par Florent Delorme, Stratégiste chez M&G
La crise du covid-19 a provoqué une accélération du calendrier européen avec un pas supplémentaire vers le fédéralisme. Dans le même temps les USA perdent de leur superbe en raison d’une gestion chaotique de la pandémie, la Chine doit faire face à un front commun sur les questions de Hong Kong et Huawei et enfin le Royaume-Uni est en proie au doute après avoir été durement touché par l’épidémie. N’est-ce pas là le signe d’un renouveau de l’Union Européenne sur la scène internationale au moment où ses principaux concurrents semblent en recul ? Le marché des actions européennes ne va-t-il pas profiter de ces changements ?
Les évènements des derniers mois semblent avoir relancé l’Union Européenne qui jusqu’à présent semblait avancer lentement face à la Chine et aux USA. Il faut mesurer l’importance du chemin parcouru sous la pression de la situation sanitaire. En effet l’Allemagne prend conscience de la fragilité de ses relations avec l’Oncle Sam et l’Empire du Milieu. Berlin s’aperçoit finalement que sa zone d’exportation et d’influence la plus évidente demeure le continent européen. Un basculement de la géopolitique allemande s’est donc opéré ces dernières semaines avec coup sur coup des concessions encore inimaginables il y a quelques mois : soutien monétaire, relance budgétaire, subventions aux pays les plus fragiles sans mise sous tutelle politique et endettement à l’échelle européenne !
C’est tout d’abord la solidarité monétaire qui s’est amplifiée avec un accord tacite des autorités allemandes pour relancer massivement le Quantitative Easing et l’orienter sans restriction vers les pays les plus fragiles comme l’Italie. La validation donnée par le parlement allemand à propos de la pertinence des précédentes opérations non conventionnelles de politique monétaire, à la suite d’une question posée à la BCE par la cour constitutionnelle de Karlsruhe, est un soutien apporté aux programmes actuels de politique monétaire. C’est ensuite un revirement inattendu sur le plan des politiques budgétaires puisque les autorités allemandes ont accepté le principe de déficits très élevés dans tous les pays de l’Union Européenne au mépris des critères de Maastricht. Puis est venue l’annonce de subventions massives à destination des membres les plus en difficulté de l’Union, cette solidarité nouvelle faisant clairement faire à l’Europe un bond vers le fédéralisme. Enfin la possibilité donnée à la commission européenne d’émettre de la dette nous rapproche encore plus de l’avènement d’une union fédérale. Pour couronner le tout, la relance solidaire orchestrée par les autorités du continent est axée sur la transition énergétique et fait de l’Union Européenne la puissance la plus en pointe sur ce sujet désormais centrale dans les relations internationales, tandis qu’au même moment l’Amérique de Donald Trump refuse d’aborder cette problématique.
L’Union Européenne, désormais solidaire et en position de leadership mondial sur la question essentielle du changement climatique, semble donc pouvoir s’imposer comme une puissance stable et visionnaire dans un monde en tourment. Ce basculement n’est pas sans conséquence sur les actifs européens : nombreux sont les investisseurs qui regardent désormais d’un œil favorable les investissements dans la zone euro, en particulier les actions européennes, et la monnaie unique se redresse depuis quelques semaines. N’est-ce pas le moment d’accorder une place de choix aux actifs européens dans une allocation ?