par Sebastian Radcliffe, Gérant du fonds Jupiter North American Equities chez Jupiter AM
La première hausse des taux américains depuis 2006 arrive sans doute un peu tard, mais elle devrait malgré tout permettre d’enrayer le désamour qu’ont connu les actions value dernièrement.
La Réserve Fédérale a finalement remonté les taux par rapport aux niveaux d’urgence mis en place en décembre 2008, en pleine crise financière. En 2016, le marché restera très attentif aux prochaines décisions de la Fed. Bien qu’une augmentation de 25 points de base soit relativement faible, elle n’en est pas moins symbolique.
Le resserrement de la politique monétaire marque la fin de presque 10 ans d’une sorte « d’incontinence » monétaire qui a encouragé une prise de risque excessive sur les marchés de capitaux mondiaux et un vaste carry trade sur les marchés émergents, tout en réduisant les sources de revenus des retraités. De plus, cette remontée des taux est selon nous arrivée tardivement étant donné l’amélioration du marché du travail américain, avec un taux de chômage sous les 5% depuis quelques mois – il ne s’agit plus d’une économie en difficulté.
Même si les déclarations de Janet Yellen lorsqu’elle a monté les taux se sont voulues conciliantes, les graphiques illustrant les attentes du Federal Open Market Committee (FOMC, i.e. le Comité fédéral d'open market qui fixe les objectifs de taux) montrent une remontée des taux bien plus significative d’ici 24 mois. Ce resserrement monétaire est bien évidemment risqué et inévitablement, des critiques s’élèveront pour dire que cette manière de procéder était une erreur. Par exemple, le marché américain des obligations à haut rendement est sous pression et la dette des marchés émergents libellée en dollars est toujours en surabondance. Une aggravation de ces difficultés pourrait avoir de sérieuses conséquences sur l’économie américaine.
Le fonds Jupiter North American Equities est un fonds géré relativement prudemment, avec une stratégie value. Nous n’investissons dans une valeur que si nous estimons que sa valorisation comporte une marge de sécurité. La politique financière répressive de la Fed a provoqué au sein de la cote un décalage entre les actions high growth (ou « glamour ») et les actions value, « mal aimées ». La dernière partie du rallye actuel s’est avérée douloureuse pour les gérants qui cherchent à investir avec une marge de sécurité, comme nous avec ce fonds. Même si nous ne nous attendons pas à un repli marqué du marché, la hausse des taux pourrait faire office de catalyseur pour un changement de tendance, accélérant un réajustement des valorisations dans des secteurs où certaines valeurs ont profité de manière disproportionnée des faveurs du marché.
Dans cet environnement complexe, nous restons disciplinés, cherchant à ne pas surpayer nos investissements et sommes à la recherche de poches value dans des secteurs tels que les grandes entreprises financières. Un quart du portefeuille est à l’heure actuelle investi dans des financières américaines, secteur dans lequel nous continuons de trouver des entreprises sous-valorisées et qui pourraient tirer profit d’une hausse des taux, qui sont à la fin de leurs cycles baissiers et dont la valorisation flirte avec des niveaux historiquement basse.