoir relevé les taux d'un quart de point à hauteur de 1,25 %, la BCE a décidé au début du mois de ne pas procéder à un nouveau relèvement. Si cette décision n'a pas été une vraie surprise, le marché à malgré tout été étonné que la Banque Centrale annonce déjà ne pas envisager de relever les taux en juin. Nous ne partageons pas cet étonnement. Ces derniers mois, nous avons remarqué que le secteur des exportations (allemand) est sous pression en raison de la progression de l'euro. Même après la correction de 5 % qui a eu lieu au cours des dernières semaines, la devise est encore de 6 % supérieure au début d'année. Ceci, allié à la récente baisse des prix des matières premières, nous fait penser qu'il faudra peut-être attendre août pour assister à un nouveau relèvement des taux.
Japon : nouvelle secousse
L'une des nouvelles secousses qui survient toujours après un séisme est celle qui concerne les données économiques. La production industrielle de mars en a été un bon exemple. Les marchés financiers prévoyaient déjà une baisse importante (-10,6 % en glissement mensuel), mais les chiffres provisoires portent pour l'instant la baisse à 15 %. Les dépenses des ménages ont également enregistré une diminution de 8,5 %. Même si ce résultat a été plus important que prévu, il est possible que cette baisse soit suivie par une forte reprise lorsque la reconstruction des infrastructures débutera. Toutefois, notre plus grande inquiétude est de savoir qui va payer la note. Une part importante devra être prise en charge par le gouvernement japonais, qui n'est déjà pas dans une position financière très solide. Globalement, nous conservons une attitude attentiste quant aux prévisions économiques du Japon.
Le marché des capitaux est en mouvement
En raison de l'incertitude accrue sur les marchés financiers, les taux du marché de capitaux ont enregistré une diminution continue au cours des semaines passées. Aux États-Unis, le marché obligataire a été soutenu par l'annonce de la banque centrale américaine (la Fed) qui n'envisage pas de relever ses taux pour le moment. En Europe, au contraire, les écarts de taux n'ont fait que s'amplifier. Les taux du marché de capitaux grec ont notamment continué leur hausse, ce qui indique que la Grèce est désormais définitivement coupée du marché. Si une aide supplémentaire est nécessaire, la volonté politique requise ne fait que diminuer. Il reste à attendre une solution crédible aux problèmes actuels de la zone euro.