Et si les dirigeants politiques de la zone euro s’astreignaient à une cure de silence de quelques mois ?
Et si les dirigeants politiques de la zone euro s’astreignaient à une cure de silence de quelques mois ? Face aux turbulences sur les marchés financiers, les chefs d’Etat et de gouvernement multiplient les déclarations dans l’espoir de ramener le calme. Or, ils ne se rendent pas compte que leur parole ne pèse d’aucun poids pour des investisseurs qui ne regardent que des éléments objectifs comme l’état des finances publiques et qui ont suffisamment de mémoire pour savoir quel pays est crédible et quel pays ne l’est pas.
Ils se souviennent que le gouvernement grec avait assuré qu’il n’avait pas besoin d’aide avant de signer un accord avec l’Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI) au printemps. Ils ont encore en mémoire les déclarations des responsables irlandais affirmant qu’il n’était pas question de solliciter une aide extérieure.
Le Premier ministre du Portugal vient de répéter que son pays n’avait pas besoin d’aide. Son homologue espagnol se montre tout aussi sûr de lui. Les dirigeants français de même.
Or, comme l’expliquent des investisseurs, ces propos ne servent à rien et relèvent de l’exercice d’auto-persuasion. Si les gouvernements veulent convaincre les marchés financiers de continuer à leur prêter l’argent dont ils ont besoin ils feraient mieux de présenter des programmes d’assainissement de leurs finances publiques.
Au niveau européen, il est crucial aujourd’hui qu’il n’y ait plus qu’un seul porte-parole qui devrait être le président de la Banque centrale européenne (BCE). Les autres intervenants, que ce soit le président de l’Union européenne ou celui de la Commission européenne, n’ont aucune crédibilité auprès des investisseurs internationaux.
Plus problématique est le cas de l’Allemagne. Première puissance économique de la zone et premier bailleur de fonds, elle a adopté une communication déroutante. Elle avait fait comprendre qu’elle ne participerait pas au plan en faveur de la Grèce avant de s’y rallier quelques semaines plus tard, après avoir pris conscience que ses banques étaient exposées. Elle s’est montrée réticente sur l’Irlande et semble adopter une position jusqu’au-boutiste s’agissant du Portugal et de l’Espagne.
Le ministre allemand de l'Economie, Rainer Brüderle, vient de déclarer que le Portugal et l’Espagne n’avaient pas besoin d’aide. Mais dans le même souffle il a assuré qu’on ne pouvait pas exclure qu’un pays de la zone euro fasse défaut sur sa dette. Conclusion logique : il redoute que son pays ait encore à payer. D’où sa mise en garde : les plans de sauvetage nécessitent l’unanimité et ne peuvent être mis en œuvre contre la volonté de l’Allemagne.
Ces propos sont avant tout à destination interne, la population allemande ayant en horreur les pays du « Club Med », ces pays du Sud considérés comme peu dignes de confiance.
Mais qu’un responsable gouvernemental allemand exprime ses réticences publiquement n’est pas fait pour aider dans le contexte actuel. Les investisseurs ne savent plus très bien qui écouter et cette situation favorise les turbulences sur les marchés financiers.
Le mieux serait donc que les dirigeants politiques nationaux se taisent et laissent la BCE piloter les efforts pour ramener le calme dans la zone euro.