par Hélène Baudchon, Olivier Bizimana et Isabelle Job, économistes au Crédit Agricole
L’été va être rythmé par quelques temps forts économiques ou financiers. Du côté de la conjoncture, la publication des chiffres de PIB du deuxième trimestre devrait conforter l’idée d’une solide reprise au premier semestre. Les enquêtes de confiance à paraître donneront, quant à elles, le ton pour la deuxième partie de l’année avec un essoufflement probable de l’activité, mais sans rupture. Côté financier, l’actualité sera dominée par les résultats des stress tests des banques européennes et par l’examen de passage trimestriel auquel doit être soumis le plan triennal grec.
Le risque de rechute en récession de l’économie mondiale, le célèbre double-dip, va vraisemblablement rester au centre des préoccupations cet été. Notre scénario table sur un enclenchement naturel des différentes étapes de la reprise. La première phase d’accélération, liée au redémarrage mécanique et assez rapide de l’activité, lui-même aidé par l’action volontariste des pouvoirs publics, va selon nous laisser progressivement place à une phase de consolidation caractérisée par une croissance ralentie, plus en ligne avec les fondamentaux économiques, mais aussi plus autonome et donc plus solide. Il faudra donc être particulièrement attentif aux données d’enquêtes à paraître au cours de l’été, dont les composantes avancées devraient signaler un essoufflement de la croissance en deuxième partie d’année sans toutefois indiquer une rupture au point d’entrevoir un retour en récession. Les chiffres de PIB du deuxième trimestre qui vont s’égrener dans les prochaines semaines devraient aussi rassurer les investisseurs quant à la solidité de la reprise à l’œuvre au premier semestre.
Les premières estimations de PIB en zone euro pour le deuxième trimestre seront publiées mi-août. Nous anticipons une nette accélération de l’activité dans l’ensemble de la zone euro (+0,5 % t/t, après +0,2 % au T2), en ligne avec les résultats des enquêtes de conjonctures et les données d’activité. Au sein des principales économies, l’Allemagne devrait enregistrer la meilleure performance, avec une croissance du PIB de l’ordre de 0,9 % t/t (après +0,2 % au T2). La croissance française accélérerait, mais plus modérément (+0,3 % t/t, après +0,1 % t/t). L’activité espagnole devrait, quant à elle, enregistrer un rebond temporaire (+0,3 % t/t, après +0,1 % t/t), les ménages ayant avancé leur consommation en anticipation de la hausse du taux de TVA en juillet. En revanche, la croissance du PIB italien devrait ralentir (+0,2 % t/t), après le rebond du premier trimestre.
Les enquêtes de confiance attendues cet été devraient conforter notre scénario central pour le second semestre. Nous prévoyons une modération de l’activité dans l’ensemble de la zone euro. D’une part, la demande domestique resterait en berne. D’autre part, la demande extérieure resterait certes bien orientée, mais le mouvement de reprise des exportations devrait finir par se tasser. Les incertitudes porteront surtout sur l’ampleur du ralentissement dans les pays du sud de la zone euro, en particulier en Espagne et au Portugal, les mesures d’austérité faisant sentir pleinement leurs effets à la charnière fin 2010-début 2011. En Grèce, la situation devrait sans doute rester difficile, avec un recul toujours marqué de l’activité au second semestre.
Notre prévision actuelle de croissance pour les Etats-Unis pour le deuxième trimestre est de 3,4 % (rythme annualisé, chiffre à paraître le 30 juillet). Mais l’ensemble des informations mensuelles disponibles pointe vers un chiffre d’un point inférieur, du fait essentiellement d’une contribution très négative du commerce extérieur (de l’ordre de 2 points de pourcentage). Si le deuxième trimestre s’annonce décevant, la dynamique de la reprise n’est pas remise en cause et la croissance devrait s’installer sur un rythme de croisière proche de 3 %. D’importantes forces cycliques sont en effet à l’œuvre, le marché de l’emploi se redresse, l’investissement des entreprises est bien orienté et l’impulsion budgétaire est encore positive jusque fin 2010.
L’Europe a deux rendez-vous importants dans les semaines à venir. Le premier avec la publication des résultats des tests de résistance des banques. Les analystes vont scruter à la loupe les hypothèses retenues dans le cadre de cet exercice et seront également attentifs aux fragilités bilancielles qui pourraient être révélées. En cas de doute sur la résistance du secteur bancaire européen face à des chocs extrêmes, de nouvelles tensions sur le marché interbancaire sont prévisibles. La BCE pourrait au besoin décider de réactiver ses mesures non conventionnelles de gestion de la liquidité en conduisant quelques opérations de refinancement illimitées à taux fixes, sur des maturités plus longues (six, voire douze mois). De plus, l’Europe devrait finir par acter du fait que le Fond Européen de Stabilisation Financière (FESF) pourrait servir à recapitaliser le système bancaire par l’entremise des Etats.
La mission de suivi FMI/BCE/CE du plan triennal grec qui débute le 24 Juillet est l’autre rendez-vous important. A supposer que les efforts budgétaires consentis par la Grèce soient validés, cet examen de passage ne devrait être qu’une formalité et donner lieu au déblocage en septembre de la deuxième tranche d’aide de 9 Mds €. Toute rumeur laissant penser que l’accord financier tripartite est compromis pourrait en revanche dégénérer en vent de panique sur les marchés avec une explosion des spreads sur les obligations des Etats jugés à risque. Ce scénario alternatif est loin d’être le plus probable et dans tous les cas l’incendie devrait pouvoir s’éteindre de lui-même, avec la communication d’un avis favorable de la part de la mission de contrôle.
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