par Alexandra Estiot, économiste chez BNP Paribas
• La croissance américaine est restée molle au premier semestre 2015.
• L’activité ne s’est finalement pas contractée au T1 mais elle n’a pas connu non plus de rebond marqué au T2.
• L’inflation est, par ailleurs, toujours aussi modérée.
• La Fed maintient sa politique inchangée et introduit un mot nouveau dans son communiqué.
La publication des premières estimations de la croissance au deuxième trimestre n’a surpris personne. Comme cela avait été annoncé précédemment, les statisticiens du BEA ont appliqué une nouvelle méthode statistique qui corrige la saisonnalité persistante, responsable d’une sous-estimation de l’activité au cours des premiers mois de chaque année. Il s’en est suivi une révision à la hausse pour T1 : d’abord évalué à -0,2% (taux trimestriel annualisé), le taux de croissance aura finalement été positif, à +0,6%. Aussi le rebond au T2 (+2,3%) n’a-t-il rien d’exceptionnel.
La demande intérieure finale a été le seul facteur de soutien à la croissance, la contribution de la variation des stocks ayant compensé celle des exportations nettes (respectivement -0,1 et +0,1 point de pourcentage). La demande intérieure a aussi été essentiellement celle du secteur privé, les dépenses publiques ayant poursuivi leur repli en pourcentage du PIB, pour atteindre un plus bas historique de 17,5%. En fait, le dynamisme résulte exclusivement de la demande des ménages, l’investissement non résidentiel s’étant contracté. Les ménages ont donc sauvé la croissance, avec une accélération de leurs dépenses de consommation (+2,9%, dont +7,3% pour les biens durables) et une nouvelle progression des investissements résidentiels (+6,6%). Depuis le creux atteint en 2011, ces derniers ont progressé de 40%. Ils restent bien sûr inférieurs à leur niveau de 2005 (de 40% environ), mais les données d’enquête, les prix de l’immobilier et, surtout, le redressement de l’emploi militent en faveur de nouveaux gains.
Mercredi, les membres du FOMC ont annoncé qu’ils maintenaient l’orientation de la politique monétaire américaine inchangée. Le communiqué n’a été que marginalement amendé. Le diagnostic relatif au rythme de la croissance est resté le même, avec une « expansion modérée » de l’activité, car « les investissements fixes des entreprises et les exportations nettes sont restés faibles », tandis que la « croissance des dépenses des ménages a été modérée ». L’évaluation des marchés du travail et de l’immobilier a été revue à la hausse d’un cran. Quant à l’inflation, précise le communiqué, elle continue de se situer en deçà de l’objectif de la Fed.
Le grand changement réside dans l’ajout d’un mot. Depuis plusieurs réunions, le texte du communiqué était le suivant : « Le Comité estime qu’il sera approprié de relever l’objectif de taux des fonds fédéraux quand il aura observé une amélioration additionnelle du marché du travail … ». En juillet, le mot « certaine » a été inséré avant « amélioration ». Le débat est vif parmi les observateurs de la Fed sur le sens à donner à cet ajout. Mais, en substance, le message reste le même : la situation économique ne permet toujours pas le remontée des taux, et le diagnostic ne devrait pas changer en septembre. La croissance est toujours aussi molle. Le rythme moyen depuis la fin de la récession a été revu en baisse, à 2,1%. Même avec des estimations prudentes du taux de croissance potentiel, ce chiffre indique un output gap négatif toujours aussi important. C’est ce que confirme l’évolution des prix. Au deuxième trimestre, l’indice des prix « market-based » des dépenses de consommation privée a enregistré une nouvelle baisse de 0,1% en glissement annuel, sur fond de net ralentissement des prix des services, dont le rythme de hausse est passé de 2,3% en moyenne en 2013-2014 à 1,8% au T2 2015.