par Laurent Berrebi, Directeur des études économiques de Groupama Asset Management
Le moral des entreprises semble tenir bon pour l’instant. La montée d’un point de l’indice ISM manufacturier à 51,6 semble résulter d’un effet de rattrapage dans le secteur des transports qui a été affecté par les problèmes d’approvisionnement dus au Japon.
Mais, la baisse de l’ISM n’est pas terminée car le rythme de restockage trop élevé doit être corrigé. Surtout, l’indice des carnets de commandes, c’est-à-dire des commandes qui restent à satisfaire, est au plus bas depuis début 2009 et justifierait une sensible contraction de l’emploi dans les mois qui viennent.
Cette dernière conforterait le pessimisme des ménages, déjà affectés par une dégradation de leur pouvoir d’achat salarial, et provoquerait alors une baisse de leur consommation et de l’activité, d’autant plus importante que leur taux d’épargne à 4,5% est d’1 point et demi inférieur à son niveau fondamental. Les données concernant le marché du travail vont être déterminantes dans les prochaines semaines.
Zone euro : la crise de confiance devrait déclencher une récession en T4
La croissance du PIB devrait se maintenir autour des 0,2% au troisième trimestre, grâce au rebond de la consommation en France et en Allemagne, après leur forte baisse le trimestre dernier. La contribution du commerce extérieur devrait également rester positive, avec des exportations qui accélèrent encore en France et Allemagne et des importations qui baissent dans les pays périphériques, en ligne avec la demande intérieure.
Les indicateurs avancés indiquent cependant une contraction du PIB dès le quatrième trimestre, provoquée par la crise de confiance non seulement dans la gouvernance européenne mais aussi dans la solidité du secteur bancaire européen qui durcit déjà les conditions de crédit notamment pour les entreprises.
L’investissement devrait alors se contracter et le cycle des stocks devrait se retourner.
La consommation déjà pénalisée par les plans de rigueur devrait souffrir de la dégradation du marché de l’emploi : les ménages anticipent une dégradation du marché du travail y compris en Allemagne. Cependant, dans les toutes prochaines semaines, des décisions importantes de la part des européens sur la gouvernance en zone euro, sur le renforcement du capital des banques, sur l’accroissement de l’effet de levier du FESF, devraient ramener la confiance et permettre une récession de courte durée (2 trimestres de contraction du PIB).
Chine : le pays a les moyens de faire face à une potentielle crise de confiance
L’activité devrait ralentir sous l’impact de l’affaiblissement du commerce mondial et de l’investissement hors immobilier public. La consommation devrait cependant conserver le même rythme de croissance, grâce à un pouvoir d’achat préservé qui devrait bénéficier du reflux de l’inflation, si bien que l’économie connaîtrait un « soft landing».
La politique monétaire est dans une phase d’attentisme face aux incertitudes concernant l’ampleur du retournement de l’inflation qui dépendra de l’évolution des prix immobiliers, principal challenge pour les autorités : il faut que ces derniers décélèrent pour réduire l’inflation, tout en évitant de baisser ce qui serait un facteur de tensions sociales et de risques systémiques.
Certains éléments font craindre une crise de confiance des chinois dans leur économie : les difficultés de certains promoteurs immobiliers, la contraction importante des ventes immobilières durant la grande semaine de vacances « la golden week », et la dégradation de la situation financière des PME. Outre une demande immobilière structurellement solide, la Chine a les moyens d’y faire face, par le biais d’une politique budgétaire contracyclique et d’un relâchement de sa politique monétaire.