Zone euro : prévisions revues à la hausse

par Martin Wolburg, CIIA, économiste chez Generali Investments Europe

• Les toutes dernières statistiques macroéconomiques en zone euro semblent indiquer un bon début d'année. De plus, les indicateurs de sentiment laissent entrevoir une poursuite de la vigueur de l'activité.

• Même si les risques d'ordre géopolitique se sont claire- ment accrus, nous revoyons à la hausse à 1,2% nos prévisions de croissance pour 2014.

• La BCE s'est dite prête à se lancer dans un programme d’assouplissement quantitatif si l'inflation venait à être « trop faible pendant trop longtemps ».

• L'inflation globale a rebondi à tout juste 0,7% en rythme annuel en avril, signe selon nous d'un retour de la tendance baissière de l'inflation. Nous nous attendons désormais à voir la BCE préparer verbalement le terrain pour de nouvelles mesures en mai. x

Les toutes dernières statistiques macroéconomiques en zone euro semblent indiquer un bon début d'année. Au 1er trimestre, la production industrielle a rebondi après une période de faiblesse (+0,4% en trimestre glissant (t/t) jusqu'à présent) grâce à la croissance des exportations dans un environnement mondial globalement favorable. De plus, l'amélioration de la confiance des ménages est de plus en plus allée de pair avec une augmentation de la consommation. Les ventes au détail ont fortement progressé durant les deux premiers mois de l'année et s'établissent jusqu'à présent en hausse de 0,8% t/t, le chiffre le plus élevé depuis la fin 2006. Selon nous, l'amélioration de la consommation devrait se pour- suivre à la faveur de la prochaine embellie du marché du travail. Au 4ème trimestre 2013, l'emploi en zone euro a progressé de 0,1% t/t. Le taux de chômage s'est stabilisé à 11,9% au cours des derniers mois, un niveau tout juste en-deçà du pic du cycle de 12,0%.

En résumé, nous nous attendons à ce que les chiffres du PIB au 1er trimestre témoignent d'une accélération de l'activité économique, de 0,2% à 0,4% t/t. De plus, les indicateurs de sentiment laissent entrevoir un début de 2ème trimestre bien orienté. En avril, l'indice PMI composite de la zone euro a de nouveau progressé (de 53,1 à 54,0) sous l'effet de l'amélioration de la confiance, surtout dans le secteur des services plus tourné vers le marché intérieur (de 52,2 à 53,1), mais également dans le secteur manufacturier plus axé sur les exportations (de 53,0 à 53,3). De plus, les composantes relatives aux anticipations ont relativement bien résisté aux incertitudes géopolitiques jusqu'à pré- sent en continuant de laisser entrevoir une activité solide. Dans ce contexte, nous avons revu à la hausse nos anticipations de croissance pour 2014, de 1,0% à 1,2%.

La BCE prête à se lancer dans un programme d’assouplissement quantitatif

Depuis le début de l'année 2013, l'inflation en zone euro n'a cessé de marquer le pas. À l’avenir, nous voyons l'activité économique en zone euro se redresser, tant dans les pays du « noyau dur » que périphé- riques. Pour l'essentiel, les pressions sur les prix ne s'atténueront plus. Les projections de croissance et d'inflation de mars de la BCE dressent un tableau positif : une reprise qui gagne en vigueur et une inflation qui s'accélère et se rapproche de l'objectif d'inflation implicite de 1,9% d'ici la fin 2016. Toutefois, la BCE a durci le ton en se montrant préoccupée par la déflation, mais également et déjà par une inflation susceptible d'être « trop faible pendant trop longtemps ». Si tel devait être le cas, des mesures d'ampleur telles que l'assouplissement quantitatif ne tarderaient pas à être prises.

Selon nous, les quatre facteurs suivants jouent un rôle essentiel aux yeux de la BCE afin de juger de l'opportunité ou pas d'un programme d'assouplissement quantitatif. Premièrement, l'inflation globale est infé- rieure au scénario central de la BCE. Deuxièmement, les anticipations inflationnistes s'orientent très nettement à la baisse. La BCE se concen- tre avant tout sur les anticipations inflationnistes à 5 ans. Si ces antici- pations devaient perdurer en-deçà de la moyenne (de 2,37%), cela agirait probablement comme une sonnette d'alarme pour la BCE dans la mesure où les anticipations inflationnistes ne pourraient plus être caractérisées comme « fermement ancrées ». À cet égard, nous esti- mons critique le niveau de 1,95%, soit un écart-type en-dessous de la moyenne. Troisièmement, dans la situation macroéconomique actuelle, la BCE a clairement mentionné les risques géopolitiques et l'évolution du taux de change de l'euro au titre des risques baissiers entourant la stabilité des prix. Quatrièmement, nous pensons que si le guidage des anticipations (« forward guidance ») ne donnait plus satisfaction, la BCE sera alors également contrainte de prendre des mesures d'ampleur telles que l'assouplissement quantitatif. En la matière, Mario Draghi a mentionné la stabilité des courbes à moyen terme et des courbes monétaires à court terme en guise d'indicateurs.

En avril, l'inflation globale en zone euro a rebondi à tout juste 0,7% en année glissante, un chiffre inférieur aux prévisions du marché. Si cette situation est susceptible de remettre en cause les prévisions d'inflation de la BCE, les anticipations inflationnistes demeurent toutefois au sein de la fourchette de la Banque Centrale et la reprise est en bonne voie. Selon nous, les chiffres d'inflation d'avril militeront en faveur de nouvelles mesures de la BCE, même si le président Mario Draghi a récemment clairement indiqué que la probabilité d'une politique d'assouplissement quantitatif était encore peu élevée. Nous estimons qu'il est plus que pro- bable (compte tenu de la hausse des taux monétaires) que des mesures traditionnelles et non conventionnelles telles que la non stérilisation des achats du SMP soient prochainement prises, probablement dès le mois de mai.