par Laurent Berrebi, directeur des études économiques de Groupama AM
Après une baisse limitée en T2, le PIB devrait se stabiliser en T3, avant d’augmenter sur un rythme de 1 à 1,5% en T4, sous l’impact des dépenses publiques. Les dépenses publiques sont en effet en grande partie responsables de l’amélioration du sous-indice nouvelles commandes de l’indice ISM manufacturier comme des réductions d’emplois nettement moindres qu’anticipées (350 000 au lieu de 450 000) : 112 Md$ des 787 Md$ du plan de relance ont déjà été alloués depuis que le plan a été signé.
Cependant, l’absence de retournement des profits des entreprises écarte toute reprise de l’investissement. La poursuite de la hausse du taux d’épargne des ménages américains déjà à 5,7% empêche tout redémarrage de la consommation qui devrait se stabiliser.
Enfin, la forte hausse des défauts du côté des ménages et des entreprises se poursuivra jusqu’à la fin de l’année : le taux de saisies immobilières remonte très fortement en T1 alors que les défauts sur crédits hypothécaires concernent plus de 9% de la masse de crédits hypothécaires, soit environ 1100 Md$ dont la moitié se trouve dans le bilan des banques. Il est à craindre que la remontée des taux hypothécaires, de 4,8% à 5,6%, mette en péril toute stabilisation du marché de l’immobilier et que la hausse des taux sur les marchés du crédit ne pénalise de nouveau les entreprises. Le stress sur le système financier devrait alors augmenter dans les prochains mois et pourrait remettre en cause le retour à la croissance.
Zone euro : pas de sortie de récession en vue, un système financier allemand inquiétant
Le PIB s’est effondré de 2,5% en T1 2009 après -1,6% en T4 2008. La chute du PIB touche tous les grands pays : la France (-1,3%), l’Espagne (-1,9%), l’Italie (-2,5%), l’Allemagne (-3,8%). Comme au trimestre précédent, la demande intérieure finale a retiré 1,1% au PIB, en raison de la chute de l’investissement. Ce plongeon plus marqué du PIB provient non pas de l’extérieur qui a retiré 0,4 point de croissance au lieu d’1 point, mais du début de l’ajustement des stocks qui ont cette fois réduit la croissance d’1 point après l’avoir augmentée de 0,3 point. Les indicateurs avancés indiquent un affaiblissement des forces récessives, mais cette amélioration demeure fragile en raison notamment de la détérioration structurelle de l’économie allemande.
L’Allemagne est très en retard dans l’ajustement des stocks et de l’emploi comme l’indique l’effondrement de la productivité horaire de 5% sur un an, du jamais vu depuis l’après seconde guerre mondiale. Les profits s’écroulent de 30% sur un an, retrouvant leur niveau de 2005, entraînant la chute des dépenses d’investissement des entreprises de 20%. La situation financière des entreprises allemandes redevient alors catastrophique : elle devrait conduire à des faillites très importantes, de nature à déclencher une nouvelle crise bancaire, susceptible de déstabiliser l’ensemble de l’économie européenne. Les pressions déflationnistes déjà visibles dans les chiffres sortis ce mois-ci devraient s’accentuer.
Japon : d’autres baisses du PIB à attendre
Après une baisse record de 16% en rythme annualisé au T1 2009, le PIB devrait sensiblement réduire son rythme de contraction à partir du T2. Mais la récession n’est pas terminée, la hausse de la production industrielle devant faire long feu. En effet, l’ajustement des stocks reste à faire au vu de la poursuite du restockage en T1. De plus, la nouvelle baisse des exportations indique un commerce mondial toujours en panne : notamment, la croissance chinoise est actuellement le fait de dépenses publiques et non d’une reprise de ses échanges extérieurs, qui tirent traditionnellement les exportations japonaises. Les pressions déflationnistes et la faiblesse du taux d’utilisation des capacités pèseront durablement sur les profits des entreprises. Le marché du travail en sera fortement affecté, ce qui pèsera sur la consommation. Enfin, pour l’heure il n’ya aucun signe de reprise de l’investissement en structure. Ainsi, le Japon s’enfonce dans la déflation. A Tokyo, le taux d’inflation sous-jacente annuelle (hors énergie et hors alimentation) est tombé à -0,9% en mai. Cependant, le nouveau plan de relance de 15 billions de yens, soit 3% du PIB, devrait permettre de retrouver le chemin de la croissance à partir du T4 2009. Et si ce plan n’était pas suffisant, la situation d’excès d’épargne privé au Japon autorisera la future administration à mettre en place d’autres relances budgétaires après les élections de cet automne.