par Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas
• Les dépenses de consommation des ménages en biens marquent le pas : après avoir stagné en avril, elles ont à peine progressé en mai. C’est le contrecoup, attendu, de la vigueur du premier trimestre.
• La consommation devrait retrouver un peu de dynamisme, en ligne avec des gains modestes de pouvoir d’achat, dus au redémarrage lent de l’emploi et à une inflation moins basse.
Les dépenses de consommation des ménages en biens ont très légèrement progressé en mai (+0,1% m/m en volume), contre une baisse anticipée sur la base du recul des immatriculations de véhicules neufs (-1,5% m/m). En réalité, les achats d’automobiles ont légèrement augmenté sur le mois, comme les dépenses d’énergie et les achats d’autres biens. Les dépenses en équipement du logement et les achats de vêtements ont, eux, légèrement reculé. Sur un an, hormis les dépenses d’énergie, tous les postes de consommation sont en hausse, sans grand dynamisme toutefois.
Cette hausse infime fait suite à une stagnation en avril et à un net recul en mars (-0,6% m/m). L’acquis de croissance pour le deuxième trimestre s’établit ainsi à -0,4%. Cette faiblesse est le contrecoup de la vigueur du trimestre précédent (+1,5% t/t). Les dépenses avaient, alors, bénéficié de deux facteurs de soutien ponctuels. Elles ont été soutenues par un rebond de la consommation d’énergie (en lien avec le retour à des températures de saison plus fraîches). Ont joué également, sur les autres postes de dépenses, les gains de pouvoir d’achat issus de la forte baisse des prix du pétrole. L’effet favorable de cette dernière sur la confiance des ménages, et notamment sur leur jugement sur l’opportunité de faire des achats importants, s’est traduit dans les faits. Mais sans baisse supplémentaire des prix du pétrole depuis février, et faute d’un relai côté emploi, il est normal d’observer un net tassement de la consommation au deuxième trimestre. Un recul des dépenses en biens ne préfigure toutefois pas une baisse de l’ensemble des dépenses de consommation. Celles-ci se divisent, en effet, à peu près à part égale entre achats de biens et de services. L’évolution de ces derniers, bien plus stable et rarement négative, amortit les à-coups des premiers. Nous tablons sur une hausse de 0,1% t/t de la consommation des ménages au deuxième trimestre, l’INSEE sur +0,2 %.
Une fois ce contrecoup passé, la consommation des ménages devrait retrouver un peu de dynamisme (+0,3% t/t environ par trimestre), en ligne avec le redressement modéré du pouvoir d’achat du revenu disponible brut. Pour le moment, celui-ci tient surtout à la désinflation et à la moindre hausse des prélèvements mais, à compter de la mi-2015, il devrait trouver un nouvel appui dans le redémarrage modeste attendu de l’emploi. Sur toute l’année 2015, grâce au premier trimestre très fort, la consommation des ménages rebondirait nettement (croissance attendue de 1,8% après 0,5% en 2013 et 0,6% en 2014). En 2016, sa hausse serait moindre (1,1%), les gains de pouvoir d’achat étant amenuisés par l’inflation moins basse. C’est mieux que la quasi-stagnation observée depuis 2008, qui marque une rupture nette de tendance. Mais cela reste surtout très en-deçà du rythme de hausse moyen de la consommation observée jusqu’en 2007 et légèrement supérieur à 2% par an. La consommation pourrait ainsi surprendre à la hausse et, avec elle, la croissance. Cette dernière est certes bridée par les contraintes fortes héritées de l’apurement des excès passés et par les faiblesses structurelles de l’économie française. Mais dans la mesure où les premières vont plutôt en se dissipant et où des réformes sont engagées pour remédier aux secondes, il est également plausible que la croissance retrouve un second souffle.