par Hélène Baudchon, Economiste chez BNP Paribas
• Les enquêtes sur le climat des affaires laissaient entrevoir de nouveau un bon chiffre de croissance au premier trimestre 2017, similaire voire supérieur à celui du quatrième trimestre 2016 (0,4% t/t).
• Mais les données mensuelles d’activité, disponibles jusqu’en février, ont été médiocres.
• Le risque qui entoure notre prévision de croissance de 0,4% t/t au premier trimestre est désormais à la baisse.
Jusqu’alors assez forte, la présomption d’un bon chiffre de croissance au premier trimestre 2017, similaire à celui du quatrième trimestre 2016 (soit 0,4% en rythme trimestriel), est désormais sur la sellette : elle reste étayée par les résultats favorables des données d’enquêtes, et plus particulièrement celles sur le climat des affaires, mais pas par les données mensuelles d’activité, à la peine.
S’agissant des enquêtes tout d’abord (disponibles jusqu’en mars), l’indicateur synthétique du climat des affaires de l’INSEE atteint 104 en moyenne sur le premier trimestre. Il se situe ainsi nettement au- dessus de sa moyenne 100 de référence (elle-même compatible avec un taux de croissance trimestriel de l’ordre de 0,3-0,4%). De plus, il dépasse – légèrement – son niveau moyen du quatrième trimestre 2016 (103), signalant une possible accélération de la croissance entre les deux trimestres. Le signal envoyé par les indices PMI de Markit apparaît plus positif encore. L’indice composite a, en effet, grimpé de 6,2 points en l’espace de quatre mois. A 57,6 en mars et 55,9 en moyenne sur le premier trimestre, il se situe confortablement au-dessus du seuil critique des 50 délimitant les zones d’expansion de l’activité des zones de contraction. L’ampleur du redressement des PMI interroge toutefois sur ce qui le sous-tend et le crédit qu’il faut lui accorder. La même dynamique n’étant pas observée du côté des autres enquêtes sur le climat des affaires, il nous semble être le fruit d’un effet de rattrapage, plus que le signe d’une amélioration fondamentale, sous-estimée, de la situation économique.
Une amélioration que ne retracent d’ailleurs pas les données mensuelles d’activité disponibles pour les mois de janvier et février. Leur évolution vient, au contraire, ternir le tableau conjoncturel, à tout le moins brouiller le message. Les dépenses de consommation des ménages en biens (c’est-à-dire énergie plus produits manufacturés) portent la trace des à-coups subis par les dépenses d’énergie (+5,1% m/m en janvier, -11% m/m en février), eux-mêmes occasionnés par les fortes variations de températures : le mois de janvier, le plus froid depuis 2010, a été suivi du mois de février le plus chaud depuis 2007. Mais il faut aussi savoir que la hausse puis la baisse de la consommation totale de biens (+0,6% m/m en janvier, -0,8% m/m en février) masquent une évolution en sens inverse des achats de produits manufacturés (-0,2% m/m en janvier, +1,3% m/m en février), avec un effet amortisseur sur le total.
L’histoire est à la fois similaire et différente du côté de la production industrielle, avec un bilan plus négatif. En effet, les conditions climatiques ont impacté de la même manière la production d’énergie (+4,6% m/m en janvier, -7,9% m/m en février) mais la production industrielle a baissé les deux mois (de -0,2% m/m et -1,6% m/m, respectivement) : en janvier, parce que la baisse de la production manufacturière (-0,9% m/m) l’a emporté sur la hausse de la production d’énergie; en février, parce que la production manufacturière a accusé une nouvelle baisse (-0,6% m/m) cumulée à celle de la production d’énergie. Le recul de la production manufacturière est généralisé à quasiment tous les secteurs d’activité. Cela renforce le résultat négatif d’ensemble mais laisse aussi entrevoir un rebond technique marqué en mars.
Les données mensuelles du commerce extérieur sont également contrastées : les exportations (+1,6% m/m en février après -7,6% m/m en janvier) portent la trace des à-coups sur les livraisons d’airbus (le chiffre exceptionnellement élevé de décembre 2016 a été suivi d’un violent contrecoup en janvier et d’un modeste retour à la tendance en février) ; les importations (-2% m/m en février après +3,3% m/m en janvier) portent quant à elles la trace d’un approvisionnement exceptionnel, en janvier, de produits pharmaceutiques en provenance d’Autriche.
Ces résultats plutôt médiocres côté activité pèsent plus lourdement dans la balance que les résultats favorables des enquêtes : le risque qui entoure notre prévision de croissance de 0,4% t/t au premier trimestre est désormais à la baisse et non plus à la hausse comme suggéré par les enquêtes. Notre modèle nowcast basé sur les données d’activité estime, en effet, à 0,2% t/t la croissance au premier trimestre contre 0,5% t/t sur la base des données d’enquêtes. A titre de comparaison, l’INSEE table sur 0,3% t/t ainsi que la Banque de France dorénavant, qui a abaissé sa prévision de 0,1 point lors de son actualisation en mars.