Actions, un rebond spectaculaire avant un été incertain

par Nicolas Gazin, Global Head of Equity Solution et Laura Courieras, Equity Portfolio Manager, Indosuez Wealth Management

Les marchés actions ont effacé leur correction printanière, portés par une stabilisation des données macroéconomiques et un sentiment de marché redevenu plus optimiste, notamment grâce à l’apaisement temporaire sur le front commercial. Mais à l’approche de la saison estivale, le manque de visibilité politique et le regain des tensions au Moyen-Orient pourraient engendrer une reprise de la volatilité, dans un marché parfois marqué par des volumes plus faibles.

EUROPE 

La région bénéficie d’un environnement structurel en amélioration, avec une politique monétaire plus accommodante (assouplissement attendu de la BCE), des plans de relance budgétaire importants et une prime de valorisation toujours attractive, notamment en relatif au marché américain. Des conditions financières plus favorables couplées à une volonté politique marquée et assumée pour une souveraineté européenne devraient être favorables aux entreprises domestiques.Alors que les petites et moyennes capitalisations ont connu leur plus longue période de sous performance relative en 25 ans, affectées par l’inflation, la guerre en Ukraine, la désorganisation des chaînes logistiques et la faiblesse du moteur allemand. Désormais, la combinaison d’un soutien fiscal équivalent au plan Marshall (près de 1000 milliards d’euros en 10 ans) et de baisses d’impôts prévues dès 2028 constituent des catalyseurs significatifs pour le segment.

En outre, le positionnement sur les actions européennes, notamment les petites capitalisations, reste encore faible, alors que le risque de récession s’éloigne et que l’activité des fusions acquisitions repart à la hausse. La croissance des bénéfices pour les petites entreprises est également attendue en hausse pour 2026 (+14,5 %) soit près du double de la croissance anticipée sur les grandes capitalisations (graphique 3). Dans un contexte géopolitique incertain, le segment bénéficie désormais de moteurs de soutien plus structurels sur un horizon moyen terme, avec un potentiel de revalorisation attractif.

ÉTATS-UNIS 

Depuis mi-avril, les marchés américains ont connu un rebond fulgurant, portés notamment par ce que les analystes surnomment le «TACO Trade»[1] — l’idée que Donald Trump finit souvent par faire marche arrière sur ses menaces. Ce phénomène a ravivé l’optimisme des investisseurs, malgré les incertitudes géopolitiques et commerciales persistantes.

La hausse du marché a également été portée par des résultats d’entreprises solides, notamment dans le secteur technologique et le soutien implicite du projet de loi « One Big Beautiful Bill Act » (en français: Grande et belle loi), bien que celui-ci doive encore être approuvé par le Congrès. Ce dernier propose une baisse d’impôts pour les entreprises et une augmentation substantielle des dépenses militaires et d’infrastructures, qui devraient profiter au secteur industriel et aux entreprises domestiques américaines.

Néanmoins, en toile de fond, les tensions politiques restent élevées. Trump a récemment suspendu certains droits de douane, mais le niveau global reste historiquement haut, posant un risque stagflationniste pour les États-Unis. Enfin, les publications de résultats des entreprises pour le premier trimestre ont dépassé les attentes (+12 % en glissement annuel), mais les perspectives sont prudentes et les révisions à la baisse des bénéfices par action se poursuivent. À 22 fois les bénéfices futurs pour l’indice S&P 500, les valorisations restent élevées par rapport à leurs moyennes historiques.

ASIE 

Le recul du dollar et la revalorisation des anticipations de politique monétaire de la Fed ont bénéficié aux marchés émergents. L’Asie, hors Chine, reste attractive en termes de perspectives économiques et de valorisation, notamment pour l’Inde où les fondamentaux sont plus solides et la croissance plus lisible. En Chine, malgré un rebond récent des actions, les incertitudes tarifaires persistent et les mesures de relance se font toujours attendre, limitant à court terme la soutenabilité de la reprise. Le Japon, quant à lui, reste très sensible à l’environnement commercial mondial. L’appréciation du yen liée à un discours plus prudent de la Banque du Japon pèse sur les exportateurs. Cependant, les valorisations sont redevenues attractives, en particulier dans le secteur bancaire, qui pourrait redonner de l’élan au marché.

STYLES D’INVESTISSEMENT 

Le retour de la prudence estivale amène souvent à une hausse de la volatilité durant l’été, ce qui pourrait redonner de l’attrait au style Qualité et aux valeurs défensives, notamment après le rebond considérable des valeurs de Croissance américaines. Malgré des révisions bénéficiaires plus résilientes sur les valeurs de Croissance, le style Value continue de bénéficier du cycle de normalisation des politiques monétaires et d’un soutien budgétaire plus marqué en Europe. Les valeurs défensives, qui ont sous-performé pendant le rebond, pourraient redevenir attractives si les taux longs venaient à monter pour de mauvaises raisons (glissement fiscal) ou l’activité économique à ralentir à nouveau. Au final, l’été pourrait offrir des opportunités pour les investisseurs actions