Dix ans pour sortir de la crise ?

Le gouverneur de la Banque de France, le très prudent Christian Noyer, vient de lancer une prédiction qui a peu de chance de faire remonter le moral des Français : selon lui, p

Le gouverneur de la Banque de France, le très prudent Christian Noyer, vient de lancer une prédiction qui a peu de chance de faire remonter le moral des Français : selon lui, pour sortir de la crise qui a débuté en 2008, “il faudra pas mal d'années, peut-être entre cinq ans et dix ans probablement” de gestion rigoureuse des finances publiques.

“Sinon, si on veut le faire très très vite, là on peut avoir un effet négatif sur la croissance, il faut le faire progressivement, ça prendra au moins cinq, six ans”, a-t-il expliqué.

Même si cette déclaration peut étonner de la part d’un membre du conseil de la Banque centrale européenne (BCE), dont le leitmotiv est de ne jamais décourager les citoyens afin de ne pas peser sur la consommation et donc sur la croissance, elle a le mérite de situer les enjeux.

Rappelons que la crise de 1929 a duré jusqu’à la Seconde guerre mondiale (et l’indice Dow Jones n’a retrouvé son niveau d’avant le Krach qu’en …1954). La crise que nous traversons n’est pas comparable car à l’époque les banques centrales avaient fermé les robinets de crédit, ce qui avait provoqué des faillites en chaîne avec une montée vertigineuse du chômage. En outre, les économies étaient essentiellement nationales alors que nous vivons désormais dans une économie globalisée.

Pour autant, la crise actuelle, comme celle de 1929, est liée à l’endettement et a donc une origine bancaire. Et chacun sait qu’une crise d’origine bancaire se transforme rapidement en crise économique du fait de la position centrale des banques dans le système économique. C’est la raison pour laquelle les Etats occidentaux ont tout fait pour sauver le système bancaire, quitte à augmenter vertigineusement le niveau de la dette publique, qui se rapproche voire dépasse le niveau de la production annuelle de la richesse nationale dans de nombreux pays.

C’est une situation compliquée : les banques ont encore dans leurs bilans des actifs financiers toxiques et elles ont accordé des prêts à des pays qui ont des difficultés budgétaires. Elles sont doublement exposées aux yeux des investisseurs internationaux qui s’en défient.

Dans le même temps, les Etats peinent à mettre en oeuvre une stratégie permettant de réduire les déficits publics (et la dette) tout en préservant la croissance économique.

L’Union européenne exige par exemple de ses membres que les déficits publics ne dépassent pas 3% du Produit intérieur brut (PIB) d’ici 2013 contre 8% à 10% cette année. Or, la croissance dans les 27 pays de l’UE n’a atteint que 0,2% au premier trimestre. Et personne ne prévoit une accélération au cours des prochains mois.

Dans ces conditions, la prédiction de Christian Noyer a toutes les chances de se réaliser : nous sommes bien partis pour 10 ans de rigueur avant de pouvoir envisager de sortir de la crise.