par Eric Vergnaud, économiste chez BNP Paribas
Le ralentissement de la reprise mondiale semble se confirmer. Ainsi, les "indicateurs composites avancés" de l’OCDE pour mai restent cohérents avec la poursuite de la croissance mais à un rythme plus modéré que lors du mois précédent, pour la dixième fois de suite. Selon l’Organisation, les situations nationales sont diverses : le pic de la reprise pourrait être atteint à l’horizon des six prochains mois en France, en Italie, en Chine et en Inde, alors qu’il ne semble pas se profiler pour l'Allemagne, le Japon et les Etats-Unis, même si la croissance peut légèrement ralentir au cours des prochains mois.
Aux Etats-Unis, c’est précisément le message délivré par les enquêtes auprès des entreprises, avec un tassement prévisible de la croissance, qui s’amorcerait au début du second semestre.
Toutefois, l’inflexion serait très modérée et n’engagerait pas l’économie américaine sur la voie d’une rechute marquée de l’activité (« double dip »). Le léger ralentissement de l’activité trouverait essentiellement sa source dans une contribution beaucoup plus limitée du cycle des stocks à la croissance. Le PIB américain pourrait cependant progresser de presque 3% tant cette année qu’en 2011. Toutefois, cet environnement conjoncturel un peu moins favorable que précédemment anticipé conjugué au repli de l’inflation qui est appelé à se poursuivre ne peut qu’inciter la Réserve fédérale à conserver une politique monétaire extrêmement accommodante au moins jusqu’à la fin de l’année prochaine.
Dans la zone euro, également, la politique monétaire va demeurer extrêmement accommodante au cours des prochains mois. La BCE va continuer de fournir l’Eurosystème en liquidités à taux fixe et pour des montants illimités au travers de ses opérations de refinancement hebdomadaires, à un mois et à trois mois, au moins jusqu’à la fin de septembre. A cet horizon, la liquidité devrait rester relativement confortable par rapport aux besoins, ce qui permettra aux taux de marché de très court terme de demeurer bas. Toutefois, la duration de la liquidité va continuer de raccourcir (c’est d’ailleurs un des objectifs de la BCE) avec l’arrivée à échéance des opérations de refinancement à six mois et à douze mois. Par conséquent, des tensions sur les maturités supérieures à trois mois sont prévisibles (voir « BCE : gestion des liquidités », EcoWeek 10-26 du 2 juillet 2010).
La fourniture de détails sur les tests de résistance (stress tests) menés par 91 banques de l’Union européenne a contribué à diminuer le stress sur les marchés financiers. Les résultats seront publiés le 23 juillet, sur une base agrégée, mais également banque par banque. Les établissements du panel représentent 65% des actifs bancaires de l’UE (ratio proche de celui atteint lors des stress tests menées sur le secteur bancaire américain) et dans chaque pays, ils couvrent au moins 50% du secteur en termes d’actifs. Les résultats pourraient permettre aux intervenants de discriminer entre banques, autorisant une certaine normalisation des transactions interbancaires entre les établissements qui apparaîtront comme les plus solides.
Récemment, les interrogations des investisseurs sur la reprise américaine ont progressivement primé sur les incertitudes européennes et la baisse de l’euro contre dollar a marqué une pause. Après être tombée sous 1,20 au début de juin, la parité EUR/USD est repassée au-dessus de 1,25 au début de juillet.
Toutefois, le recul de l’euro pourrait reprendre à relativement court terme. La persistance très probable de tensions sur la dette souveraine des pays périphériques de l’UEM devrait continuer de peser sur les investissements en euros. Par ailleurs, la monnaie européenne devrait de nouveau souffrir des écarts de croissance entre les Etats-Unis et la zone euro, où la progression du PIB devrait s’inscrire entre 1% et 1,5% en 2010, puis probablement sous 1% en 2011, les mesures de consolidation budgétaire freinant considérablement la demande intérieure. Dans ces conditions, l’euro repasserait sous 1,20 dollar avant la fin de l’été.
Au Royaume-Uni, la formation du nouveau gouvernement et la présentation du budget extraordinaire ont permis la levée des incertitudes au, ce dont a profité le sterling tant vis-à-vis du dollar que de l’euro. Toutefois, ces effets d’annonce ont commencé à se dissiper et la livre devrait reprendre sa baisse contre le dollar et l’euro. Le caractère procyclique des mesures de consolidation budgétaire fait peser un risque substantiel sur la croissance britannique, au moment même où la reprise mondiale commence à montrer des signes d’essoufflement.
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