par Marie-Pierre Peillon, Directrice de la recherche de Groupama AM
Etats-Unis : Le petit moteur de croissance s’essouffle
Le dernier rapport sur l’emploi pour le mois de mai a rappelé qu’on ne peut jamais être certain des perspectives de croissance. Les données économiques publiées depuis ont d’ailleurs indiqué un ralentissement visible de l’activité au cours du printemps. L’actuelle faiblesse de l’emploi pèse désormais sur les dépenses des ménages en dépit d’une décélération sensible de l’inflation qui habituellement vient soutenir la consommation via une amélioration du revenu réel disponible. Le sentiment auprès des consommateurs commence à se dégrader car les ménages sont désormais plus pessimistes à l’égard des perspectives économiques et l’évolution du marché du travail.
Tandis que les entreprises américaines restent encore très rentables, le manque de confiance les empêche d’augmenter leurs investissements et leurs effectifs. Le secteur manufacturier a déjà enregistré un net ralentissement ces 2 derniers mois, en ligne avec les autres indicateurs de la demande intérieure et l’affaiblissement dans les autres principaux pays. La production manufacturière en moyenne sur avril/mai enregistre une progression de seulement 2% en rythme annualisé contre quasi 10% au 1er trimestre. Dans un tel contexte, les chances de maintenir un taux de croissance aux environs de 2% par trimestre se compliquent, d’autant plus si la récession en zone euro s’intensifie.
Zone euro : La récession s’intensifie au cours du printemps
Les enquêtes et données récentes indiquent que l’ensemble de la zone euro est configurée pour enregistrer une sensible contraction du PIB au 2ème trimestre, après avoir stagné au 1er trimestre. Le PMI composite d’activité, qui est un bon indicateur avancé de la croissance du PIB, a chuté en mai à son plus bas niveau depuis juin 2009. Le rythme de contraction a accéléré à la fois dans les services et le secteur manufacturier. De façon similaire, le sentiment économique publié par la Commission Européenne a encore reculé pour atteindre son plus bas niveau depuis octobre 2009.
Dans le secteur manufacturier, l’indice PMI de production est tombé en-dessous de 45 et la composante sur les nouvelles commandes n’est plus qu’à 42,6, un très faible niveau annonçant la poursuite de cette orientation négative. Aucun pays n’échappe à la dégradation des perspectives dans ce secteur, ni même la France ou l’Allemagne où les indices se situent désormais aux environs de 45.
Du côté des services, la France et l’Allemagne ont également enregistré une notable détérioration mais la situation n’est pas aussi dramatique que dans les pays du sud. On observe en particulier une sensible dégradation de la situation conjoncturelle en Italie. La demande intérieure s’est effondrée au 1er trimestre (-1,2%t/t), reflétant un fort recul de la consommation et de l’investissement. Les enquêtes en mai ne signalent aucune amélioration. Tandis que l’Espagne s’est vue contrainte à faire appel à l’Union européenne pour recapitaliser ses banques, ce qui n’a pas dissipé les inquiétudes des investisseurs.
Chine : l’économie continue de ralentir
Tandis que les principaux indicateurs économiques du mois de mai ont montré une modeste amélioration par rapport aux données très décevantes d’avril, l’économie chinoise poursuit toutefois sa tendance à ralentir au 2ème trimestre. Ce ralentissement s’explique à la fois par des facteurs internes et externes. Sur le plan domestique, les efforts du gouvernement pour faire avancer la restructuration économique ont engendré un ralentissement dans les secteurs concernés (l’immobilier, les industries de l’acier et l’automobile par exemple). Sur le plan extérieur, malgré une meilleure performance des flux commerciaux en mai, les chocs externes, en particulier la crise de la dette souveraine en zone euro, ont renforcé récemment les craintes des entreprises exportatrices. Les incertitudes qui entourent la crise des pays périphériques si elles persistent, pourraient être un frein significatif à la reprise économique anticipée au second semestre, notamment par le biais du commerce extérieur. Ces risques croissants à court terme combinés aux données économiques de mai suggèrent que la croissance du PIB au 2ème trimestre sera légèrement plus faible que celle enregistrée au 1er trimestre, elle-même déjà décevante.
La décélération plus marquée que prévu de l’inflation en mai à 3% est probablement une raison importante derrière la baisse récente des taux d’intérêt (la première depuis 2008). Le ralentissement de l’économie et des risques plus élevés en zone euro ont placé la croissance en haut de la liste des préoccupations des autorités chinoises. Par conséquent, d’autres mesures d’assouplissement monétaires sont probablement à venir.