On aurait tort de s’emballer : l’embellie boursière observée depuis la fin du mois de mai ne signe pas la fin de la crise économique en Europe.
On aurait tort de s’emballer : l’embellie boursière observée depuis la fin du mois de mai ne signe pas la fin de la crise économique en Europe. Les plus optimistes diront “pas encore”. Les plus pessimistes estiment pensent qu’après un rebond passager les indices risquent de replonger et certains n’excluent que l’on revive la situation de 2003-2004. En France, l’indice CAC 40 pourrait ainsi retomber autour de 2.500 points, selon plusieurs spécialistes des marchés financiers.
Les inquiétudes, on le sait, sont nées de la crise financière de la Grèce qui a vite touché d’autres pays et qui a provoqué une baisse extrêmement rapide de l’euro, contre le dollar en particulier. les efforts désordonnés des différents Etats membres de l’Union européenne pour assainir leurs finances publiques ne convainquent pas les investisseurs internationaux, qui privilégient de nouveau les Etats-Unis et les pays émergents comme la Chine ou le Brésil.
Notons que la croissance du Produit intérieur brut (PIB) devrait se situer à peine au-dessus de 1% cette année dans l’UE alors que le rythme devrait dépasser 3% aux Etats-Unis. Plus fondamentalement, la question est de savoir si l’Europe, qui est un continent vieillissant, est en mesure de se restructurer afin de renouer avec une croissance économique vigoureuse.
Yves Bonzon, Chief Investment Officer, et Christophe Donay, responsable de l'allocation d'actifs de la banque suisse Pictet & Cie, expliquaient récemment à Paris que l’Europe était en train d’attraper “la maladie japonaise”. Une croissance molle, une dette très élevée, un secteur bancaire pénalisé par des créances douteuses et un appareil productif sclérosé incitant les entreprises à s’installer hors des frontières : voilà ce qui caractérise l’archipel. L’Union européenne est à peu près dans la même situation à ceci près qu’ici on ne parle pas (encore ?) de déflation et que les banques européennes souffrent de la présence dans leurs bilans d’actifs toxiques achetés avant la crise plus que de créances douteuses d’entreprises.
Il faut toutefois reconnaître qu’en dépit de ses difficultés depuis le début des années 1990, le Japon demeure la deuxième économie mondiale derrière les Etats-Unis. Les grands groupes locaux comme Toyota, Honda, Sony et Toshiba se sont internationalisés à marche forcée pour trouver des relais de croissance. Les entreprises européennes aussi ont acquis des positions mondiales ces dernières années pour pouvoir continuer leur développement.
Tous les économistes le disent : une économie ne peut survivre que si elle innove. Si les grandes entreprises européennes sont en pointe, on ne peut pas dire que les Etats aient déployé des stratégies offensives dans ce domaine. Après avoir mobilisé des dizaines de milliards d’euros pour sauver l’économie en 2008 et 2009, ils cherchent aujourd’hui à se désendetter mais le secteur privé cherche aussi à réduire sa dette. Du coup, l’économie n’a plus de soutien et risque de retomber en récession. Il ne faut pas chercher plus loin pourquoi les marchés financiers traversent des turbulences.
Peut-on sortir de la crise ? Oui mais sans doute pas à court terme. Au lieu de sabrer dans les dépenses à l’aveugle au prétexte de rassurer les agences de notation et, partant, les investisseurs qui leur prêtent de l’argent, les gouvernements devraient réaliser un audit entre les dépenses réellement utiles à l’économie et celles qui peuvent être supprimées. En clair, il faut réduire les dépenses de fonctionnement en modernisant l’Etat et continuer à investir dans des infrastructures de type réseaux de communication en fibre optique tout en prenant garde de ne pas favoriser les seuls fournisseurs de services étrangers.
Pour ce faire, les pouvoirs publics doivent tout mettre à plat. Il faut déterminer quels sont les secteurs industriels dans lesquels le pays a des atouts pour s’imposer sur les marchés internationaux et apporter un soutien financier et politique aux entreprises concernées.
Contrairement à ce qu’on pense souvent, une telle stratégie pourrait séduire les investisseurs. Car les investissements d’avenir généreront des profits et donc des dividendes.