par Michael J. Bazdarich, Economiste chez Western Asset (filiale de Legg Mason)
Plusieurs décideurs de la Réserve fédérale (Fed) s’attendent à ce que l’inflation aux États-Unis accélère en 2018, en ligne avec le consensus des analystes. Au cours des années précédentes, ces mêmes personnes avaient également prédit une hausse de l’inflation qui ne s’est jamais matérialisée et nous pensons qu’il est peu probable que cela soit le cas en 2018.
Nous considérons que l’économie américaine vit une période plus favorable que ne l’indiquent nos collègues et concurrents. Nous sommes également en désaccord avec l'idée largement répandue selon laquelle le projet de loi fiscale récemment adopté aura un effet inflationniste. Cependant, nous réfutons surtout que la politique de la Fed a été propice à une hausse de l’inflation.
Les prévisions de retour de l’inflation ne viennent pas de nulle part. Cela résulte de politiques monétaires expansionnistes excessives, générant une croissance des dépenses nominales (en dollars) plus rapide que le rythme compatible avec la capacité de croissance de l’économie et les taux d’inflation existants. Si la croissance du PIB nominal n’accélère pas, alors la politique de la Fed ne parvient pas à stimuler l’économie et donc l’inflation.
Expérience actuelle
Il n’y a pas eu d’accélération soutenue de la croissance du PIB nominal au cours des neuf années de la période d’expansion actuelle, si ce n’est le rebond des taux extrêmement bas au creux de la récession à la mi-2009. La croissance du PIB nominal est restée relativement stable, à un taux se situant entre 3 % et 4 % par an. Pendant les phases d’expansion historiques, une croissance du PIB nominal de 3 % à 4 % représentait plutôt une contraction de l’activité que les derniers stades de l’expansion.
Ce taux de croissance faible et stable du PIB nominal montre bien que la politique de la Fed ne parvient pas à stimuler l’économie comme prévu.
Récentes évolutions
Certes, la rumeur court que l’économie se redresse. La croissance du PIB nominal a, en effet, affiché une croissance légèrement supérieure en 2017, avec un taux de 4,4 %. Toutefois, ce dernier reste encore assez faible par rapport aux normes historiques. Difficile de considérer l’accélération de la croissance des dépenses nominales en 2017 comme une réponse durable à la politique de la Fed, étant donné qu’elle semble arriver à l’improviste, sept à dix ans après les dernières baisses des taux d’intérêt pertinents. Il est plus probable qu’elle s’avérera temporaire, tout comme l’ont été les fluctuations similaires en 2012 et 2014.
Et si vous examinez la monnaie et le crédit plutôt que les taux d’intérêt pour jauger la politique de la Fed, le fait est que l’une comme l’autre ont connu un ralentissement de leur croissance au cours de l’année passée. La croissance du total des prêts bancaires a ralenti pour s’établir à 4 % l’année passée, contre 8 % en 2015. La croissance globale de l’endettement des ménages et des entreprises a ralenti de façon comparable. Les tendances monétaires et bancaires suggèrent donc plutôt un ralentissement de la croissance des dépenses et de l’inflation.
Conclusion : une faible croissance des dépenses se traduit par une faible inflation
Je le répète, rien dans la politique de la Fed n’indique une accélération des dépenses nominales cette année. Et si c’est le projet de loi fiscale (ou les efforts de l’administration Trump en matière de déréglementation) qui vous fait penser que l’économie est en plein essor, demandez-vous pourquoi une augmentation de l’offre globale devrait pousser les prix à la hausse plutôt qu’à la baisse.
Quels que soient les effets à court terme sur la croissance du projet de loi fiscale, nous estimons que la croissance des dépenses nominales conservera son rythme mou et stable des neuf dernières années. De plus, nous pensons que la lenteur de la croissance des dépenses continuera à limiter l’inflation. La croyance populaire clame l’inverse à grands cris, et ce malgré des années passées à se tromper. Il est peu probable que 2018 lui donne raison.