par Philippe Waechter, Directeur de la recherche économique de Natixis AM
Après l’annonce des mesures nouvelles prises par la BCE (lire ici), plusieurs commentaires s’imposent :
• Sur les mesures il n’y a pas de surprises. C’est cohérent avec ce que j’attendais.
• La politique de la BCE sera accommodante au moins jusqu’à la fin 2017. On ne peut exclure qu’elle le reste au delà de cette date si les anticipations d’inflation n’ont pas l’allure souhaitée par la BCE.
• Elles reflètent les limites de la politique monétaire. Même avec une stratégie non-orthodoxe, la BCE n’arrive pas à imaginer que son objectif d’inflation à 2% puisse être atteint avant 2018. Ce sera surement après.
• La BCE ne peut pas faire tout le travail toute seule même si elle met en place les orientations les plus accommodantes. La convergence vers une croissance équilibrée se heurte au caractère unijambiste de la politique économique en zone Euro. La théorie de la politique «économique nous enseigne qu’il faut autant d’instrument que d’objectifs. Il y a deux objectifs : la croissance et l’inflation qui sont tous les deux bien en dessous des attentes mais il n’y a qu’un seul instrument la politique monétaire. Cela ne peut pas fonctionner de façon efficace. Cela inscrit l’économie sur une trajectoire de croissance trop basse pour être compatible avec le plein emploi.
• Il faut une politique budgétaire plus active et plus volontariste pour compléter la politique de la BCE. Ce n’est que dans ces conditions que la croissance pourra être forte et durable.
• D’ailleurs Draghi ne dit pas autre chose lorsqu’il souligne la nécessité d’une reprise plus robuste pour créer des pressions nominales et permettre à l’inflation de converger vers 2%.
• C’st ici que l’on mesure le désarroi que l’on pouvait lire sur le visage de Draghi pendant la conférence de presse. Il met en place des mesures de grande ampleur mais sans que le résultat soit aussi robuste que souhaité.
• Pourtant la stratégie de la BCE a fonctionné car les taux d’intérêt sont bas et pas très volatils, la fragmentation financière s’st réduite et le crédit repart. Tout cela est lié à la politique de la BCE. Le reste c’est à dire le comportement des acteurs de l’économie n’est pas directement lié à des questions monétaires même si elles sont majeures. LE QE a fonctionné mais il manque d’efficacité sans soutien budgétaire.
• Draghi reste dans le cadre qu’il avait dessiné à Jackson Hole en 2014 lorsqu’il évoquait la nécessité d’une politique budgétaire volontariste à l’échelle de la zone Euro. Cela lui avait valu les foudres d’Angela Merkel
• On va disposer d’un cycle plus robuste dans les 2 années qui viennent mais l’on ne peut pas faire l’hypothèse que l’économie aura alors converger vers une trajectoire plus élevé.
• C’est à la fois préoccupant et effrayant car la convergence vers le plein emploi ne se fera pas au risque d’entrainer de l’instabilité politique.