par Esty Dwek, Responsable de la stratégie de marchés de Natixis Investment Managers Solutions
Les perspectives de croissance mondiale continuent de s’améliorer, avec l’accélération des vaccinations en Europe, le boom de l’économie américaine et la croissance chinoise toujours en forte hausse. En dépit de confinements prolongés, les données européennes ont été meilleures que prévu et la deuxième moitié de l’année devrait connaître une forte reprise, alimentée par une demande « en attente » et le Fonds de relance européen. Les États-Unis, qui ont quelques mois d’avance en termes de réouverture, continuent de dépasser les attentes, grâce à des mesures plus souples et à un soutien budgétaire massif.
Avec une Réserve fédérale qui réaffirme qu’il est trop tôt pour réduire son soutien, la croissance a libre cours. Alors que la croissance chinoise devrait ralentir par rapport à son récent pic, la croissance de 2021 est toujours attendue autour de 8 % pour l’année, ce qui devrait aider à faire décoller l’Asie. Une vaccination lente dans la région pourrait entraîner certains obstacles, mais les perspectives s’améliorent.
Néanmoins, les anticipations d’inflation se sont stabilisées au cours du mois et les rendements des bons du Trésor se sont repliés, bloquant la reflation. Cela a également été en partie déclenché par la hausse des cas en Inde et par une hausse des cas sur les marchés développés. Toutefois, les cas commençant à baisser, les perspectives de réouverture devraient à nouveau s’améliorer et la reflation devrait reprendre au cours des prochains mois. Nous attendons donc une reprise de la rotation cyclique, avec une progression de l’énergie, des matériaux et des financières. Nous pensons également que l’Europe et le Pacifique hors Japon devraient bénéficier de la réouverture, d’une reprise du commerce mondial et d’une hausse des prix des matières premières.
Dans l’attente du prochain catalyseur – que ce soit la hausse des prix du pétrole, des rendements ou de meilleures nouvelles Covid – nous recherchons des opportunités de renforcer les actions. En effet, le soutien à moyen terme reste inchangé, avec la vaccination, les dépenses budgétaires, les banques centrales accommodantes et le rebond des bénéfices toujours présents. A l’inverse, le sentiment et le positionnement sont déjà très haussiers, et nous gardons un œil pour nous assurer que les investisseurs ne tombent pas dans la complaisance. Pour l’instant, nous pensons que suffisamment d’inquiétudes subsistent, mais un excès d’optimisme est un risque.
Du côté des obligations, même si nous pensons que les mesures de relance budgétaire et les anticipations d’inflation sont déjà largement intégrées dans les prix, et que les rendements ont probablement vu le gros de leur mouvement, nous pensons qu’ils peuvent encore monter à court terme, avant de se replier à nouveau. Ainsi, nous privilégions les durations plus courtes et restons prudents sur les taux souverains. Nous préférons le crédit, même si les spreads déjà serrés et la duration plus longue suggèrent moins de potentiel de hausse. Le high yielddevrait mieux se comporter car il est moins sensible aux taux. Même si les émergents éprouvent souvent des difficultés lors de la hausse des taux américains, ils se trouvent dans de meilleures positions que lors de précédents épisodes et ont géré la récente hausse mieux que prévu. La dette corporate émergente en devise forte a également une plus grande marge de resserrement des spreads et donc un meilleur potentiel d’absorption.
Détails par classes d’actifs
Actions
Avec un pic de cas en Inde et des cas plus élevés en Europe et aux États-Unis, la reflation a marqué le pas ces dernières semaines. Toutefois, nous pensons qu’elle devrait reprendre à mesure que les cas baissent et que l’effort de vaccination continue d’accélérer.
En attendant que le prochain catalyseur déclenche une nouvelle rotation vers les cycliques, nous restons constructifs sur les marchés actions et continuons à « acheter la baisse ». En effet, des soutiens à plus long terme restent en place, d’autant que la Fed a réaffirmé qu’elle n’était pas sur le point de réduire son soutien et que le président Biden cherchait à dépenser des milliards de plus.
Nous anticipons une nouvelle surperformance des secteurs cycliques, avec une préférence pour les financières, l’énergie et les matériaux. Les actions européennes et japonaises devraient également bénéficier de la construction de leurs indices plus axée sur la value. Les matières premières devraient poursuivre leur rebond, avec une forte croissance chinoise et les perspectives de réouverture, et nous pensons que la région développée du Pacifique en bénéficiera en particulier.
Nous gardons un œil sur le sentiment et le positionnement pour nous assurer qu’ils ne deviennent pas trop agressifs et complaisants, car beaucoup de bonnes nouvelles sont déjà intégrées dans les cours. En effet, alors que la saison des résultats du T1 a été très solide jusqu’à présent, les actions n’ont pas autant réagi, suggérant que les prévisions de bénéfices devraient dépasser les estimations, même élevées.
Obligations
Les rendements se sont repliés par rapport à leurs récents points hauts, mais ils devraient remonter à court terme, avec la baisse des cas Covid, l’accélération de la vaccination en Europe et les perspectives de réouverture qui s’améliorent.
Cependant, bien qu’ils puissent évoluer à la hausse dans les prochains mois, nous pensons que l’essentiel du mouvement est probablement derrière nous, une grande partie des prévisions d’inflation et des relances budgétaires étant désormais intégrées. De plus, les plans d’infrastructures de Biden, bien qu’à grande échelle, s’étalent sur 10 ans, suggérant un moindre impact sur la croissance et les anticipations d’inflation pour 2022.
Pour autant, nous privilégions des durations plus courtes et restons prudents sur les dettes souveraines, tant américaines qu’européennes.
La duration plus longue des indices IG et les spreads très serrés suggèrent moins de marge de manœuvre pour absorber les taux plus élevés que ceux du HY, même si nous restons sélectifs compte tenu du risque de défaut persistant.
Nous continuons de voir des opportunités dans la dette corporate des marchés émergents en devise forte, où le portage est attractif et où il y a encore une marge de compression des spreads. Cela devrait également permettre d’absorber la hausse des rendements des bons du Trésor, comme en témoigne la performance supérieure aux attentes du segment ces derniers mois.
Devises
Après avoir amorcé un rebond en début d’année, le dollar s’est replié avec les rendements américains et s’est stabilisé dans une sorte de fourchette avec les principales devises. Alors que la reprise de la réouverture se poursuit, les devises liées aux matières premières et à l’appétit pour le risque devraient en bénéficier, mais nous pensons que l’accélération de la croissance, la hausse des rendements et la poursuite de l’élan budgétaire devraient limiter la faiblesse du dollar.
Matières premières
Alors que les perspectives de réouverture devraient à nouveau s’améliorer, les prix du pétrole devraient remonter étant donné que l’OPEP + maintient ses réductions de la production. Toutefois, cet équilibre est fragile et une offre globalement abondante devrait limiter le potentiel d’appréciation à un moment ou à un autre. Nous anticipons une amélioration de la demande de l’’or avec la réouverture des économies émergentes (induisant une amélioration de la demande physique), des taux réels bas et des anticipations d’inflation à moyen terme, même si elle a marqué une pause pour l’instant.
Stratégies alternatives
Les alternatives continuent d’apporter diversification et re-corrélation aux portefeuilles, un complément bienvenu aux classes d’actifs traditionnelles. Nous pensons que les actifs réels peuvent également aider à générer des revenus dans un contexte plus bas pour le long terme.