par Bei Xu, économiste chez Natixis
Nombre d’indicateurs macroéconomiques montrent que l’économie chinoise est en train de ralentir. Le taux de croissance de la production industrielle en glissement annuel est en baisse continue, il passe de 18,1% en février à 13,4% en juillet ; l’investissement en actifs fixes dans les zones urbaines enregistre une évolution similaire, son taux de croissance passant de +33,3% en septembre 2009 à +24,9% en juillet ; au niveau du commerce extérieur, la même tendance baissière s’observe, notamment pour les importations qui passent de +85,9% en janvier à +22,7% en juillet. La plus « mauvaise » nouvelle vient de la publication du PMI manufacturier de juillet ressorti en-deçà de 50 (49,4).
Il est vrai que ces statistiques ont créé un sentiment de pessimisme sur les marchés au sujet de l’économie chinoise, devenue au deuxième trimestre 2010 la deuxième puissance mondiale en termes de PIB nominal, dépassant l’Allemagne (dès 2009) en tant que première puissance commerciale : ses exportations et importations représentent respectivement 9,7% et 8,1% du total mondial. Vu son poids dans l’économie mondiale, les marchés peuvent donc paraître légitimement inquiets d’un ralentissement chinois.
Nous ne sommes pas surpris par ce ralentissement qui a débuté au deuxième trimestre 2010 et que nous avions déjà intégré dans nos prévisions :
- La Chine a fortement rebondi au lendemain de la faillite de Lehman, grâce au plan de relance budgétaire et à une politique monétaire accommodante. Les statistiques en glissement annuel étaient donc aussi excellentes. Aujourd’hui, on assiste au fur et à mesure à un effacement de l’effet de base qui, mécaniquement fait baisser les taux de croissance en GA.
- Les autorités chinoises ont procédé à une série de mesures afin d’éliminer les surcapacités de production, notamment les capacités polluantes et non efficientes. En raison du poids de l’industrie lourde dans la statistique officielle de production industrielle (plus de 70%), la baisse de cette dernière est principalement expliquée par ces mesures.
- Les mesures restrictives dans l’immobilier à partir d’avril ont suscité beaucoup d’interrogations sur la croissance. Les effets négatifs, si ces mesures sont maintenues, devraient se refléter sur le chiffre de l’investissement, et donc sur la croissance, avec un décalage de 6 mois.
Ces derniers chiffres peuvent paraître inquiétants dans un environnement de faible croissance mondiale. Nous pensons toutefois qu’un excès de pessimisme est à l’origine du passage du PMI manufacturier en-deçà de 50 en juillet1. Quand on lit les statistiques de consommation d’électricité dans l’industrie, celles-ci ont certes baissé jusqu’à +14% en juillet en GA, mais à ce niveau, l’indice PMI manufacturier se situe historiquement plutôt dans la fourchette [52, 54].
Notre opinion sur la croissance de l’économie chinoise est la suivante : un ralentissement de la croissance est programmé, mais il va s’agir d’un soft landing. Certains signes positifs sont en effet déjà présents :
- Les ventes au détail se situent toujours autour de +18% en GA. Même si elles ne représentent pas exactement la consommation des ménages, leur dynamique montre au moins que la consommation des ménages progresse d’une manière stable et satisfaisante.
- La production industrielle hors industrie lourde croît toujours à un rythme proche de +25% en GA.
- L’investissement privé commence à prendre de plus en plus d’importance dans le total de l’investissement : aujourd’hui il en représente 58,7%. Quand les mesures interdisant les capitaux privés dans certains secteurs seront levées, l’investissement privé apportera encore plus de soutien à la croissance.
NOTES 1 L’indice PMI manufacturier de HSBC du mois d’août est revu à la hausse jusqu’à 51,9.