par Emmanuel Auboyneau, Gérant Associé, et Xavier d'Ornellas, Gérant Associé Pôle Gestion Flexible chez Amplégest avec la participation de Jean-Michel Mourette, Economiste (Eureka Finance)
L’économie a ceci de merveilleux qu’une même statistique peut donner lieu à des interprétations très diverses et à des conclusions opposées. Le débat aujourd’hui porte essentiellement sur la croissance mondiale, entre les optimistes et les pessimistes. En Europe, par exemple, les uns parlent de croissance faible, les autres de reprise progressive. Tous ont raison, c’est une question de point de vue. Le premier est négatif, le second encourageant. L’économie n’est pas une science exacte, les économistes se concentrant sur leurs statistiques préférées pour qu’elles correspondent à leur position.
Aujourd’hui le camp des pessimistes prédit une année 2016 difficile, avec des politiques monétaires largement inopérantes, une économie américaine qui perdra de sa vigueur jusqu’à entrer en récession en fin d’année, une Chine plus faible que les chiffres officiels ne l’annoncent, et une Europe enlisée. Les optimistes pensent que, comme dans tout cycle traditionnel, l’économie mondiale progresse de manière satisfaisante. Ils reviennent sur le parcours effectué depuis 2008 et sur les catastrophes évitées. Pour eux les USA sont sur une tendance positive avec des leviers forts, la Chine est en bas de cycle et pourrait rebondir, et l’Europe progresse lentement mais sûrement, avec l’appui indéfectible de la BCE. Chaque camp, pour étayer ses thèses, présente ses propres chiffres : le ralentissement industriel et l’inflation (la déflation plutôt) pour les pessimistes, les créations d’emplois, l’immobilier et les services pour les optimistes. Chacun ajustera ensuite ses positions et ses prévisions au fur et mesure que le scénario se déroule.
Chez Amplegest nous avons bâti une matrice macro économique qui nous donne une vision moins statique sur les principales zones dans le monde. Cette matrice nous sert de boussole (ou de point de vue) à tout moment dans nos analyses. Elle ne laisse que peu de prise aux interprétations. Elle nous indique que la croissance mondiale est modérée mais que, dans la plupart des zones, les perspectives dans le cycle sont plus favorables. Seuls les Etats-Unis se retrouvent à un niveau avancé du cycle. L’Amérique ne pourra plus compter sur le soutien monétaire illimité de ces dernières années par sa Banque Centrale. La remontée prochaine des taux courts est une nécessité pour retrouver des marges de manoeuvre futures. Les Etats-Unis vont connaitre encore au moins une année de croissance soutenue, avant de voir probablement l’économie ralentir progressivement.
Notre matrice nous indique que les autres zones économiques sont au début du cycle de croissance. L’Europe voit son économie s’améliorer au fil des mois. Les contrastes sont importants entre les différents pays, mais la progression est réelle pour l’ensemble de la zone. Les décisions supplémentaires qui viennent d’être annoncées par la BCE (baisse du taux de dépôt à -0,3%, extension dans le temps du programme d’achat jusqu’à au moins mars 2017) vont contribuer à ce redressement économique. En Chine l’économie atteint son point bas du cycle, période généralement propice pour mettre en place des mesures de relance et démarrer une politique monétaire accommodante. Les autorités sont déjà à la manoeuvre, au travers d’une baisse de la fiscalité de l’automobile, d’une baisse des réserves obligatoires, d’un repli du prix des carburants et d’une diminution des taux.
Cette matrice que nous avons bâtie est le gage de la cohérence dans la durée de nos analyses économiques. Après nous avoir donné un signal positif sur les Etats-Unis depuis 2010, elle nous a permis de sous pondérer les marchés américains depuis un an, au profit de l’Europe et du Japon. Elle nous indique aujourd’hui un cadre plutôt favorable pour 2016, avec toujours une préférence pour les pays en début de cycle économique.