par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé, Xavier d’Ornellas, Gérant Associé – Pôle Gestion Flexible, avec la participation de Jean-Michel Mourette, économiste chez Amplégest
Pierre Dac disait : « les prévisions sont difficiles, surtout lorsqu’elles concernent l’avenir ». Cette boutade éclaire de façon impitoyable la difficulté de cet exercice appliqué à l’économie, la réalité différant le plus souvent du consensus, année après année. Ainsi, il y a un an, lorsque nous envisagions une croissance soutenue aux USA, permettant un arrêt progressif du quantitative easing, nous suscitions le plus souvent le scepticisme. L’économie américaine ne repartait pas réellement et la FED était prise dans une fuite en avant qu’elle ne pouvait plus arrêter sous peine de chaos.
Un an après, la croissance américaine ne se discute plus, en dépit d’un mauvais premier trimestre 2014 largement dû à une météo exceptionnelle. Et surtout la FED a arrêté son QE, sans douleur, presque dans l’indifférence… L’Amérique semble d’ailleurs rentrer dans un cercle vertueux, non plus de reprise économique, mais de croissance pérenne, sans inflation, permettant un ajustement de la politique monétaire et un retour à une situation normale dans le cycle économique.
En Europe nous en sommes encore loin, mais nous persistons pourtant à dire que la situation devrait s’améliorer en 2015, à un rythme cependant inférieur à celui des USA ( L’Europe reste l’Europe, avec son hétérogénéité et ses freins structurels…).Aux trois raisons déjà évoquées lors de récents « points macro » (baisse de l’euro face au dollar, chute du pétrole et redémarrage du crédit) devrait s’ajouter un desserrement des contraintes budgétaires sur les Etats, en dépit des réticences allemandes. Le plan d’investissement de 300 milliards d’euros à l’échelle de l’union européenne devrait également participer au redémarrage de la machine. Nous sommes aujourd’hui à un stade où, échaudés par les déceptions et les faux départs récents, les prévisionnistes restent prudents, voire pessimistes pour 2015. Nous faisons partie (modestement car la prévision est également pour nous un exercice aléatoire !) de ceux qui tablent sur une reprise plus forte que généralement escompté pour l’année à venir. Les points d’inflexion sont encore peu visibles, et cette amélioration à venir reste un pari peu consensuel. L’Europe est divisée entre pays qui ont réformé (« axe » Allemagne Espagne) et qui ont aujourd’hui les bases les plus solides pour profiter de l’embellie, et pays qui, ayant beaucoup annoncé et peu réalisé (« axe » France Italie), sont en retard.
Au Japon les commentateurs économiques s’accordent le plus souvent sur l’échec de la politique menée par ABE et la banque centrale. Les derniers chiffres semblent leur donner raison, à tel point que le premier ministre a du reporter la seconde hausse de la TVA prévue et provoquer des élections générales prochaines. La dévaluation compétitive du yen et la baisse du pétrole, conjuguées à une politique reflationniste et à la baisse du taux d’impôt sur les sociétés, devraient permettre à la conjoncture de s’améliorer, même si les problèmes structurels liés au vieillissement de la population demeureront.
Le tableau est donc plutôt encourageant. Cette amélioration ne signifie pas nécessairement une hausse des marchés financiers. Les bourses n’évoluent pas toujours en phase avec les économies de leurs pays.
Aux USA, les actions ont progressé de façon spectaculaire depuis 3 ans, anticipant beaucoup de bonnes nouvelles à venir. Aujourd’hui la valorisation des actions américaines est élevée, rendant leur évolution incertaine, d’autant que la hausse des taux courts, qui devrait intervenir prochainement, pourrait inciter les investisseurs à prendre leurs bénéfices. Paradoxalement, c’est dans les zones convalescentes (Japon, Europe) qu’il y a le plus de potentiel. Bien sûr Wall-Street reste le marché leader qui donnera le ton général en 2015, mais Europe et Japon pourraient surperformer les USA. Les valorisations, plutôt élevées, surtout en Europe, sont moins inquiétantes parce que ces zones sont en bas de cycle. Par ailleurs, les entreprises se sont beaucoup restructurées et vont bénéficier de l’impact positif de la dévaluation de leur devise, et du contre-choc pétrolier en cours. Enfin, la politique monétaire accommodante des deux banques centrales agit comme une protection limitant le risque de repli des marchés.
Notre allocation globale tient compte de ces paramètres en cette fin d’année 2014. Nous pensons par ailleurs que la gestion relative, dans un monde où tous les actifs sont interconnectés, sera une des clefs d’une bonne gestion en 2015. Nous essaierons de bénéficier des situations d’arbitrage entre les différentes classes d’actifs, pour générer de l’alpha dans nos portefeuilles. La bonne performance de nos fonds flexibles (Patrimoine International +6,74% ytd et Amplégest Proactif + 7,77% ytd (au 28/11)) a été construite à partir de notre vision macroéconomique exprimée tous les mois dans ces points macro. 2014 nous a souri. Nous essaierons de garder le cap en 2015 !