par Caroline Nehwouse, économiste chez BNP Paribas
Finalisé à l’occasion du sommet européen du 30 janvier, le projet de nouveau «traité pour la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union économique et monétaire » renforce la discipline budgétaire au sein de l’Union européenne.
Il devrait être signé par 25 des 27 Etats membres de l’Union (à l’exception du Royaume-Uni et de la République tchèque) le 1er mars et entrer en vigueur au plus tard au 1er janvier 2013, une fois qu’au moins 12 États membres l’auront ratifié (en France, ce ne sera pas le cas avant les élections présidentielles, et le candidat socialiste a rappelé récemment sa volonté de renégocier le traité, s’il était élu). Le traité intergouvernemental prévoit de faire de la « règle d’or » une obligation légale – de préférence, est-il précisé, en inscrivant ce principe dans la Constitution.
Par ailleurs, un État pourra saisir la Cour de justice de l’Union s’il considère qu’un autre s’est accordé trop d’arrangements lorsqu’il a transposé la règle d’or dans sa législation. La Cour pourrait ainsi infliger au mauvais élève une amende de 0,1 % du PIB.
Malgré ces avancées, les rendements obligataires grecs mais aussi portugais ont atteint de nouveaux records. La résolution de la crise de la dette grecque est au centre des préoccupations des marchés financiers. La proposition de Mme Merkel de nommer un commissaire budgétaire européen qui disposerait d’un droit de veto sur les décisions économiques d'Athènes a été jugée inadmissible par la plupart de ses partenaires européens. Une telle proposition reviendrait, en effet, à une sorte de «transfert de souveraineté budgétaire au niveau européen pendant une certaine période». En attendant, l’Eurogroupe tarde à finaliser les détails du second plan d’aide à la Grèce. Un nouvel accord portant sur plus de 2 milliards d'économies supplémentaires en 2012 devrait être signé d’ici la mi-février. Enfin un certain nombre de questions, comme celle de la participation des institutions européennes, et en particulier de la Banque Centrale Européenne, demeurent ouvertes en ce qui concerne le compromis avec les créanciers privés, attendu prochainement.
Par ailleurs depuis l’abaissement de la note souveraine portugaise au rang d’investissement spéculatif, les marchés se mettent à redouter un scénario à la grecque pour le Portugal qui serait contraint de faire appel une seconde fois à l’aide internationale l’année prochaine. Dans ces conditions, les rendements portugais à 3 ans se sont fortement tendus, cette semaine, dépassant 24% en début de semaine, alors que les CDS atteignaient de nouveaux records.
Pourtant, le Portugal qui est sous assistance financière de la Troïka (FMI, UE et BCE) depuis mai 2011, diffère en de nombreux points de la Grèce. Ses efforts patents de consolidation budgétaire ont porté leurs fruits jusqu’à présent. Après 9,8% du PIB en 2010, le déficit public est retombé à près de 4% en 2011, soit nettement mieux que l’objectif de 5,9%, assigné par la Troïka. Cette amélioration résulte néanmoins d’un transfert exceptionnel en provenance des fonds de pension du secteur bancaire et ne sera pas reconduite en 2012, d’autant que la situation économique s’aggrave. Nous prévoyons une contraction du PIB d’environ 5% en 2012, contre « seulement » 3% selon les prévisions officielles, après déjà un repli de près de 2% en 2011. On assisterait alors à un nouveau dérapage budgétaire, nécessitant la mise en œuvre d’un autre train de mesures qui pèseraient à son tour sur l’activité.
Il apparaît désormais clair que l’austérité budgétaire n’est pas une condition suffisante pour assurer le retour à la croissance, notamment au Sud de l’Europe. Les chefs d’Etats européens en sont désormais conscients. Le soutien de l'activité et de l'emploi ainsi que la coordination efficace des politiques économiques étaient à l’ordre du jour du dernier sommet européen. Des actions phares pourraient être annoncées dans un avenir proche. A cet égard, la Commission européenne a déclaré qu’elle disposait encore d’ici à la fin 2013 de plus de 80 milliards d’euros d’aides régionales et sociales qui pourraient être redéployées pour l’emploi et les PME.
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