par Laurent Berrebi, directeur des études économiques de Groupama Asset Management
Comme attendu, le PIB de T4 2008 a été fortement révisé à la baisse sous l’impact de toutes ses composantes, chutant de 6,4% au lieu de 3,9%.
La contraction du PIB sera moindre en T1 2009, de l’ordre de 4%, grâce à la stabilisation provisoire de la consommation. Cela ne signifie pas pour autant la fin de la crise qui demeure une crise d’insolvabilité.
Les 700 000 suppressions d’emplois mensuelles en moyenne sur les 3 derniers mois, la perte de 5,4% des emplois à temps plein en un an et la violente remontée du chômage de 8,1% en février à près de 12% en fin d’année provoquent une explosion du nombre des ménages insolvables : des défaillances sont enregistrées sur près de 8% des crédits hypothécaires, soit 800 Md$ concernés. Les ventes dans l’immobilier résidentiel comme les prix continuent d’ailleurs de plonger.
Les licenciements massifs n’éviteront pas des faillites exceptionnelles, résultat de surcapacités structurelles apparues avec l’éclatement de la bulle du crédit. Le plongeon de l’investissement des entreprises, sur un rythme annuel de plus de 20% va donc se poursuivre. Enfin, le PIB sera pénalisé par la résorption des stocks, toujours excessifs, en dépit de la révision baissière de leur contribution à la croissance de +1,3 point à +0,3 point en T4 2008.
Face au délabrement du secteur privé, l’Administration a annoncé un plan de relance de près de 800 Md$ voté par le Congrès, des mesures pour atténuer les saisies immobilières et une aide financière supplémentaire de 200 Md$ pour les agences hypothécaires.
Zone Euro : prise dans la tourmente
Le PIB s’est effondré de 1,5% en T4 2008 après -0,3% en T3. La chute du PIB touche tous les grands pays : l’Espagne (-1%), la France (-1,2%), l’Italie (-1,8%). L’Allemagne (-2,1%) souffre davantage en raison de son statut de grand pays exportateur : l’extérieur y a retiré 2,2% de PIB en T4, contre 0,9% pour l’ensemble de la zone euro.
La baisse de la demande intérieure finale a réduit le PIB de 1,3% pour l’ensemble de la zone euro. Elle a été très marquée dans les pays touchés par l’excès de dette privée comme l’Espagne (-2,0%), modeste en Allemagne (-0,6%) dont l’économie est peu affectée par l’endettement du secteur privé non-financier. La demande intérieure a souffert de la sensible contraction de la consommation des ménages (-0,9%), plus marquée en Espagne (-1,3%), partagée par tous les pays excepté la France (+0,1%) et l’Allemagne (-0,1%). Elle a également pâti du plongeon général de l’investissement privé : en rythme annualisé, il a été de 10,8% pour l’ensemble de la zone, de 4,6% pour la France, de 10,8% pour l’Allemagne, de 21% pour l’Espagne. Conséquence de la crise immobilière et de l’effondrement du commerce mondial en raison notamment des pays d’Europe orientale, il est aussi le reflet d’entreprises étranglées par des pertes substantielles et des contraintes de financement considérables. L’indice de climat économique continue de plonger dans tous les secteurs et partout, en particulier en Allemagne et aux Pays-Bas : le rythme de baisse du PIB devrait être bien plus fort en T1 2009 qu’en T4 2008.
Japon : contraction historique du PIB en 2009
La chute du PIB, supérieure à 12% en T4 2008 en rythme annualisé, devrait approcher 20% en T1 2009. Les exportations se sont réduites de plus de 40% depuis septembre dernier : le solde commercial, déficitaire pour la première fois depuis 1980, demeure négatif en dépit du contre-choc pétrolier, ce qui est exceptionnel. De ce fait, les entreprises manufacturières connaissent une véritable débâcle : la production industrielle devrait plonger de 20% en T1 (soit 80% en rythme annualisé), après que la masse des profits eut été réduite à 0 dès T4. Les entreprises qui se doivent de résorber des stocks considérables d’invendus, de l’ordre de 40% à demande constante, vont alors devoir procéder à un ajustement encore bien plus marqué de leurs dépenses d’investissement : ainsi, le nouveau plongeon en janvier de plus de 30% des nouvelles commandes intérieures de biens d’équipement provenant du secteur manufacturier le montre-t-il déjà.
Quant aux ménages, ils devraient réduire sensiblement leur consommation qui a fait du surplace en T4 2008. Ils vont souffrir de la multiplication des suppressions d’emplois, indispensable pour éviter des faillites considérables, et des réductions des rémunérations : les demandes d’emplois sont 50% plus élevées que les offres d’emplois, ce qui n’était pas arrivé depuis 2003. Dans un contexte de demande intérieure dépressive, toute amélioration est conditionnée à la situation en Chine et aux Etats-Unis, principaux partenaires commerciaux du Japon.