par William de Vijlder, Chef économiste chez BNP Paribas
L’économie mondiale va-t-elle connaître cette année un printemps précoce ? Certes, une hirondelle ne fait pas le printemps, selon le dicton, mais les économistes divergent sur le nombre de données positives nécessaires pour conclure à un changement de saison. De manière générale, les résultats des enquêtes récentes sont repartis à la hausse, en particulier dans le secteur manufacturier et pour les commandes à l’exportation. Dernièrement, les données pour la zone euro dépassent les prévisions après une baisse sensible au T4 2019, qui s’est traduite par une très faible croissance dans la zone (0,1%) et même une légère contraction en France (-0,1%).
Pour janvier, la Commission européenne fait état d’une nette amélioration du sentiment dans l’Union européenne comme dans la zone euro. S’agissant de cette dernière, cette embellie s’expliquerait en grande partie par des évolutions positives dans l’industrie et la construction, tandis que la confiance reste stable dans les secteurs des ménages et des services. Par ailleurs, de fortes hausses du sentiment économique ont été enregistrées en Allemagne et en France. Les indices des directeurs d’achat au Japon et au Royaume-Uni se sont, par ailleurs également redressés en janvier.
À en juger par les prévisions du consensus Bloomberg, les économistes estiment que la croissanceen rythme annuel accélérera légèrement dans les prochains trimestres dans les pays de l’OCDE, ce qui correspond au profil de nos propres prévisions. Concrètement, aux États-Unis, la comparaison entre la distribution des prévisions individuelles de croissance du trimestre actuel et celle du quatrième trimestre, fait ressortir un déplacement vers la droite. La même observation vaut pour la zone euro. Par conséquent, la prévision de croissance médiane progresse de 1,6 % à 1,9 % aux États-Unis et de 0,9 % à 1,1 % dans la zone euro. Il convient de noter que, contrairement à la zone euro, l’extrémité gauche de la distribution des prévisions pour le quatrième trimestre aux États-Unis s’infléchit vers la gauche, en territoire de croissance négative. Une large dispersion reflète un désaccord considérable entre les prévisionnistes. Cela pourrait inciter les utilisateurs de ces prévisions – entreprises, ménages, etc. – à douter de la projection selon laquelle la conjoncture devrait s’améliorer : une prévision médiane inspire moins confiance, lorsque la dispersion est forte, que lorsqu’elle est faible. Les premières estimations de croissance du PIB aux États-Unis, au quatrième trimestre, n’y changeront rien. À 2,1 %, la croissance annualisée en glissement trimestriel reste inchangée par rapport au trimestre précédent mais les dépenses de consommation des particuliers – pilier de la croissance ces dernières années – ont sensiblement ralenti, et ce, malgré un marché du travail tendu. Il convient également de noter que le FOMC juge à présent la croissance « modérée » contre « forte » auparavant. Le FMI, dans ses projections mises à jour, reste également prudent car « peu de signes sont pour le moment visibles dans les données macroéconomiques globales ».
Au final, l’on observe une amélioration des données d’enquête. Encore faut-il à présent qu’elle se traduise par une progression des données réelles comme celles sur l’activité ou les dépenses, ce qui contribuerait à soutenir la confiance et créerait une dynamique auto-entretenue. Avec les perturbations liées à l’épidémie de coronavirus, il faudra s’armer de patience avant d’en arriver là.