Rappel à l’ordre

La publication de résultats trimestriels positifs par les grandes banques occidentales a provoqué récemment ce que les boursiers appellent un “rally

La publication de résultats trimestriels positifs par les grandes banques occidentales a provoqué récemment ce que les boursiers appellent un “rally”. Les cours sont montés en flèche en quelques jours. Les investisseurs étaient soulagés par les chiffres : au premier trimestre, le bénéfice net de Goldman Sachs a progressé de 20% à 1,81 milliard de dollars, celui de JP Morgan Chase a atteint 1,52 milliard contre 2,29 milliards un an plus tôt tandis que Wells Fargo, qui a racheté Wachovia, a déjà fait savoir qu’il tablait sur un profit de 3 milliards. Citigroup a pour sa part publié une perte de 966 millions, ce qui constitue une nette amélioration par rapport à la perte de 5,19 milliards des trois premiers mois de 2008.

Les actionnaires ont noté que les résultats étaient bien meilleurs que prévu. Aurait-on sur-estimé les problèmes des banques ? Surtout, aurait-on touché un point bas dans la crise ? Il n’en fallait pas plus pour provoquer une hausse des indices. Entre le point bas du 9 mars et le 17 avril, le DJ Industrials a gagné 24% à New York, le FTSE 16% à Londres, le CAC 40 près de 23% à Paris et le DAX 28% à Francfort. Bien entendu, cela n’efface pas les pertes subies depuis le début de l’année ni, a fortiori, celles de l’année 2008. Pour autant, un vent d’euphorie a soufflé sur les marchés pendant environ un mois et demi jusqu’au lundi 20 avril, où l’on s’est souvenu que la crise était loin d’être terminée. Les principaux indices ont chuté de 2,5% à 4%.

Perte de crédit

Cette baisse a agi comme un rappel à l’ordre. Ce lundi 20 avril, Bank of America a en effet publié des résultats trimestriels considérés comme bons : un quasi-triplement du bénéfice net à 4,2 milliards, grâce il est vrai à l’intégration de Merrill Lynch, acquis l’an dernier et qui a apporté 3 milliards de contribution. Mais il fallait regarder de plus près les chiffres et ce qu’ont fait les analystes financiers de Goldman Sachs. Et qu’ont-ils découvert ? Que Bank of America continuait à perdre de l’argent sur le marché du crédit. Leur note a fait l’effet d’une bombe. La banque, qui a bénéficié d’une aide publique de 45 milliards de dollars à l’automne, a provisionné 13,38 milliards pour des pertes de crédit contre 8,54 milliards au quatrième trimestre 2008.

Si le secrétaire au Trésor américain, Tim Geithner, assure que les banques américaines sont correctement capitalisées, les dernières données du Fonds monétaire international (FMI) le démentent. Selon l’organisation, les dépréciations d’actifs des banques et des institutions financières devraient dépasser 4.000 milliards de dollars, dont 2.712 milliards aux Etats-Unis (contre une précédente estimation de 2.200 milliards en janvier), 1.193 milliards en Europe et 149 milliards au Japon. Pour y faire face, les banques n’ont levé jusqu’ici “que” 900 milliards, dont l’essentiel provenant des Etats. Conclusion : de nouvelles levées de fonds sont nécessaires. Il faudra trouver plusieurs centaines de milliards de dollars.

A cela s’ajoute la crise économique. Car si les banques ont souffert et souffrent encore de la crise financière elles vont aussi être pénalisées par la chute de l’activité économique. Toutes ces entreprises qui ferment, cela représente une activité en moins pour l’ensemble du secteur. Bref, il est encore trop tôt pour croire que nous sommes sortis de la crise.