par Laurent Berrebi, Directeur des études économiques de Groupama AM
La baisse de l’indice ISM manufacturier de près de 2 points en mars due aux commandes domestiques n’est pas une surprise. La demande intérieure finale cale depuis la fin de l’année 2011, excepté sur le marché de l’immobilier résidentiel qui reste tiré par l’investissement locatif dans l’immobilier collectif.
La consommation est atone depuis 3 mois à cause de la consommation de services (2/3 de leur consommation) et de biens non-durables (20%). Les dépenses d’investissement des entreprises se contractent en début d’année notamment en raison de la dégradation de leur rentabilité des entreprises, contrepartie de la réduction sensible des gains de productivité.
Car, alors que l’activité ralentit fortement, le marché de l’emploi est dynamique, améliorant les perspectives de la consommation qui devrait reprendre le chemin d’une hausse modeste et qui demeurera handicapée par l’absence de gain de pouvoir d’achat pour la grande majorité des américains et par la poursuite de la baisse des prix immobiliers. Enfin, les commandes étrangères se raffermissent. Au total, l’ensemble des indicateurs avancés demeure compatible avec une croissance modeste de 1 à 1,5% en rythme annualisé.
Dans un contexte structurel de désendettement et de hausse faible des revenus, la croissance reste menacée par le cours du baril qui pourrait provoquer une nouvelle baisse de la consommation.
Zone euro : encore un long chemin vers la normalisation
Le PIB a enregistré une contraction de 0,3% au 4ème trimestre, entraînée par toutes les composantes de la demande intérieure ainsi que par les exportations en baisse pour la 1ère fois depuis 2 ans et demi. Les enquêtes de conjoncture signalent une moindre réduction de l’activité au 1er trimestre, grâce au raffermissement de la demande étrangère. Le principal frein à la croissance demeure la faiblesse de la demande intérieure : la confiance dans les services s’effrite voire même chute dans des pays comme l’Italie.
La dégradation qui s’accentue sur le marché du travail hors Allemagne, pèse sur la confiance des ménages et sur leur comportement de consommation, notamment en Espagne. Les liquidités massives fournies dans le cadre du LTRO1 ont soulagé les tensions sur les marchés du crédit de manière inégale. Si les flux de crédits aux ménages se redressent en janvier, ceux aux entreprises non financières continuent de se contracter. En raison notamment du durcissement particulièrement marqué des conditions de crédit, la contraction de l’activité se poursuit alors à des rythmes élevés en Espagne comme en Italie.
L’Allemagne devrait être l’un des rares pays à retrouver le chemin de la croissance au 1er trimestre. Par la suite, la normalisation de l’activité, probablement inégale géographiquement et sectoriellement, reste soumise à des risques baissiers, en raison notamment de la consolidation budgétaire et des conditions de crédit.
Chine : changements structurels en cours dans une croissance modérée
Le ralentissement de l’activité résulte de la demande intérieure finale, consommation comme investissement. Il est la conséquence de la politique monétaire restrictive antérieure ainsi que de tensions sur les liquidités de l’économie. Les autorités cherchent en effet à réduire le financement de l’économie issu de shadow banking dont les fortes rémunérations offertes aux épargnants nuisent aux petites banques qui ont du mal à attirer les dépôts.
Ces tensions sur la liquidité pèsent sur le financement des PME et poussent les autorités monétaires à réduire le taux de réserves obligatoires. Le reflux rapide de l’inflation donne d’ailleurs des marges de manœuvre supplémentaires à la politique économique pour desserrer plus rapidement les contraintes de liquidité, dont le coût est cependant maintenu pour éviter une autre bulle du crédit. Ce ralentissement s’insère bien dans le cadre des objectifs structurels fixés par la Commission Nationale du Peuple: une croissance plus qualitative avec des objectifs précis en termes de réduction des intensités carbone et énergies fossiles, ainsi qu’une augmentation de la part des services, de l’urbanisation et des dépenses R&D portées à 2,2% du PIB.