par Laurent Berrebi, Directeur des études économiques de Groupama Asset Management
Le rebond de l’indice ISM manufacturier de 1,8 point à 55,3 ne fait pas illusion : la baisse des indicateurs avancés n’est pas terminée et devrait être entraînée par l’affaiblissement du commerce mondial et de la demande intérieure. Les livraisons domestiques de biens d’équipement confirment la décélération marquée des dépenses d’investissement des entreprises.
Par ailleurs, en raison du net retournement des achats de biens durables, en particulier d’automobiles, la consommation des ménages se contracte depuis mars. Dans un contexte de poursuite de réduction de la dette des ménages, le plongeon de la confiance des promoteurs en dépit de la baisse des taux hypothécaires, les faibles créations d’emplois, les revenus salariaux stables et la sensible augmentation du sous-emploi sont alors autant de facteurs susceptibles d’allonger la période de ralentissement qui peut même dégénérer en récession.
Nous conservons cependant un scénario de redémarrage de la croissance à la fin de l’été qui proviendra de l’accélération de la consommation dont le pouvoir d’achat des ménages devrait être revigoré par la chute de l’inflation énergétique. Notre prévision de croissance est abaissée de 2,5% à 2,2%.
Zone euro : la consommation lâche
Les indicateurs avancés poursuivent leur retournement marqué dans le secteur industriel, qui subit le ralentissement mondial : le taux de croissance annuelle des nouvelles commandes étrangères allemandes est tombé à 5%, un plus bas depuis fin 2009. L’indice PMI services se dégrade également fortement, notamment en France et en Italie, indiquant un ralentissement sensible de leur demande intérieure.
Les anticipations des entreprises plongent à un plus bas de 2 ans, rejoignant l’inquiétude des investisseurs, notable au niveau de l’indice ZEW. Surtout, après avoir bien tenu jusqu’au premier trimestre grâce à la baisse sensible du taux d’épargne, la consommation des ménages lâche prise : les ventes au détail plongent partout. Au vu d’un taux d’épargne bien trop bas, l’évolution de la consommation devrait dépendre des seuls déterminants du pouvoir d’achat qui sont mal orientés.
L’emploi est stable au premier trimestre et devrait baisser avec le ralentissement marqué de l’activité. La rémunération moyenne augmente faiblement de 1,5% en raison du niveau élevé du chômage qui va se maintenir. Seule, la baisse de l’inflation prévue à partir de la fin du troisième trimestre permettra de redonner de la vigueur au pouvoir d’achat et à la consommation.
Chine : la politique monétaire continue à se durcir
La croissance s’est légèrement affaiblie au deuxième trimestre passant en rythme annuel de 9,7% à 9,5%. En fait, si l’industrie est affectée par le ralentissement des exportations et des ventes au détail qui souffrent de la hausse de l’inflation et des moindres soutiens au secteur automobile, le secteur des services demeure dynamique, et le secteur de la construction bénéficie du programme énorme de construction de logements sociaux réalisé par les gouvernements locaux.
Parallèlement, l’inflation continue à se tendre en raison de la hausse marquée du coût du logement, reflet de la bulle immobilière que les autorités cherchent à combattre. La politique monétaire devrait alors poursuivre son durcissement : le taux de réserves obligatoires a été remonté 6 fois depuis le début de l’année pour atteindre 21% pour les grandes banques, le plus haut niveau historique, et les taux directeurs ont une nouvelle fois été remontés début juillet de 25 points de base.
Mais, les difficultés de crédit des PME, les défauts de quelques promoteurs immobiliers et plus généralement l’importance du ralentissement industriel préparent une inflexion de la politique monétaire de restrictive à neutre au cours du troisième trimestre.