Rendez-vous en terre inconnue

La décision de la Réserve fédérale américaine de lancer un programme de rachat d’obligations d’Etat à hauteur de 600 milliards de dollars d

La décision de la Réserve fédérale américaine de lancer un programme de rachat d’obligations d’Etat à hauteur de 600 milliards de dollars d’ici juin 2011 a provoqué un tir de barrage de la part des autres grandes puissances économiques.

Les critiques estiment qu’on entre en territoire inconnu avec des risques gigantesques.

Cette politique va entraîner une nouvelle baisse du dollar face aux autres monnaies. L'euro a ainsi atteint 1,4282 dollar jeudi, son plus haut niveau depuis le 20 janvier. Et certains économistes pensent que la monnaie unique européenne pourrait très bien aller dans les prochains mois vers 1,60 dollar voire 1,80 dollar.

Mais croire que l’objectif de la Fed avec ce nouveau plan d’assouplissement dit QE (Quantitative Easing 2) est de dévaluer le dollar est de dévaluer le billet vert est naïf. La consommation représente les deux tiers du Produit intérieur brut (PIB) des Etats-Unis et ce pays n’est pas orienté vers les exportations.

La Fed a deux missions : assurer la stabilité des prix et favoriser le plein emploi. L’inflation est sous contrôle : le taux annuel était de 1,4% en septembre. En retirant les composantes volatiles comme l’énergie et l’alimentation, il était à 1,2% contre 1,8% en mars.

En revanche, le taux de chômage est à 9,6% de la population active, un niveau rarement atteint aux Etats-Unis. Le marché du travail est bloqué en raison notamment de la déprime du marché immobilier : la mobilité des travailleurs entre Etats est réduite voire nulle car il faudrait vendre son logement à perte sans être certain d’avoir un crédit pour en acheter un autre ailleurs.

D’où l’intervention de la Fed. Elle avait déjà mis en œuvre un plan de 1.700 milliards de dollars (QE1) en décembre 2008 pour racheter des emprunts d'Etat et des valeurs mobilières adossées à des actifs immobiliers. Mais il s’agissait alors de sauver le secteur financier plus que de soutenir l’économie. De fait, cet argent est resté dans le bilan des banques et leur a permis de continuer à fonctionner et de reconstituer leurs marges.

Le plan QE2 a pour objectif de soutenir l’économie : les établissements financiers sont incités à prêter aux ménages et aux entreprises afin de faire repartir la machine économique.

Un tel plan est relativement inédit et les économistes s’interrogent sur les conséquences : va-t-il réussir ? aura-t-on une hyper-inflation ? que se passera-t-il si le plan ne fonctionne pas ? faudra-t-il un nouveau plan QE3 ?

La vraie question en fait est la suivante : les Etats-Unis ont-ils le choix ? Dans la situation actuelle, ils doivent essayer les mesures les plus originales afin de faire repartir l’économie.

Le président de la Fed, Ben Bernanke, est l’un des meilleurs spécialistes de la Grande Dépression des années 1930 et il sait donc exactement ce qui a marché et ce qui a échoué à l’époque. Par ailleurs, avant de prendre la succession d’Alan Greenspan, il a étudié la situation au Japon, pays qui subit une stagnation avec des périodes de déflation depuis une quinzaine d’années.

Même si les Américains, chauffés à blanc par les mouvements conservateurs peu soucieux de vérité, ne s’en rendent pas compte, l’action combinée de Bernanke et du président américain Barack Obama a permis au pays d’échapper à une nouvelle Grande Dépression. Il s’agit aujourd’hui de franchir une nouvelle étape.

Le nouveau plan peut-il réussir ? Personne ne peut le jurer. Mais tout doit être tenté pour faire redémarrer la première économie du monde. L’avenir de la planète en dépend.